Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Mali (république du) (suite)

Les xiiie et xive s. sont marqués par l’expansion, depuis la vallée moyenne du Niger, en milieu malinké, de l’empire du Mali* entre la zone préforestière et le désert, et d’autre part l’Océan et le pays de Gao. Ses grands souverains (mansa) sont Soundiata Keita au début et Mansa Moussa à l’apogée, vers 1330.

L’empire du Mali reçut au xve s. les coups des Mossis, mais tout autant d’une nouvelle hégémonie qui fleurit en aval de la boucle du Niger, parmi les Songhaïs, peuple d’agriculteurs et de pêcheurs (les Sorkos). Les foyers de cet Empire songhaï furent Koukya (ou Koukia) au viie s., puis Gao à partir du ixe s. ; son influence s’étendit progressivement au siècle suivant à l’amont jusque vers Ségou. Soumis à l’empire du Mali lors de son apogée, les Songhaïs s’en détachèrent ensuite, et leur chef, Sonni Ali, durant son règne de 1464 à 1492, jeta les bases de l’empire de Gao. Chef de guerre avisé, il s’empara de Tombouctou et de Djenné, bases du commerce transsaharien à l’époque, et lutta à la fois contre les Mossis, les Touaregs et les Peuls.

Mohammed Askia, un de ses gouverneurs, s’assura la succession par la force. Il organisa solidement ses territoires, dont il porta les limites du Mali à l’Aïr, plaçant à leur tête des gouverneurs. Tombouctou devint la deuxième capitale et connut un grand essor intellectuel, auquel les savants musulmans prirent part. Cependant, Mohammed Askia finit misérablement en 1538, dix ans après avoir été déposé par un de ses enfants.

Périodes d’anarchie et d’ordre se succédèrent. Un conflit surgit avec le Maroc à propos des salines de Teghaza (800 km au nord de Tombouctou), qui entraîna la chute de l’Empire à la suite de la défaite de Tondibi (50 km au nord de Gao) le 12 avril 1591. Les Marocains substituèrent leur autorité jusqu’à ce qu’ils dussent s’effacer à leur tour devant les Touaregs, qui s’installèrent à Tombouctou en 1737.

Au xviiie s. s’affirma la puissance des Bambaras*, qui allaient former le royaume de Ségou. Leur premier grand chef, Mamari Coulibali (ou Koulibali), dit Biton, régna de 1712 env. à 1755. Il porta ses armes aussi bien vers l’est (Djenné), le sud (le Bani) et le nord-ouest (Kaarta), organisant les territoires conquis. Vers 1770, une nouvelle dynastie s’imposa avec Ngolo Diara (ou Ngolo Dyara), qui étendit le rayonnement du royaume vers Tombouctou au nord et vers le Yatenga des Mossis à l’est. Son fils Manson (ou Monzon), roi de 1790 à 1808, eut constamment à intervenir dans les pays conquis, notamment dans le Kaarta et à Tombouctou, qui refusaient de payer le tribut. Il fit des captifs en quantité.

Le xixe s. voit le déclin du royaume de Ségou, dont le dernier chef puissant fut Daa, de 1808 à 1827. À ce moment, Cheikhou Ahmadou (ou Chékou Hamadou) fonde un empire peul dans le Macina et en construit la capitale à Hamdallahi (ou Hamdallaye) [à 20 km au sud de Mopti]. Au nom de l’islām, il se heurta aux Bambaras animistes et successivement aux Bobos, aux Maures, aux Touaregs, occupant même Tombouctou. Chef de guerre, il fut aussi un grand organisateur. Son fils Ahmadou Cheikhou (ou Hamadou Chékou), qui régna de 1845 à 1853, hérita de ses qualités.

Cependant, en 1857, El-Hadj Omar, originaire de la région de Podor au Sénégal, refoulé des rives du Sénégal par les Français, va s’installer à Nioro, bousculer les Bambaras de Ségou, où son fils Ahmadou régnera de 1861 à 1890, et se rendre maître du Macina en 1862, trouvant toutefois la mort dans la falaise du Bandiagara en 1864. Son neveu Tidiani régna sur le pays depuis Bandiagara jusqu’en 1893.

Enfin, les confins guinéo-maliens allaient être dès 1874 le point de départ d’une nouvelle hégémonie avec le Malinké Samory* Touré. Celui-ci entra d’abord en conflit avec le Kénédougou, pays sénoufo soumis aux Dyoulas. Son roi Tiéba (ou Tyéba) lui ayant résisté victorieusement dans sa forteresse de Sikasso (1887), il s’installa à Dabakala en Côte-d’Ivoire, d’où il continua d’opérer sur la région de Bougouni et de Sikasso, ne trouvant d’obstacle véritable que du côté des Français, qui le repoussèrent en Guinée et le firent prisonnier en 1898. Il est à noter que ces trois empires, qui eurent une existence simultanée de vingt ans, se réclamaient de l’islām et agissaient au nom du djihād (guerre sainte).

La pénétration européenne au Mali commença, en 1795 et en 1805, avec l’explorateur écossais Mungo Park (1771-1806), qui fut suivi notamment par le Français René Caillié* (Tombouctou, 1828) et l’Allemand H. Barth (1853). L’intervention militaire française depuis la vallée du Sénégal débuta avec la construction du fort de Médine (1857). Les missions vont se succéder avec Abdon Eugène Mage (1863), Paul Soleillet (1878), Gallieni* (1880). Le chemin de fer de Kayes au Niger est entrepris (1881-1904), Bamako est occupé en 1883 ; l’installation progresse chaque année pour être presque totale en 1893 sous l’action du colonel Louis Archinard (1850-1932) et s’achever pratiquement en 1898 avec la prise de Sikasso, où régnait Ba Bemba, frère de Tiéba.

Les territoires ainsi occupés formèrent en 1904 la colonie du Haut-Sénégal-Niger avec pour capitale d’abord Kayes, puis, en 1908, Bamako. La colonie prit le nom de Soudan français en 1920, tandis que les territoires orientaux étaient détachés en 1919 avec la création de la Haute-Volta. (Les territoires peuplés au nord du 15e parallèle de Maures nomades sont passés du Soudan à la Mauritanie en 1945.) De 1899 à 1959, le Mali relevait de la fédération de l’Afrique-Occidentale française et du gouvernement général de Dakar.

Le 24 novembre 1958, à la suite du référendum du 28 septembre, naquit la République soudanaise, d’abord associée au Sénégal dans la fédération du Mali, puis totalement indépendante à l’éclatement de celle-ci, le 20 août 1960, sous le nom de république du Mali, le 22 septembre 1960. Le nouvel État, sous l’impulsion de l’Union soudanaise du Rassemblement démocratique africain (R. D. A.) et de son chef Modibo Keita, adopta l’option socialiste : plan quinquennal, séparation d’avec la zone franc, accords financiers et économiques avec les pays de l’Est sans rupture toutefois avec l’Occident. Malgré des réalisations importantes, notamment dans le domaine industriel, l’économie ne prospéra guère, et le mécontentement se développa. À la suite du coup d’État le 19 novembre 1968, l’armée vint au pouvoir et créa le Comité militaire de libération nationale, faisant du lieutenant, puis colonel Moussa Traoré le chef de l’État (1969), et décidant que le retour à une vie constitutionnelle normale dépendrait du redressement économique et financier (programme triennal 1970-1972).

P. B.