Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
L

Louis XVI (suite)

Le 5 mai, les États généraux s’ouvraient. Le règne de Louis XVI allait s’achever, celui du peuple souverain commençait. Devenu monarque constitutionnel, le roi s’efforcera, par l’application du veto, de freiner le mouvement révolutionnaire. Prisonnier de sa famille et surtout de celle de Marie-Antoinette, il mettra finalement son espoir dans les émigrés (fuite à Varennes, juin 1791) et dans les Autrichiens (1792) ; cette « politique du pire » provoquera sa chute (10 août 1792), prélude à sa condamnation et à son exécution (21 janvier 1793). [V. Révolution française]

J.-P. B.

➙ Bourbon / Colonne / Constituante (Assemblée nationale) / Convention nationale / Législative (Assemblée) / Louis XV / Marie-Antoinette / Necker / Révolution française / Turgot / Vergennes.

 E. Faure, la Disgrâce de Turgot, 12 mai 1776 (Gallimard, 1961). / A. Soboul, la Civilisation et la révolution française, t. I : la Crise de l’Ancien Régime (Arthaud, 1970) ; le Procès de Louis XVI (Gallimard, coll. « Archives », 1973). / J.-P. Bertaud, les Origines de la Révolution française (P. U. F., 1971). / F. Hincker, les Français devant l’impôt sous l’Ancien Régime (Flammarion, 1971). / G. Chaussinand-Nogaret, Gens de finances au xviiie siècle (Bordas, 1972). / P. Girault de Coursac, l’Éducation d’un roi : Louis XVI (Gallimard, 1972). / C. Manceron, les Hommes de la liberté, t. I : les Vingt Ans du roi, 1774-1778 (Laffont, 1972). / M. Vovelle, la Chute de la monarchie (Éd. du Seuil, 1972).

Louis XVI et Directoire (styles)

Pratiquement, le style « Louis XVI » est entièrement formé sous Louis XV, dès les années 1760.


En architecture, il s’exprime dans l’harmonie classique des ouvrages de Jacques Ange Gabriel* (Petit Trianon, 1762-1764) ; en matière de décor, il démarque les modèles gréco-romains découverts dans les ruines d’Herculanum et dans celles de Pompei, dont le roi des Deux-Siciles autorisa l’exploration archéologique en 1748. Artistes et savants y coururent. Dès 1749, le futur marquis de Marigny visitait le champ de fouilles, que décrira son guide, le graveur Charles Nicolas Cochin le Fils (1715-1790), relatant le voyage en Italie destiné à préparer son disciple à la surintendance des bâtiments, qu’on le destinait à remplir. À Paris, vers 1760, le diplomate amateur d’art Lalive de Jully faisait aménager une aile de son hôtel en musée pour y présenter au public ses collections d’antiques. La mode s’en empara : le style « à la grecque » régna partout, fût-ce à contresens. « Tout se fait aujourd’hui à la grecque », écrit le baron Grimm en 1763. Aux formes à dominance courbe du style rocaille*, dénoncé par le critique influent qu’est C. N. Cochin, se substituent les plans droits. Cette révolution entraîne l’effacement des modèles de meubles essentiellement liés au style Louis XV*, notamment de la charmante toilette « en forme de cœur ». Les autres se transfigurent : le secrétaire à dessus brisé devient la « table à gradin », qui, elle-même, remplaçant à la fin du siècle son modeste serre-papiers par un petit corps d’armoire, prendra nom de bonheur-du-jour. Le style décoratif se modifie dans une optique nouvelle. Sans doute, la conversion n’est-elle ni brutale ni totale ; et, jusqu’à la fin de l’Ancien Régime, certains ébénistes exécuteront, pour une clientèle fidèle aux goûts d’antan, des meubles de style rocaille, voire, sous Louis XVI, des ouvrages marquetés d’écaillé et de cuivre à l’imitation de Boulle*.

Le décor des boiseries murales de la seconde moitié du siècle se réduit à des baguettes enrubannées circonscrivant des panneaux nus, généralement peints de tons frais : bleu pâle, lilas clair, surtout « verdeau ». Les meubles passent du curviligne au rectiligne par une remarquable transition, dont les commodes exécutées dans la décennie 1765-1775 offrent la formule : leur caisson, plan à toutes faces, est porté par un piétement galbé, dont la grâce fait contraste avec la simplicité du meuble. Après 1775, l’esprit de doctrine s’affirme : des pieds en gaine à section carrée, ou en tronc de cône effilé renversé remplacent les supports galbés, et les commodes prennent leur figure définitive. Les autres meubles se réforment à son exemple. La chiffonnière, la toilette, le bureau de dame subissent la loi des droites. Le secrétaire lui-même change de forme. En 1760, Jean François Œben* élabore pour le roi un modèle nouveau, à volet mobile fait de lattes parallèles collées sur une toile forte ; la mise au point du mécanisme prit neuf années d’essais et ce fut, Œben étant mort en 1763, son auxiliaire et successeur Jean-Henri Riesener* qui termina ce chef-d’œuvre, aujourd’hui conservé à Versailles (v. Louis XV [styles Régence et]). Le système était fragile ; il fera place dès 1770 au secrétaire « à panse », à volet rigide semi-cylindrique.

L’adoption d’un style à prépondérance géométrique n’excluait pas les inventions. On voit apparaître dans les années 1775 la commode « circulaire », aujourd’hui dite « en demi-lune », la table « à la Tronchin » aux plateaux exhaustibles, et pareillement tout un mobilier créé pour la salle à manger, laquelle n’apparaît dans les appartements, avec son affectation limitative, qu’à la fin du xviiie s. Ce mobilier comporte une commode basse, longue, aux extrémités cintrées, fermant à portes : c’est la « commode aux coins arrondis » des inventaires. Très tôt, les deux encoignures perdent leurs vantaux, et présentent leurs tablettes revêtues d’une feuille de marbre : c’est la « commode à l’anglaise ». En même temps, la commode circulaire se donne une variante destinée à la salle à manger, la « commode desserte » formée d’un étagement de tablettes et d’un tiroir. Claude Charles Saunier (1735-1807) a laissé d’admirables spécimens de ces meubles, qu’il a traités avec prédilection. L’ingéniosité des maîtres ébénistes n’est en rien freinée par la sévérité des formes droites. Ils inventent les « tables à fleurs », ou jardinières ; les « tables à rafraîchir », à caissons doublés d’étain qu’on garnissait de glaçons pour y frapper les vins ; les tables à ouvrage, précieux petits meubles aux formes très diverses, depuis la table barlongue à plateau d’entrejambes exécutée pour la reine par Adam Weisweiler († apr. 1809) jusqu’aux tables rondes à plusieurs plateaux recueillies par la Wallace Collection.