Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

anthropologie physique (suite)

Le mauvais fonctionnement des surrénales se traduit, chez des sujets blancs atteints de la maladie bronzée dite « d’Addison », par une hyperpigmentation, ce qui fait penser que les Noirs devaient être des hyposurrénaliens constitutionnels. On a trouvé certains indices favorables à cette hypothèse : anatomiquement, la corticosurrénale des Noirs est moins développée que celle des Blancs ; des recherches sur l’équilibre biochimique du plasma sanguin permettent de conclure que, sans parler vraiment d’insuffisance, l’activité des surrénales est moindre chez les Noirs que chez les Blancs.

Bien qu’on ne sache presque rien sur les autres glandes endocrines, les faits rapportés ci-dessus suffisent à suggérer que l’endocrinologie comparée des types raciaux constitue un domaine particulièrement riche, dont l’exploitation systématique devrait aboutir à des découvertes du plus haut intérêt.


Appareils circulatoire et respiratoire

Nous n’avons actuellement que très peu de renseignements sur le fonctionnement de ces appareils en rapport avec la race. La capacité vitale des Blancs semble nettement supérieure à celle des Jaunes ou des Noirs. Le rythme normal de la respiration, la fréquence du pouls et la pression artérielle ont de grandes chances de varier d’un groupe à l’autre, mais les observations sont trop rares, et les modifications de ces mécanismes d’une interprétation trop complexe, pour que l’on puisse isoler une influence certaine du facteur racial.


Système musculaire

Le système musculaire de la face, du tronc et des membres présente d’incontestables différences anatomiques, non seulement dans le développement et la forme des muscles, mais aussi quant à la présence ou l’absence de certains d’entre eux. Il y a de plus des variations de la structure des articulations et de la laxité des ligaments. Ces divergences se répercutent inévitablement sur la dynamique musculaire.

C’est ainsi que les Mélanodermes s’accroupissent par une flexion extrême du genou et du pied, la plante de ce dernier restant sur le sol ; les Blancs, pour prendre la même position, sont obligés de se mettre sur l’extrémité des orteils. Autre exemple : la position de repos adoptée par les Noirs nilotiques, une jambe repliée avec le pied posé sur la cuisse de l’autre membre, est absolument incompatible avec la musculature du Blanc. En revanche, la préhensilité du pied, qui permet à nombre d’Extrême-Orientaux d’effectuer avec leurs pieds ce qu’on fait habituellement avec les mains (tirer à l’arc, lancer un javelot, écrire, ramer, etc.), ne relève vraisemblablement pas d’une différence raciale, mais plutôt d’une adresse acquise par l’entraînement. Quant aux inégalités de la force musculaire, elles se révèlent délicates à comparer en raison de nombreuses variations individuelles. Seuls certains Jaunes (Japonais, Indonésiens, quelques Amérindiens) paraissent n’avoir qu’une force musculaire assez faible ; les Noirs et les Blancs sont de force à peu près comparable, les uns ne l’emportant sur les autres qu’en fonction de l’effort demandé.


Pathologie raciale

La pathologie comparée des races constitue un vaste domaine. Les difficultés de comparaison et d’interprétation, déjà largement rencontrées pour les mécanismes physiologiques normaux, sont ici infiniment plus nombreuses et plus complexes.

Cependant, l’étude des causes de la mortalité dans les grands groupes raciaux a apporté plusieurs notions intéressantes. On a surtout mis en parallèle des Blancs et des Noirs, d’après les statistiques d’un des plus importants hôpitaux des États-Unis. Il en ressort avec évidence que les maladies des appareils respiratoire et circulatoire provoquent beaucoup plus de mortalité chez les Noirs que chez les Blancs. Les documents rassemblés sur la tuberculose apportent incontestablement la preuve de la particulière vulnérabilité des Mélanodermes à cette maladie : épreuves de tuberculine, analyse des expectorations, réactions aux traitements, comportement intermédiaire des mulâtres sont autant de tests qui aboutissent à des résultats concordants et mettent en avant l’action du facteur racial dans la pathologie pulmonaire. Parmi les affections circulatoires, citons l’anémie à cellules falciformes, qui suggère aussi une influence de la race : pratiquement absente chez les Blancs, elle se montre extrêmement fréquente chez les Noirs. À l’opposé, l’hémophilie, si courante chez les Blancs, est très rare chez les Noirs.

On pourrait multiplier les exemples sur ce sujet : localisations préférentielles des cancers suivant la race, fréquences variables du rachitisme et de nombreuses maladies infectieuses ou parasitaires. Que l’anthropologie puisse aujourd’hui trouver dans la pathologie comparée une orientation nouvelle pour ses propres problèmes semble certain, mais le point le plus délicat demeure toujours de déterminer ce qui, dans les maladies, dépend de particularités constitutionnelles et ce qui est commandé par des conditions de milieu géographique ou d’ethnie.

De cette rapide récapitulation des éléments sur lesquels repose l’anthropologie physiologique, on conçoit que cette dernière puisse enrichir la connaissance des groupes humains par un apport extrêmement fécond de données nouvelles. Doit-on pour autant mettre au rebut l’anthropologie morphologique ? C’est incontestablement la tendance actuelle, et il paraît significatif que la nouvelle génération d’anthropologistes veuille, dans cette intention, substituer le terme d’anthropobiologie à celui d’anthropologie physique. Une telle attitude, dans ce qu’elle a d’intransigeant, semble dangereuse. D’une part, il ne faut pas oublier que toute une partie de l’anthropologie, celle qui concerne les Hommes fossiles, n’est accessible que par l’étude morphologique des squelettes ; d’autre part, il serait entièrement arbitraire de séparer, dans l’étude des Hommes actuels, la forme de la fonction, car l’une et l’autre ne représentent jamais que deux aspects indissolublement liés de tout organisme vivant. Le véritable problème anthropologique ne réside pas dans une prétendue suprématie du physiologique sur le morphologique ou vice versa, mais repose essentiellement sur l’impérieuse obligation de mieux saisir le dynamisme interne de l’évolution des groupes humains, en recherchant à la fois le comment et le pourquoi de la variabilité biologique. Dans cette perspective, les deux principales sections de l’anthropologie physique doivent se compléter sans s’opposer, et accepter, avec discernement, ce que peuvent leur apporter les autres sciences de l’Homme, génétique, démographie, ethnologie, biométrie, etc. L’isolement, nécessaire à une certaine époque de leur histoire, ne se conçoit plus aujourd’hui, dans la mesure où il bloque tout essai d’analyse en profondeur des phénomènes humains.

P. M.

➙ Race.