Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
L

Londres (suite)

Le Grand Londres actuel (Greater London), tel qu’il a été délimité par une loi de 1963, déborde largement les sites initiaux et couvre 1 604 km2. Il a vaguement la forme d’un cercle de 25 km de rayon qui aurait Charing Cross pour centre. Il est donc beaucoup plus étendu que le district de Paris, bien que sa population soit nettement inférieure à la population de celui-ci. L’aire métropolitaine, qui correspond approximativement à l’aire de recrutement des travailleurs de Londres, forme un cercle d’une soixantaine de kilomètres de rayon.

C. M.


L’histoire de la ville


Origines antiques

De nombreux vestiges d’origine romaine (mur d’enceinte, sanctuaire de Mithra...) révèlent une activité commerciale importante, dont l’intensité s’accroît après la conquête de la Bretagne par Claude en 43 apr. J.-C. Occupée par Aulus Plautius, dénommée dès lors Londinium (forme latinisée d’un obscur toponyme celtique), la ville se développe sur la future Cornhill, au débouché septentrional d’un pont situé dans l’axe de l’actuelle Gracechurch Street, un peu en aval du pont de Londres sur la Tamise.

Port fluvial et maritime à la fois, premier carrefour routier de la province romaine, Londinium devient un centre très actif du trafic international dès le règne de Néron. La ville est évacuée par le gouverneur C. Suetonius Paulinus lors de la révolte de Boudicca, et est incendiée en 61 apr. J.-C. par les Bretons. Dépeuplée par la fuite ou par l’assassinat, incendiée de nouveau vers 120 apr. J.-C., elle renaît rapidement à la vie sous la protection du Cripplegate Fort, incorporé à la fin du iie s. apr. J.-C. à un premier mur d’enceinte, qui marque en fait les limites de la « City » et à l’intérieur duquel sont édifiés une basilique longue de 500 pieds, construite à la limite septentrionale du forum, un temple de Mithra (début iie s. apr. J.-C.) et deux thermes. Elle est occupée par l’« archipirate » Carausius de 286 à 293, puis par son préfet du prétoire Allectus de 295 à 296 ; elle est sauvée de la destruction par Constance Chlore, ainsi qu’en témoigne le médaillon d’or trouvé à Beaurains, près d’Arras en 1922, sur lequel, personnifiée par une femme, elle accueille le César vainqueur. Elle est renforcée de bastions construits avec les débris de tombes ou de monuments de pierre antérieurs, ce qui témoigne de l’insécurité du ive s.


La ville anglo-saxonne

Évacuée en 407 par les légions romaines sous la pression anglo-saxonne, sans doute en grande partie désertée au ve et au vie s., la ville devient en 604 le siège d’un évéché pourvu d’une cathédrale : Saint Paul. Mais, en 516, à la mort du roi du Kent, Aethelberht, son premier titulaire, Mellitus († 624), est chassé par la réaction païenne. En fait, évincée par Canterbury comme métropole religieuse de l’Angleterre, la ville se développe d’abord en tant que centre commercial grâce à la convergence des voies romaines qui y font affluer les négociants, ainsi qu’en portent témoignage l’œuvre de Bède le Vénérable ou les vestiges de poterie d’Ipswich et de la région rhénane découverts en 1962. Base de pillage danoise à partir de 871-872, elle est réoccupée en 886 par le roi anglo-saxon Alfred le Grand, qui en renforce les défenses. Dépourvue de toute autonomie municipale, puisqu’elle est alors administrée par un fonctionnaire royal, le bailli du port, divisée en « sokes », juridictions privées accordées par le roi à des ecclésiastiques ou à des laïques de haut rang, la ville où siège fréquemment le Witan saxon, n’en anime pas moins la résistance à l’invasion danoise, avant d’admettre à la citoyenneté urbaine les marchands de cette nationalité à la suite de l’accession au trône de Knud en 1017. Elle attire également les Colonais et autres négociants allemands, et elle redevient l’un des principaux centres du commerce de l’Europe du Nord-Ouest au xie s.


Autonomie municipale et expansion économique (xie-xve s.)

Londres, qui échappe aux conséquences néfastes de la conquête normande grâce à une prompte soumission au vainqueur en 1066, s’accroît en superficie et en population. Bien défendue par la Tour blanche, édifiée sur l’ordre de Guillaume* le Conquérant, qui fait de ce bâtiment tout à la fois un palais royal, une forteresse et une prison, la ville apparaît dès lors comme la véritable capitale politique et économique du royaume.

Ses notables, les « grands barons de la cité », contraignent Henri Ier à leur abandonner la ferme de celle-ci et du comté du Middlesex, et à les autoriser à élire eux-mêmes leur shérif. Participant à l’élection d’Étienne Ier en 1135, s’associant sous serment pour éliminer l’impératrice Mathilde en 1141, aidant Jean sans Terre (1167-1216) à se substituer au chancelier William Longchamp († 1197) avec le titre de « summus rector totius regni » en l’absence de Richard Cœur de Lion en 1191, la bourgeoisie londonienne obtient en contrepartie, la même année, l’autorisation de se constituer en commune. Cette mesure est abolie par Richard à son retour de Palestine ; la ville reste pourtant administrée par un mayor élu, mais assermenté à la Couronne, et par vingt-quatre (un par quartier) aldermen, qui sont choisis obligatoirement parmi les marchands de la ville en vertu de la charte édictée en 1191 et confirmée en 1215 et en 1221, et qui sont élus à vie à partir de 1249. Consultée obligatoirement par le roi en cas de levées de nouvelles aides en vertu des articles 12 et 14 de la Grande Charte de 1215 (supprimés par la suite), elle accueille favorablement le prince royal Louis (de France) en 1216. Une telle attitude explique peut-être pourquoi la Couronne suspend la « commune » à dix reprises entre 1239 et 1257.

En avril 1258, Londres est le siège du Parlement qui aboutit, avec la participation de son évêque, à l’élaboration des « Provisions d’Oxford », ville où cette assemblée a été transférée ; la ville refuse la « Mise d’Amiens », qui annule cet acte (janv. 1264). À l’instigation des gens de métier, un coup de main de ses habitants déclenche la guerre civile, qui permet à Simon de Montfort (v. 1208-1265) d’y réunir vers le 24 juin 1264 l’assemblée qui met en tutelle Henri III. Mais, après son échec, le gouvernement de la city est confié à un gardien (warden) de 1285 à 1298.