Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
M

Ma‘arrī (Abū al-‘Alā’ al-) (suite)

Quel rayonnement eut cette pensée en son temps ? Les attaques des détracteurs, l’apologie des admirateurs révèlent certes un partage. Un fait est sûr : Abū al-‘Alā’ a réussi à mourir sans tomber sous le coup d’une excommunication majeure. Et pourtant, les réticences à son égard, le silence fait sur les hardiesses de sa pensée religieuse ont représenté durant des siècles une sorte de revanche de l’orthodoxie à l’égard d’un penseur dont la vie entière a été un éternel refus. Depuis quarante ans, l’admiration qui entoure le nom d’Abū al-‘Alā’ et son œuvre témoigne avec éclat de tout ce que les générations nouvelles découvrent en cet esprit si parfaitement unique dans la littérature arabe.

R. B.

 S. Margoliouth, The Letters of Abûl-‘Ala’ of Ma‘arrat Al-Nu‘man (Oxford, 1898). / M. Asin Palacios, La escatologia musulmana en la Divina comedia (Madrid, 1919 ; 2e éd., 1943).

Macao

En portug. Macau, « province d’outremer » du Portugal, en Asie.


Située au sud de la province chinoise du Guangdong (Kouang-tong), Macao a une superficie de 15,5 km2 et une population de 169 299 habitants au recensement de 1960 ; une estimation de l’O. N. U. indique 320 000 habitants en 1972. Elle comprend une très petite péninsule, à peine rattachée au continent, la péninsule de Macao (5,4 km2) et deux petites îles, Taipa (3,5 km2) et Coloane (6,6 km2). L’ensemble est situé à la pointe occidentale de l’estuaire de la « rivière des Perles » (Zhujiang) [Tchou-kiang], en face de Hongkong*.


La géographie

La péninsule et les îles présentent le paysage habituel de la Chine méridionale, celui de basses montagnes à flancs abrupts : dans la péninsule, il s’agit de collines ne dépassant pas 77 m ; dans Taipa et Coloane, les altitudes atteignent respectivement 61 et 173 m ; collines ou basses montagnes ont été entaillées par l’érosion dans des granités crétacés. Le paysage actuel est émietté et, cependant, il a été régularisé par l’accumulation actuelle. La péninsule est un tombolo : plusieurs petits îlots granitiques ont été réunis entre eux, puis rattachés au continent par un cordon littoral. Taipa, de même, est formée de deux îles, encore séparées en 1912, réunies par une plaine de colmatage qui tend à s’élargir vers le sud ; seule Coloane est formée d’un seul arc granitique, série de pics séparés par des cols et donnant sur la mer une côte généralement abrupte. Le paysage de Coloane (2 800 hab.) et de Taipa (4 600 hab.) est fait de minuscules plaines habitées et cultivées, de pentes désertes où la végétation primitive a été en grande partie détruite et où l’érosion ravage les sols ferralitiques. La péninsule est en majeure partie urbanisée, ce qui explique l’énorme densité humaine.

Macao (en pinyin Aomen) fut la porte de la Chine pendant près de trois siècles et, aux xviie et xviiie s., une des bases du commerce européen en Extrême-Orient : la presqu’île présente en effet, sur sa face occidentale, un assez bon site portuaire. Le rôle commercial de Macao lui a été enlevé à peu près complètement par Hongkong, et l’activité actuelle du port vient, aujourd’hui précisément, de ces liaisons avec le grand centre britannique et du cabotage. L’activité industrielle, portant sur les petites industries plus ou moins artisanales, est réduite : elle est localisée à l’ouest dans la zone portuaire et est difficile à distinguer du petit commerce du quartier typiquement chinois de « Baino do Bazar ». Macao fut un temps la capitale de la contrebande, du trafic de l’or, de l’opium et surtout du jeu ; la pression de la République populaire de Chine a mis fin à ces activités et, aujourd’hui, les habitants de la ville subsistent difficilement.

La ville occupe presque toute la péninsule. Cependant, l’Ouest a encore des zones agricoles : cultures maraîchères extrêmement intensives (patate douce, igname, piment, légumes) et élevage des porcs. Les collines sont couronnées par des forts ; mais la colline de Camões est un magnifique jardin autour du monument qui célèbre le poète. Toute la vieille ville portugaise, au cœur de la cité, autour du Monte et de la façade seule debout de la cathédrale São Paulo, qui avait été, avant d’être détruite par un incendie, la plus grande église de l’Extrême-Orient, a un aspect très méditerranéen (rues étroites et en pente, dallées de petits pavés de couleur, entre des maisons à balcon de fer forgé).

L’agriculture est plus développée à Taipa et Coloane : cultures maraîchères et riziculture pratiquées par des paysans vivant en villages. La pêche, côtière, est une occupation essentielle pour l’ensemble.

L’immense majorité de la population est chinoise, mais un nombre non négligeable a la nationalité portugaise. Les véritables Portugais sont peu nombreux. Si l’avenir politique de Macao n’est guère menacé, la République populaire de Chine reconnaissant le territoire comme portugais et y ayant d’ailleurs une influence déterminante, l’économie actuelle y est languissante. Macao a perdu de son importance et demeure essentiellement l’émouvant témoin d’une glorieuse époque révolue.

J. D.


L’histoire

C’est le plus ancien établissement européen fondé en Chine. Les Portugais occupèrent Macao en 1557, et la ville fut d’abord le centre d’activés missions religieuses aux mains des Jésuites ; en 1576, un évêché y fut créé. Les Chinois avaient de bonne heure édifié une muraille destinée à isoler la ville du reste de la Chine.

Grâce à sa rade et à son port, qui offraient des abris sûrs, Macao fut un centre de commerce intense entre la Chine, le Japon, l’Inde, la Malaisie et l’Europe. C’est le xviiie s. qui vit l’apogée de sa prospérité économique, mais, au xixe s., Macao fut éclipsée par le port de Hongkong*, où les Britanniques s’étaient installés en 1842.

Les gouverneurs portugais payèrent une redevance aux Chinois pour l’occupation de Macao jusqu’en 1849, mais, en 1846, ayant décidé de la transformer en port franc pour ranimer son commerce, ils avaient institué une taxe sur toutes les barques qui faisaient le trafic entre le port et Canton. Mécontents, les Chinois tentèrent de prendre la ville ; ils renouvelèrent vainement leur tentative en 1849, lorsqu’un nouveau conflit sino-portugais éclata après l’assassinat de l’amiral portugais João Maria Ferreira do Amaral.

À la suite de ces luttes, le Portugal cessa de payer le tribut aux Chinois, mais ce n’est qu’en 1887 que ceux-ci reconnurent par traité la souveraineté absolue et perpétuelle des Portugais sur le port de Macao.

De 1923 à 1926, un port en eau profonde fut construit. Le commerce du riz, du poisson, du thé, de la soie et surtout le trafic de l’opium alimentaient l’activité portuaire. Durant la Seconde Guerre mondiale, les Japonais n’occupèrent pas l’enclave portugaise.

En 1966, des manifestations d’ouvriers chinois réprimées par la police portugaise furent suivies d’émeutes déclenchées par des communistes chinois, et il y eut des morts. À la suite de ces événements, le gouvernement portugais dut céder à l’ultimatum de Pékin, chasser les nationalistes chinois de la ville, fermer leurs écoles et indemniser les victimes.

P. R.

 L. G. Gomes, Efemérides da história de Macau (Macao, 1954). / J. Kessel, Hong Kong et Macao (Gallimard, 1957). / R. S. de Brito, Imagens de Macau (Lisbonne, 1961).