Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
L

littoral (suite)

• Modelé glaciaire ennoyé. Les régions qui furent recouvertes par les grands inlandsis pléistocènes ont pu conserver une part notable des reliefs originels en raison de la dureté des roches et de l’évacuation récente des glaces.
a) Sur les côtes élevées, un tel héritage est manifestement lié au caractère montagneux de l’arrière-pays, taillé dans les roches dures des vieux boucliers arctiques (fig. 29). Dans le fjord, les influences marines ne progressent que difficilement : on y retrouve les formes caractéristiques des auges glaciaires avec ses versants abrupts, couronnés de vallées suspendues et d’épaulements, avec son fond très irrégulier, formé par une succession d’ombilics. Un bassin terminal très profond (plus de 1 000 m en certains fjords de Norvège) est fermé vers l’aval par un seuil rocheux ou morainique. Le remblaiement postglaciaire est très réduit en dehors des vases tapissant cette cuvette et des petits cônes deltaïques qui en ourlent les rives. La côte externe, protégée par un fourmillement d’îles et d’îlots, est entaillée en falaises élevées, protégées par un strandfladen qui, localement, peut pénétrer à l’intérieur du fjord.
b) Les côtes basses sont nées de la pénétration de la mer sur une plaine aux reliefs confus et qui paraît avoir été désertée récemment par les glaciers (fig. 30). Lorsque la sédimentation actuelle est lente et que le relèvement isostatique est sensible, le dessin de la côte présente une irrégularité croissante : l’érosion attaque aisément les accumulations morainiques tendres, modelées en falaises basses (drumlins, os, vallums), mais exhume et respecte les chicots de roche en place, convertis en une poussière d’îles et d’écueils (le skärgård) séparés par un dédale de chenaux étroits, sinueux et peu profonds. Lorsque la sédimentation parvient à prendre une certaine importance et que le relèvement isostatique demeure lent, la régularisation peut intervenir et simplifier le tracé de la côte : les roches émergentes sont localement tronquées en falaises basses, les baies fermées par des flèches, les îlots rattachés entre eux et à la côte. Peu à peu, l’empreinte glaciaire s’efface devant l’édification d’une plaine maritime classique.

L’aménagement du littoral

Lieu privilégié d’échanges vers lequel convergent de plus en plus les activités humaines, le littoral est :

• un domaine de convoitises, dont les vocations multiples, à la fois économique (pêche, commerce, industries, exploitation minérale), militaire et touristique, présentent un intérêt grandissant pour l’installation humaine, collective ou individuelle ;

• une cause de conflits dus à l’interférence des diverses formes d’utilisation, entre lesquelles des rivalités ne peuvent manquer de surgir au niveau de l’appropriation du sol (entre l’État, les collectivités et les particuliers) et des intérêts (entre promoteurs immobiliers, industriels, organismes touristiques, etc.) ;

• un objet de menaces, en raison des nuisances diverses provoquées par l’amenuisement de l’espace naturel. Les constructions, les rejets de toute nature (urbains et industriels) risquent de rompre l’équilibre existant entre les éléments du milieu et de produire des modifications, lentes ou spectaculaires, irréversibles parfois, dangereuses souvent ;

• une zone d’aménagement : agressé, voire mutilé, parfois de façon irrémédiable, le littoral est un paysage géographique qui, tôt ou tard, risque de perdre tout ou partie de sa valeur et de sa beauté. Dégradation des sites, pollution des plages et des eaux, pression des besoins et des intérêts sont autant de mobiles qui ont contraint les autorités publiques de nombreux pays à intervenir afin de réglementer l’occupation littorale, de freiner les appétits spéculatifs et d’encourager l’établissement de plans, généraux ou régionaux, d’aménagement du littoral.

J.-R. V.

Le littoral et le droit

Au regard de la juridiction, deux domaines sont distingués.

• Au-dessous du zéro hydrographique, c’est la « mer », où l’on sépare :
a) la « mer libre », où sol et sous-sol peuvent être considérés comme propriétés de l’État en certains pays (en France, jusqu’à l’isobathe de 200 m d’après la loi du 30 décembre 1968) ;
b) la « mer territoriale », zone aquatique intermédiaire entre le littoral et la haute mer, et sur laquelle s’exerce la souveraineté de l’État riverain. Sa largeur est des plus variables : de 3 à 200 milles marins (France : 12 milles, par décision en date du 24 décembre 1971 ; Brésil : 200 milles). Par dérogation négociée, un État peut accorder à des ressortissants étrangers le droit de pêcher dans ses eaux territoriales.

