Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Mandchourie (suite)

En 1948, enfin, les victoires remportées par les communistes sur ce terrain préludent déjà à la victoire finale. En quelques mois, les nationalistes perdent près de 500 000 hommes et un matériel considérable. La campagne de Mandchourie vient de renverser l’équilibre des forces. Un an plus tard à peine, Mao Zedong (Mao Tsö-tong) devient président de la République populaire de Chine. L’histoire de la « Mandchourie » se termine, et celle du « Nord-Est » commence. De nouveaux colons, très différents de premiers immigrants chassés de leurs terres par la famine et la guerre, vont cultiver les terres les plus septentrionales. Désormais, l’exploitation de ces richesses est collective. L’ancienne Mandchourie, qui bénéficie de l’infrastructure héritée d’un demi-siècle d’impérialisme, devient la première région économique de Chine.

Son intégration à la nation chinoise est devenue une réalité depuis 1949. Il n’empêche qu’elle reste encore l’une des régions les plus en vue sur la scène internationale : les affrontements frontaliers sino-soviétiques en témoignent.

C. H.

➙ Chine / Japon / Russie / Russo-japonaise (guerre).

 T. R. Tregear, A Geography of China (Londres, 1965). / J. Pezeu-Massabuau, la Chine (A. Colin, coll. « U 2 », 1970). / J. Gernet, le Monde chinois (A. Colin, 1972).

mandéisme

Doctrine religieuse de l’une des sectes — sans doute celle qui, numériquement, fut la plus importante — issues du mouvement baptiste, qui fut florissante sur les rives du Jourdain et en Mésopotamie du ier au iiie s. apr. J.-C.


Ses derniers survivants (7 000, dont 5 500 dans la région de Bassora, Iraq) ont été étudiés en 1937 par Ethel S. Drower-Stevens.

Les membres de la secte, appelés sabéens (c’est-à-dire baptistes) par les Arabes (Coran V, 73 ; II, 59 ; XXII, 17) et chrétiens de Saint-Jean par les missionnaires du xviie s., se nomment eux-mêmes mandaya. Le mot vient de manda, « connaissance, gnose » (c’est-à-dire, dans le cas présent, « révélation ») : les mandéens se reconnaissent comme les dépositaires de la connaissance révélée par Manda d’Haiyé, la « Connaissance » ou le « Révélateur de la vie ». Ils ont été appelés parfois aussi du nom de nâsoraya (nazoréens), terme employé tantôt péjorativement pour désigner ceux qui sont retenus par le monde des ténèbres, tantôt élogieusement (et c’est son sens primitif) pour désigner l’élite de la secte. On retrouve ici une terminologie connue dans le judaïsme (en raison de la parenté entre les mots nazor et nazir) et présente dans le Nouveau Testament (Actes des Apôtres, xxiv, 5), qui s’applique à des hommes consacrés obéissant à des règles d’austérité en vue de préserver la vie.

La question des origines mandéennes est extrêmement complexe. Elle a fait de grand progrès depuis la publication, par M. Lidzbarski, des textes mandéens. Mais ceux-ci sont plus tardifs qu’on avait d’abord cru : ils semblent, en majeure partie, avoir été rédigés par les mandéens à l’époque islamique afin de pouvoir revendiquer le titre de « religion du livre ». Le problème des origines du mandéisme ne sera vraiment résolu que lorsqu’on pourra parvenir, à partir de ces sources, à distinguer un fond primitif et les emprunts successifs faits par les communautés mandéennes aux grandes religions du monde ambiant.

Le Ginzâ (Trésor), appelé encore Grand Livre ou Livre d’Adam, est le recueil le plus important des écrits mandéens. Il comprend deux parties. Le Ginzâ de droite contient les conceptions des mandéens sur la Création, le premier homme et l’œuvre du messager céleste, Manda d’Haiyé (« Connaissance de la vie »). Selon celui-ci, l’âme céleste, descendue dans le premier homme après sa formation à partir des éléments terrestres, habite désormais à la façon d’une puissance de vie l’humanité entière. Le temps présent est le temps pendant lequel se révèle l’Adam secret, ou Adam caché ; le salut est apporté par la révélation de Manda d’Haiyé. Le livre V (chap. iv) rapporte le baptême de Manda d’Haiyé par Jean-Baptiste ainsi que la mort et l’ascension de Jean. Il semble que les textes centrés sur la personne de Jean soient plus récents que ceux qui sont relatifs à Manda d’Haiyé : on a même suggéré, avec excès sans doute, que ces textes ont pu être composés à l’époque islamique en vue de rattacher la gnose mandéenne à un personnage historique.

Le Ginzâ de gauche livre des conceptions des mandéens concernant la mort et le « voyage céleste » de l’âme vers l’au-delà. Celle-ci doit gravir l’« échelle cosmique ». Le mandéisme est fondé sur ce contraste entre la chute affligeante d’Adam et Ève et l’« ascension » joyeuse des mandéens.

Un second recueil, le Sidra d’Yahya (ou Livre de Jean), encore appelé Drashe d’Malke (Discours des rois), plus récent que le Ginzâ, contient des points de contact nombreux avec le Nouveau Testament. Manda d’Haiyé y est présenté comme le « bon pasteur » et le « pêcheur d’âmes ».

Les écrits mandéens comprennent enfin de nombreuses compilations liturgiques qui permettent de se faire une idée des coutumes de la secte : a) le Qolastâ (Quintessence), chants et hymnes pour le baptême et pour l’« ascension » des fidèles ; b) le Tafsir Paghra, rituel des repas sacrés aux jours de fête — le fidèle recevait un aliment consacré, pain et eau coupée de vin, qui l’introduisait dans la communion des âmes d’en haut ; ce rite important de repas se rapproche davantage de celui des mazdéens que de l’eucharistie chrétienne ; c) l’Alf Trisar Shiala, qui concerne l’expiation des fautes rituelles ; d) le Diwan, recueil d’hymnes cultuels.

Les deux rites principaux des mandéens étaient le baptême par immersion dans le Jourdain et l’ascension du fidèle lors de sa mort.