Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
L

Louis XVI et Directoire (styles) (suite)

Le décor du mobilier Louis XVI utilise largement la marqueterie ; mais aux semis de fleurs jetées avec une apparente liberté sur les surfaces à décorer succèdent des compositions ordonnées : gerbes, corbeilles de fleurs, trophées d’instruments de musique, d’appareils scientifiques ou d’instruments pastoraux. Certains maîtres dessinent des scènes à figures, imitent les paysages « historiques », c’est-à-dire meublés de ruines antiques, ou reproduisent des événements contemporains, témoin l’envol des aérostiers Jacques Charles et Robert, à Paris, en 1783. Les panneaux de laque de Chine, du Japon, de Coromandel, mis en vogue au milieu du xviiie s., conservent leur faveur et suscitent des imitations, voire les contrefaçons en vernis. Dans les années 1775 apparaît un mode de marqueterie qui semble réagir contre les formules compassées : des maîtres ébénistes réputés, Roger Vandercruse (1728-1799) et Charles Topino (v. 1730 - apr. 1789), alignent sur les façades de leurs meubles des images d’objets usuels, pots, encriers, cruchons, sans rapport d’échelle ni ordonnance. Et ces ouvrages n’en ont pas moins d’agrément. Par ailleurs, le meuble marqueté se trouve, à partir des années 1760, en rivalité avec un élément nouveau, le meuble d’acajou massif ou plaqué, dont l’Angleterre avait donné les prototypes vers 1725 et dont Mme de Pompadour, dès 1753, faisait exécuter six commodes pour son château de Crécy, par Athanase Fermet († apr. 1774). Venu de haut, l’exemple fut rapidement suivi. Les plus grands maîtres, tels Martin Carlin (v. 1730-1785), Weisweiler, Riesener, exécuteront des meubles d’acajou nu, dont une mouluration discrète fera le seul ornement.

La forme du siège de l’époque de Louis XVI reflète naturellement l’évolution générale du style. Au départ, elle est dépouillée, comme l’était celle des sièges de la fin de l’ère précédente. Mais bientôt les formes droites paraissent trop sévères ; les praticiens les animent d’une ornementation : tiges enrubannées, entrelacs, piastres — qui sont des disques troués se recouvrant en partie l’un l’autre —, grecques ou postes, tout le répertoire gréco-romain. Un type de siège long apparaît, la turquoise, aux deux chevets égaux, parfois complétés par un dossier longitudinal amovible. Il reproduit le lit « à la turque », variante du lit « à la polonaise », qui se plaçait non plus « de bout », le chevet au mur, mais « de travers », son grand axe parallèle au mur. Pour la Cour et pour la clientèle élégante, les maîtres menuisiers, Louis Delanois (1731-1792), Georges Jacob*, Jean-Baptiste Claude Séné (1748-1803) ont multiplié les versions ; les spécimens qu’ils exécutent pour la ville sont d’un goût infiniment plus sûr que les ouvrages commandés par l’administration royale, surchargés d’ornements.

À la fin du règne de Louis XVI, le style « à la grecque » dérivé du gréco-romain pompéien, amène et souriant, se démode. Il paraît futile aux esthéticiens nourris de Plutarque : les instigateurs du retour à l’antique sont dépassés par leurs disciples. En 1785, Louis David* peint ses Horaces, dans un atelier qu’il fait meubler par Georges Jacob de chaises dessinées d’après les peintures antiques. À partir de 1785, Claude Nicolas Ledoux (v. visionnaires [architectes]) édifie les pavillons des Barrières de Paris, ensemble qui est plus un manifeste spirituel qu’un organisme conçu pour l’utilité. Le goût tourne au pathétique et au grandiose : l’Académie s’en étonne et en blâme le « gigantesque ». Le décor intérieur civil adopte une manière nouvelle, aux amples surfaces monochromes sur lesquelles tranchent une frise et des médaillons simulant des camées. Le répertoire décoratif délaisse les grotteschi de Jean-Siméon Rousseau de La Rothière (1747 - apr. 1822), auteur des boudoirs « turcs » de Marie-Antoinette à Versailles et à Fontainebleau, comme les rinceaux de Gilles Paul Cauvet (1731-1788) et de Henri Sallembier (v. 1753-1820) pour des éléments nouveaux : glaives romains croisés sous un bouclier, palmettes, chimères, sphinges ailées grecques et sphinx aptères égyptiens, griffons orientaux remis en vogue par l’expédition d’Égypte, figures engainées à la manière des momies. C’est là le style « étrusque », nommé depuis « Directoire ». Il s’élabore dans l’atelier des frères Jacob*, fils de Georges, de 1796 à 1803, produisant des versions ingénieuses d’une formule qui, se codifiant sous l’autorité du survivant des deux frères, Jacob-Desmalter, deviendra le style Empire*.

G. J.

➙ Classicisme [neo-classicisme].

 E. Dacier, le Style Louis XVI (Larousse, 1939). / G. Janneau, l’Époque Louis XVI (P. U. F., 1964). / P. Siguret, le Style Louis XVI (S. F. L., 1965).

Louis XVII

Deuxième fils de Louis XVI et de Marie-Antoinette (Versailles 1785 - Paris 1795).



Sa vie

Louis-Charles, duc de Normandie, devint dauphin après la mort de son frère aîné, le 4 juin 1789. À la chute de la monarchie, il suivit ses parents dans la prison du Temple (12 août 1792). D’abord installé avec les siens dans la petite tour de la forteresse, il alla retrouver son père, en octobre suivant, au second étage du donjon, le troisième étant réservé à sa mère, à sa tante et à sa sœur Marie-Thérèse. Lors du procès du roi, on lui fit rejoindre celles-ci : il ne revit son père que le 20 janvier. Le 1er juillet suivant, le Comité de salut public décida de confier son éducation à un bon sans-culotte, le savetier Simon. Celui-ci et sa femme s’installèrent avec l’enfant (devenu pour les monarchistes, depuis la mort de Louis XVI le 21 janvier, le « roi Louis XVII ») au second étage de la tour, dans l’ex-chambre du roi. Contrairement à ce qu’affirmèrent plus tard certains royalistes, le rude « précepteur » du petit prince n’était pas un méchant homme : il fit ce qu’il put pour soigner son pupille.