Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
M

magnétohydrodynamique (suite)

Hannes Alfvén

Physicien suédois (Norrköping 1908). Il est l’auteur de théories relatives au déplacement des particules constituant le plasma de la magnétosphère et il a découvert en 1947 les ondes se propageant dans ce milieu. Prix Nobel de physique en 1970. [V. Alfvén (ondes de).]


Hypothèses fondamentales

La théorie de la M. H. D. repose sur certaines hypothèses :
— les phénomènes observés sont de basse fréquence (ce qui permet de négliger le courant de déplacement devant le courant de conduction dans l’équation de Maxwell-Ampère) ;
— le fluide conducteur est globalement neutre du point de vue électrique (il n’y a pas de charge d’espace ξ, c’est-à-dire qu’il y a autant d’électrons que d’ions dans un volume élémentaire), de sorte qu’on peut négliger la force électrique ξE devant la force magnétique
— le fluide est isotrope, c’est-à-dire que sa conductivité électrique σ est, en dépit de la présence du champ magnétique, supposée scalaire, ce qui implique un libre parcours moyen des électrons beaucoup plus petit que leur rayon de giration dans le champ B. Il existe alors une relation de proportionnalité entre la densité de courant et le champ électrique , mesurés dans un référentiel lié au fluide :

qui n’est autre que la loi d’Ohm. Dans le référentiel du laboratoire, où le fluide se déplace à la vitesse , elle s’écrit alors

est le courant lié à la convection du fluide et le champ électrique d’induction. Avec la première hypothèse, ξ ≃ 0, elle devient

Ces hypothèses sont automatiquement satisfaites si c étant la vitesse de la lumière dans le vide, c’est-à-dire si le mouvement est non relativiste, ce qui est en général le cas.

Dans ces conditions, la combinaison de l’équation de Maxwell-Faraday (v. Maxwell [équations de]) et de la loi d’Ohm conduit à l’équation d’évolution du champ magnétique

qui, compte tenu de l’équation de Maxwell-Ampère s’écrit

Cette loi est fondamentale, car elle sépare les effets dus à la conductivité (et qu’on observe même en l’absence de mouvement du fluide) de ceux qui sont dus à la convection du fluide. La comparaison des ordres de grandeurs de ces deux effets s’obtient en introduisant, par analogie avec la dynamique des fluides visqueux, un nombre de Reynolds magnétique Rm défini par

L et V étant une longueur et une vitesse fixant les ordres de grandeur de la dimension du système et des vitesses qu’on y observe.

Cette analogie, qui fait jouer au facteur le rôle d’une « viscosité magnétique », n’est pas seulement formelle, le champ magnétique ayant réellement un rôle frénateur par l’énergie dissipée par effet Joule, tout comme la viscosité ordinaire dissipe de l’énergie par frottement visqueux ; par exemple, on observe cet effet dans l’écoulement turbulent d’un fluide conducteur : la turbulence disparaît dès qu’un champ magnétique est appliqué. Le nombre Rm est aussi le rapport de l’énergie de convection du fluide à l’énergie dissipée par effet Joule. On aura donc les deux limites :


Diffusion du champ magnétique

Bien que ne rentrant pas dans le cadre de la M. H. D. proprement dite, où la conductivité est supposée très grande, il est intéressant d’examiner la signification physique de la limite (4a), Cette limite signifie donc-que, d’après (2), le champ obéit à la loi

qui a la forme d’une équation de diffusion, comme pour la chaleur. On parle alors de diffusion des lignes de force du champ magnétique : avec le champ en un point varie suivant τ0 est le temps de diffusion :

qui montre que, même si σ n’est pas très grand, τ0 peut l’être dès que les dimensions du système le sont : ce sera le cas en astrophysique.

Cette diffusion est évidemment liée aux pertes par effet Joule subies par les courants créés par le champ magnétique : on peut dire que l’énergie magnétique est diffusée dans la matière par l’intermédiaire des courants et qu’elle y est dissipée par effet Joule sur ces courants.

Le tableau suivant donne quelques valeurs de Rm et de τ0 pour quelques exemples.

Ce tableau montre que la limite est atteinte beaucoup plus facilement dans les conditions cosmiques, où, bien que σ ne soit pas très élevée, les valeurs de L sont considérables.

Pour les systèmes cosmiques, on constate que le champ dure très longtemps, et la question de son origine et de son entretien reste posée. Pour le champ magnétique terrestre, l’hypothèse d’une aimantation permanente installée lors de la formation de la Terre ne peut être retenue, le temps (104 ans) étant beaucoup trop petit ; la théorie dynamo tente de l’expliquer par le couplage du champ au mouvement du fluide conducteur, qui constitue une des parties du noyau central de la Terre : une situation où le champ pourrait croître avec le temps (instabilité) pourrait alors permettre de compenser les pertes Joule et d’obtenir un état quasi stationnaire.


Champ magnétique gelé dans la matière

Dans la limite inverse (4b), l’équation (2) devient

qui exprime l’entraînement des lignes de force par la matière, sans mouvement relatif des unes par rapport à l’autre (on dit que le champ est gelé dans la matière). En effet, le fluide étant parfaitement conducteur (σ → ∞), il ne peut, d’après la loi d’Ohm, supporter des courants finis que si

formule qu’on montre équivalente à (7), en prenant le rotationnel de (8) et en tenant compte de l’équation de Maxwell-Faraday.

Le champ mesuré dans un référentiel lié au plasma, est donc nul d’après (8) : cela est bien conforme à la limite du conducteur parfait, où aucune séparation de charges ne peut s’établir. Il n’y a donc pas de force électromotrice e d’induction le long d’un contour fermé , emporté par le fluide ; or, le flux Φ à travers reste donc constant, ce qui implique l’absence de déplacement relatif des lignes de force et du fluide.