Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
M

Marie de Médicis (suite)

Les Grands (Condé, Conti, Bouillon, Longueville) profitèrent du mécontentement soulevé par ces événements pour se rebeller ; la reine, conseillée par Concini, préféra temporiser et, au traité de Saint-Menehould (15 mai 1614), les gorgea d’argent et d’honneurs, et leur promit de convoquer les états généraux. Politique de faiblesse, mais les états, grâce à la sagesse du tiers et du clergé, renforcèrent l’autorité monarchique. Ensuite, la reine put aller à Bordeaux, à la tête d’une armée — les princes s’étant de nouveau soulevés —, conclure les mariages espagnols (oct. 1615).

La régente, qui s’obstina à conserver Concini, créé maréchal d’Ancre, souleva l’opinion contre elle. Elle dut traiter de nouveau avec les Grands à Loudun (mai 1616) et, sur les conseils de Villeroi, fit rentrer Henri II de Condé au gouvernement, mais, en septembre, elle ordonna l’arrestation de ce dernier ; aussitôt, les troubles recommencèrent. C’est alors que le jeune Louis XIII entra en scène : il fit tuer Concini le 24 avril 1617, retint sa mère prisonnière au Louvre, puis l’éloigna à Blois (mai 1617) ; mais le duc d’Épernon fit évader la reine mère le 22 février 1619.

Une série d’aventures allait commencer pour Marie de Médicis. Celle-ci obtint tout d’abord sa liberté et le gouvernement de l’Anjou, mais, conspiratrice incorrigible, elle se mit à la tête des mécontents, et Louis XIII vainquit les troupes de sa mère à la bataille des Ponts-de-Cé (août 1620). Réconciliée avec son fils, Marie de Médicis retrouva son influence et en profita pour faire entrer son favori, Richelieu*, au Conseil du roi (1624).

Bientôt, insatisfaite du cardinal et poussée par son confesseur, Bérulle*, qui soutenait la politique catholique de l’Espagne, elle intrigua de nouveau. Néanmoins, elle connut un regain de faveur et fut chargée de la régence lorsque Louis XIII entreprit son expédition italienne (1629). Se croyant assez forte, elle résolut de chasser Richelieu avec l’aide d’Anne d’Autriche et de Gaston d’Orléans.

Son échec à la journée des Dupes (10 nov. 1630) vit sa perte définitive. Exilée à Compiègne en février 1631, elle s’en échappa en juillet ; mais, ne réussissant pas à s’enfermer dans une place forte française, elle quitta le royaume le 20 juillet 1631 pour n’y plus jamais revenir. Elle comptait sur un succès de Gaston d’Orléans, qui s’était rebellé, mais celui-ci fut vaincu. Marie de Médicis vécut alors d’abord aux Pays-Bas espagnols, puis passa en 1638 en Angleterre, où régnait sa fille Henriette, l’épouse de Charles Ier. Elle continua à intriguer et à solliciter de son fils la permission de revenir en France. Louis XIII ne le lui permit jamais. Marie de Médicis dut quitter l’Angleterre en 1640. Elle se rendit à Cologne, où elle mourut obscure et méprisée le 3 juillet 1642, quelques mois seulement avant Richelieu et Louis XIII.

P. P. et P. R.

➙ Concini / Henri IV / Louis XIII.

 B. Zeller, la Minorité de Louis XIII. Marie de Médicis et Villeroy (Hachette, 1897). / L. Batiffol, la Vie intime d’une reine de France au xviie siècle (Calmann-Lévy, 1906).

Marie Ire Stuart

(Linlithgow 1542 - Fotheringay, Northamptonshire, 1587), première reine d’Écosse (1560-1567).


Après avoir subi une terrible défaite face aux Anglais, à Solway Moss, le roi d’Écosse Jacques V mourait le 14 décembre 1542. Il y avait à peine huit jours que son épouse Marie de Lorraine (1515-1560) venait de lui donner un enfant, Marie Stuart, héritière du trône d’Écosse.


La situation à la mort de Jacques V

L’Écosse* n’était, certes, qu’une puissance de second rang. Le pays était pauvre, et, malgré les efforts de Jacques IV et de Jacques V, le pouvoir central était incapable de résister aux menées des grandes familles nobles. Pourtant, ce petit pays allait être l’enjeu d’un double affrontement religieux et politique, capital pour l’histoire de l’Europe.


Un affrontement religieux

L’Église d’Écosse, dont les grandes familles nobles ont monopolisé les bénéfices pour établir leurs cadets, est dans un état lamentable. Les idées de la Réforme, venues d’Angleterre, progressent donc rapidement.


Un affrontement politique

Il est intimement lié au précédent, car l’Angleterre protestante s’oppose à la France catholique d’Henri II et de la famille de Guise (et Marie Stuart est une Guise par sa mère), comme elle s’opposera plus tard à l’Espagne de Philippe II. Et Marie Stuart est à même de jouer dans cette lutte un rôle d’autant plus important que, par sa grand-mère Marguerite Tudor, elle prend rang dans la succession anglaise : après Marie Tudor et avant Élisabeth pour les catholiques, juste après Élisabeth pour les autres. Elle est donc une menace à la fois pour la monarchie anglaise, pour l’orientation protestante de l’Angleterre et pour la fortune politique des Tudors.


Une minorité agitée


Arran, Beaton et Marie de Lorraine (1542-1548)

En 1542, deux hommes briguaient la régence : d’une part, James Hamilton, 2e comte d’Arran (1515?-1575), successeur éventuel de Marie Stuart, qui était à la tête du parti favorable à la Réforme et à l’entente avec l’Angleterre, et, de l’autre, le cardinal David Beaton (v. 1494-1546), chef du parti catholique et profrançais, soutenu par la reine mère Marie de Lorraine. La noblesse écossaise trancha en faveur d’Arran : Beaton emprisonné, le traité de Greenwich (juill. 1543) fiançait Marie Stuart au futur Édouard VI. Mais Arran était un pauvre politique, et les intrigues de Beaton et de Marie de Lorraine l’obligèrent à accepter une réconciliation générale, à abjurer le protestantisme et à se tourner vers la France (sept. 1543). Le parti anglais fut définitivement ruiné par la réaction d’Henri VIII, qui se lança dans une « cour brutale » (« Rough Wooing ») : le comte de Hertford mena en Écosse deux expéditions dévastatrices (1543, 1545), reconstituant un instant une unité nationale écossaise contre l’Angleterre. Les protestants furent chassés des places fortes qu’ils occupaient par les troupes franco-écossaises : c’est ainsi que John Knox s’en alla ramer sur les galères françaises. Le seul succès d’Henri VIII fut l’assassinat du cardinal Beaton (mai 1546).