Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Lorraine (suite)

Le plateau lorrain gréseux

Par son épaisseur et son faible pendage, le grès contribue à former une des régions les plus originales de la Lorraine. Le plateau lorrain gréseux constitue la Lorraine orientale, celle qui fait transition avec la basse Alsace, le Palatinat et la Sarre. Au sud, il s’étend jusqu’au massif de la Vôge. Le plateau est entaillé par des vallées étroites, telle celle de la Zorn, qu’emprunte la voie ferrée Metz (Paris)-Strasbourg. Dans les hautes Vosges, le grès monte jusqu’à 1 000 m. L’allure de montagne, cependant, vient beaucoup plus de l’épais manteau forestier que du relief. Moselle, Meurthe, Moselotte, Vezouze, Vologne entaillent profondément le plateau, déterminant des paysages pittoresques. Les sols sont pauvres à l’état naturel, mais leur structure granulométrique facilite l’utilisation des engrais synthétiques et permet de corriger leur acidité. Les alluvions des vallées sont plus fertiles, mais souvent un drainage s’impose. Largement ouverte aux vents d’ouest, la région est fortement arrosée : plus de 1 000 mm sur les versants les plus exposés. La Lorraine gréseuse, qui fait partie des Vosges gréseuses, est de ce fait un véritable château d’eau et est de plus en plus sollicitée pour le ravitaillement en eau des grandes villes et des concentrations industrielles.

À la Lorraine gréseuse on peut joindre, au nord, la région du Warndt, où le grès couvre les couches houillères. La semi-boutonnière est cernée par une cuesta présentant de nombreux replats cultivés. Sapins et épicéas couvrent une partie du grès et donnent à la région minière un aspect plus gai.

La verrerie, en utilisant les produits locaux (sables, bois, eau), a prospéré à partir du xvie s., mais surtout au xviiie. Le travail du cristal a rendu célèbre les localités de Baccarat, de Lemberg, de Saint-Louis-lès-Bitche, de Vallerysthal, de Meisenthal. Certaines cristalleries ont connu des difficultés et ont dû cesser leurs activités. L’agriculture s’est développée jadis au détriment de la forêt. Fréquemment, les finages des villages rappellent la clairière initiale. Mais la forêt garde une grande extension : régions de Bitche, de Dabo, de Badonviller, de Raon-l’Étape. Dans maint village, la population vit plus des revenus du bûcheronnage que de l’agriculture. Aujourd’hui, le tourisme apporte des revenus non négligeables.


Le plateau oriental et le pays des étangs

Vers l’ouest, les roches gréseuses sont relayées par les calcaires coquilliers, qui dessinent une zone longitudinale. Leur dureté est à peine inférieure à celle des grès, si bien que la forme de plateaux accidentés de vallées encaissées prédomine. Les sols bruns sont plus riches que ceux des grès voisins, mais leur épaisseur n’est pas toujours considérable. L’agriculture reposait autrefois sur une association cultures-élevage. Aujourd’hui, c’est ce dernier qui assure les revenus les plus importants.

Beaucoup plus original est le pays des étangs, plus à l’ouest. Il est surtout développé dans le département de la Moselle, entre Sarrebourg et Dieuze. Marnes et argiles du Keuper offrent une faible résistance à l’érosion. Les pentes sont plus douces, et les paysages de collines dominent. Les cours d’eau se traînent paresseusement, et, en période de pluie, les vallées, au fond très large, restent longtemps inondées. La plus typique est la vallée de la Seille Lorraine. De nombreux étangs se sont formés dans les parties les plus basses. Certains ont plusieurs centaines d’hectares de surface : étangs de Mittersheim, du Stock, de Gondrexange. Ce dernier voit passer le canal de la Marne au Rhin, qu’il alimente en eau. Mais beaucoup d’étangs ont été aménagés au Moyen Âge afin de développer la pisciculture. Périodiquement asséchés, on y cultivait alors les céréales. Devant le développement du tourisme, cette pratique disparaît. Sur les sols argileux, il fallait, avant l’utilisation du tracteur, des attelages de quatre chevaux. Les conditions physiques et historiques favorisaient la grande propriété. Les grandes fermes dispersées sont nombreuses un peu partout. Les couches du Trias sous-jacent contiennent du carbonate de sodium, exploité depuis la préhistoire. Cette matière a donné son nom au cours d’eau (Seille) et à la région (Saulnois). Une partie de l’Europe fut ravitaillée en sel lorrain jusqu’aux terribles ravages de la guerre de Trente Ans, qui vit la destruction de la quasi-totalité des villages. Le xviiie s. fut avant tout une période de restauration. L’exploitation des salines se modernisa ensuite constamment, mais les hostilités de la Première Guerre mondiale se déroulèrent au milieu de la région salifère.


La Lorraine des Côtes

C’est sans doute la région la moins étendue, mais aussi celle qui a joué historiquement le plus grand rôle, avec la dépression liasique. À l’est, il s’agit des Côtes de Moselle (ou Côte de Moselle), nettement marquées dans la partie nord. Les marnes du Lias supérieur sont couronnées par les calcaires durs du Bajocien inférieur. Ces derniers forment une très belle corniche. Aux environs de Metz, la Côte a un commandement de 150 m. Sur la rive droite, elle est précédée par une « avant-côte » formée de calcaires Basiques. Elle est développée entre Metz et Pont-à-Mousson, où localement elle atteint l’altitude de 400 m ; il faut emprunter de véritables cols (col d’Arry) pour passer de la vallée de la Moselle à celle de la Seille. La côte principale est festonnée par toute une série de vallons obséquents qui permettent le passage vers les plateaux occidentaux. Dans la région de Metz, deux de ces vallons ont toujours eu une grande valeur stratégique : vallon de Rozérieulles, emprunté par la R. N. 3, et vallée du Rupt de Mad, plus au sud, qui voit passer la R. N. 52 bis ainsi que la ligne ferrée Paris-Metz-Francfort. À une époque plus récente, l’intérêt de la Côte a été accru par l’exploitation du minerai de fer localisé au contact de l’Aalénien et du Bajocien. Le versant de la cuesta, du fait du mélange des roches provenant de la gélifraction et de la solifluction très actives, a été encore au xixe s. un ensemble de terroirs riches où prospérait la vigne.