Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Madrid (suite)

Madrid est ensuite le plus important foyer intellectuel de l’Espagne. L’université de Madrid, héritière de la célèbre université d’Alcalá de Henares, a bonne réputation et attire de toute l’Espagne, et même de l’étranger (Amérique du Sud surtout), près de 37 000 étudiants et plus de 21 000 élèves de grandes écoles. Le rapide accroissement des effectifs a rendu les locaux de la Cité universitaire trop exigus ; une université autonome, créée en 1968, est actuellement en construction à l’ouest du parc de la Casa de Campo.

En liaison avec l’université, Madrid possède un grand nombre de centres de recherches. Son patrimoine culturel est très important avec les Archives, la Bibliothèque nationale et le célèbre musée du Prado.

En troisième lieu, Madrid est la première place bancaire espagnole et détient de ce fait une part importante de la direction de l’activité économique du pays. À côté de la Banque d’Espagne, qui a le monopole de l’émission depuis 1849, quatre des six grandes banques privées ont leur siège social à Madrid. Les deux autres ainsi que diverses banques de moindre importance y ont de très grosses succursales. Quelques banques étrangères y ont aussi des agences. Toutes ces banques, dont les sièges principaux sont tous établis dans un quadrilatère compris entre le Paseo du Prado et la Puerta del Sol, accueillent 28 p. 100 des dépôts bancaires et 23 p. 100 des placements espagnols, venant ainsi très loin devant Barcelone et le Pays basque.

La fonction commerciale est à la mesure d’une grande agglomération urbaine. Un vaste réseau de relations commerciales assure le ravitaillement de la ville en denrées alimentaires, les cultures maraîchères des vegas des environs de Madrid et les élevages du piémont de la Sierra ne pouvant que très partiellement y pourvoir. Presque toutes ces denrées sont apportées dans le quartier de Legazpi, où se trouvent l’abattoir municipal et le marché central des fruits et légumes ; le marché central des poissons est situé dans la vieille ville près de la Puerta de Toledo.

Le commerce de détail reste essentiellement le fait de petites entreprises familiales ; en dehors de l’alimentation, il est surtout concentré dans la vieille ville, où l’on vient de la périphérie, voire de province, pour se procurer les articles non courants. C’est aussi dans le centre que se trouvent les grands magasins.

L’importance du commerce de luxe, notamment dans la calle Serrano, s’explique par la fonction touristique de Madrid. Ville plaisante qui offre le pittoresque de sa vieille ville aux rues tortueuses, ses richesses architecturales (Plaza Mayor, Palais royal), le charme de ses paseos fleuris, de ses fontaines monumentales et de ses jardins, la richesse de ses musées, l’animation de ses rues commerçantes, sa vie nocturne..., Madrid n’accueille jamais moins de 100 000 voyageurs par mois et jusqu’à 180 000 en été, lorsque les touristes étrangers affluent, parmi lesquels les Nord-Américains dominent largement.

Madrid est enfin devenue le second centre industriel espagnol après Barcelone. Le développement de l’industrie y a été encouragé par la présence à la fois d’une main-d’œuvre abondante et d’une vaste clientèle. Ces facteurs, ajoutés à l’éloignement des matières premières et des ports d’importation, expliquent la prédominance des industries de transformation. L’énergie principale est l’électricité : Madrid est reliée par un réseau convergent de lignes à haute tension aux centrales hydro-électriques du Duero, du Sil et du Miño, du Tage et du Jucar, et aux centrales thermo-électriques de Ponferrada et Puertollano ; depuis 1968, une centrale nucléaire est entrée en service à Zorita de los Canes, et une seconde usine est projetée.

La métallurgie différenciée vient en tête des activités industrielles avec la construction automobile (Pegaso et Barreiros) et la fabrication de matériel électrique (Standard Eléctrica, Marconi, Telefunken), de moteurs et de machines variées. Trois autres branches sont ensuite d’importance comparable : l’alimentation, le textile (confection) et la chimie. En dehors de quelques grosses entreprises, elles sont généralement beaucoup plus dispersées en de petits ateliers. Les industries du bâtiment constituent la dernière branche importante dont l’essor, matérialisé par quelques puissantes entreprises (Agroman), est lié à la rapide croissance urbaine. Le travail du bois, des peaux et des cuirs, la chaussure, le papier et les arts graphiques complètent le tableau des industries. Au total, on comptait en 1968 plus de 30 000 entreprises industrielles, dont près des deux tiers étaient des ateliers de type artisanal n’employant que 12 p. 100 de la main-d’œuvre.

Il en résulte une extrême dispersion des activités industrielles à travers toute la ville, particulièrement dans les anciens faubourgs, mais aussi bien dans la vieille ville et dans l’Ensanche. Toutefois, les grandes entreprises, et autour d’elles un grand nombre de petites et moyennes usines, se sont concentrées dans deux secteurs : le plus important est situé dans le sud de la ville entre Atocha et le Manzanares avec les ateliers de la RENFE, la Standard Eléctrica et les Manufacturas Metálicas Madrileñas ; cette zone industrielle déborde sur l’autre rive du Manzanares (Telefunken) et se prolonge vers le sud en direction de Villaverde avec Barreiros, la Standard, Marconi, des ateliers de la RENFE et Agroman. Plus au sud encore, elle se continue par les importantes usines de Getafe et de Leganés. La seconde zone industrielle se développe à l’est, de part et d’autre de la route de Barcelone, avec notamment les ateliers de l’aéroport de Barajas et les usines de camions de Pegaso ; son extension vers l’est va à la rencontre des usines d’Alcalá de Henares.


Les problèmes de la croissance

Le vieux Madrid s’était développé de façon anarchique, et le percement de la Gran Vía au début du siècle n’en a guère changé la physionomie. Au contraire, après 1850, le plan de Castro imprima à l’Ensanche la rigueur de son tracé géométrique ; mais aussi bien les immeubles luxueux qui bordent les Paseos ou qui ont été édifiés dans le quartier de Salamanca et en bordure du parc de l’Ouest que les maisons plus modestes des quartiers de Chamberí ou du Niño Jesús n’étaient accessibles qu’aux classes moyennes ou aisées. Les ruraux qui affluaient à Madrid s’établissaient à la périphérie de la ville où proliféraient les petites maisons individuelles des faubourgs. En 1882, un projet de « cité linéaire » autour de Madrid tenta de remédier à cette croissance anarchique, mais une seule de ces cités-jardins fut réalisée au N.-E., la Ciudad Lineal. En 1929, un plan axé sur la prolongation vers le nord de la Castellana ne fut que très partiellement appliqué. Au lendemain de la guerre civile, un plan d’urbanisme fut élaboré et adopté par les Cortes en 1944 ; mais le marasme économique entravait la construction.