Mahābalipuram ou Mahāvalipuram (suite)
Compte non tenu de rares fondations, inachevées, de la période de Vijayanagar (xve-xvie s.), l’art de Mahābalipuram, essentiellement rupestre (sanctuaires excavés, temples et sculptures monolithes, reliefs pariétaux), apparaît comme particulièrement homogène. Trois styles pallava sont généralement distingués, correspondant à trois périodes successives d’activité. Le premier (règne de Mahendravarman Ier [600-630]) est le plus sobre. Le deuxième (Narasiṃhavarman Ier [630-668]), le plus abondamment représenté, marque l’épanouissement, la maturité de l’école. Le dernier (règnes de Narasiṃhavarman II Rājasiṃha [v. 700-728] et de ses successeurs) introduit, avec les premiers temples maçonnés, un art plus ornemental, des figures plus graciles et mouvementées. D’une manière générale, on retiendra la variété des types architecturaux, les dimensions modestes des sanctuaires, la qualité et la distinction de la sculpture. Reliefs et rondes-bosses témoignent tous d’un art consommé, d’une parfaite technique, d’un sens très sûr de la composition. La beauté classique des figures humaines, les gestes mesurés évoquent un monde divin accueillant, tandis que les animaux sculptés (singes, éléphants...) révèlent une qualité d’observation, une connaissance de la nature qui n’excluent pas plus la verve créatrice (« Descente du Gange ») que le sens du fantastique (cave du Tigre, à 5 km au nord du village).
Les principaux monuments
Les célèbres Cinq monolithes (les ratha, sanscr., proprem. les « chars »), du groupe sud, sont de petits sanctuaires sculptés dans la roche. Sobrement ornés, ils offrent la particularité de présenter des plans et des types de toitures tous différents. Sur la colline centrale, quelques édifices maçonnés et divers monolithes (Gaṇeśa-ratha ; groupes d’animaux d’un réalisme sensible : familles d’éléphants, de singes) voisinent avec onze sanctuaires excavés de dimensions modestes. Si certains sont inachevés, la plupart renferment des reliefs souvent remarquables, qui non seulement prennent place parmi les œuvres majeures de la sculpture indienne, mais méritent de figurer parmi les chefs-d’œuvre de l’art mondial (cave I : images de Mahendravarman et de ses épouses ; cave II : Viṣṇu couché sur Ananta ; cave IV : Kriṣṇa soulevant le mont Govardhana ; cave VI : Viṣṇu dans l’avatāra du sanglier...). Aucune de ces sculptures ne peut, cependant, soutenir la comparaison, tant pour l’ampleur que pour la richesse de la composition, avec le grand relief identifié « Pénitence d’Arjuna » ou, plus volontiers, « Descente du Gange ». Haut-relief d’un équilibre tout classique, développé sur plus de 25 m de longueur et de 7 m de hauteur sur l’escarpement oriental de la colline, ordonné de part et d’autre d’une faille naturelle où bondit une cascade, utilisant au mieux les contours de la roche, c’est l’œuvre maîtresse de la sculpture pallava. À l’est, aujourd’hui directement au contact de la mer, le temple du Rivage est une fondation du règne de Rājasiṃha dont la composition et la construction annoncent les grands temples de Kāñcīpuram (auj. Kānchīpuram ou Conjeeveram) [Kailāsanātha, Vaikuṇṭha Perumāl].
C’est, sans doute, d’abord à l’importance du port disparu de Mahābalipuram que l’école pallava, dont les rapports avec l’art cinghalais s’expliquent historiquement, doit d’avoir exercé une influence sensible sur l’art contemporain de l’Asie du Sud-Est.
J. B.
➙ Ceylan / Inde.
G. Jouveau-Dubreuil, les Pallavas (Paris et Pondichéry, 1916). / C. Sivaramamurti, Mahābalipuram (Delhi, 1955).