• Au-dessus du zéro, ce sont les « bords de mer », qui comprennent :
a) le « rivage », zone correspondant au battement de la marée et appartenant au domaine public ;
b) les « lais et relais futurs de la mer », dépôts abandonnés par les eaux : en France, ils sont progressivement incorporés au domaine public depuis la loi du 28 novembre 1963.

Dans la partie située au-dessus de ces atterrissements, l’État peut, créer, pour cause d’utilité publique, des « réserves éventuelles » dans lesquelles aucune construction ne peut être faite sans autorisation. Il ne s’agit pas d’une appropriation par l’État, mais d’une décision à caractère conservatoire, destinée à veiller à la protection de certains sites menacés ou en cours d’aménagement. Le domaine maritime de l’État peut faire l’objet de concessions (à caractère précaire et révocable) à des communes littorales, qui peuvent les rétrocéder à des particuliers (par exemple des plagistes).

J.-R. V.

Petit lexique du littoral

aber, syn. de ria.

abrasion (plate-forme d’), platier à surface plane (fig. 12).

anse, petite baie à contours arrondis.

arrachement (courant d’), mouvement de retour vers le large des eaux apportées par deux dérives littorales convergentes (fig. 10).

arrière-côte, arrière-plage, syn. de supralittoral (étage).

atoll, récif corallien annulaire sans terre centrale (fig. 24).

avant-côte, avant-plage, syn. de infralittoral (étage).

baie, petit golfe.

barre, haut-fond édifié devant une embouchure (fig. 18) ; déferlement en gros rouleaux.

basse, bassure, batture, haut-fond battu par la mer.

bouchon vaseux, sédiments pélitiques déplacés en suspension dans une embouchure.

brisants, formation d’écume au sommet des houles déferlantes.

calanque, ria courte et étroite, surtout en calcaire (fig. 26).

chenal, passage allongé entre deux plans d’eau (fig. 17).

clapotis, mouvement produit par la réflexion de la houle frappant perpendiculairement un rivage.

coin salé, enfoncement des eaux marines sous les eaux douces ou saumâtres d’une embouchure (fig. 4).

cordon littoral, accumulation à la partie supérieure de l’estran (fig. 13, 16, 28).

crêtes prélittorales, rides parallèles et coupées de chenaux, occupant le bas de l’estran (fig. 13).

croissant de plage, accumulation en forme de corne, dont les pointes s’effilent vers le bas de l’estran (fig. 13).

déferlement, mouvement de bascule affectant le sommet d’une crête de houle atteignant le littoral (fig. 8).

delta, embouchure formée de plusieurs bras (fig. 16, 18).

dérive littorale, transfert d’eau et de sédiment le long du littoral (fig. 5).

diffraction, mouvement de rotation de la houle autour d’un obstacle (fig. 7).

écueil, tête de roche à fleur d’eau.

estran, syn. de mésolittoral (étage).

estuaire, embouchure fluviale envahie par la mer et remontée par la marée (fig. 17).

étier, chenal de marée.

eustatisme, variation du niveau de la mer provoquée par des déformations du sol ou des changements climatiques.

falaise, escarpement plus ou moins abrupt dû à l’action ou à la présence de la mer (fig. 11). Une falaise est dite morte (fig. 22) lorsqu’elle se trouve en retrait par rapport au trait de côte.

fjord, vallée glaciaire envahie par la mer (fig. 29).

flèche littorale, cordon littoral libre allongé parallèlement à la côte (fig. 15, 27).

golfe, rentrant de grandes dimensions.

goulet, resserrement à la sortie d’un plan d’eau (fig. 16).

grès de plage, concrétion de sable cimenté par du calcaire.

grève, plage construite à l’aide de matériaux grossiers.

herbier, partie de l’étage infralittoral colonisée par des phanérogames marines.

herbu, syn. de schorre.

houle gaufrée, mouvement produit par la réflexion de la houle frappant obliquement un rivage.

infralittoral (étage), partie du littoral submergée en permanence (fig. 1).

intertidal (étage), syn. de mésolittoral (étage).

isthme, langue de terre rattachant une île au continent.

jet de rive, mouvement montant de l’eau en avant du front de déferlement (fig. 9).

lagon, lagune à l’intérieur d’un atoll (fig. 24).

lagune, étendue d’eau marine isolée par une construction littorale, détritique ou biologique (fig. 15, 28).

laisse (de basse mer, de pleine mer, de tempête), ligne jalonnée de débris abandonnés par la mer.

lido, cordon littoral en position avancée devant une côte plate (fig. 28).

liman, lagune formée par la fermeture d’un estuaire de plateau (fig. 27).

mangrove, forêt intertidale des régions tropicales.

marais maritime, vasière colmatant une baie ou un estuaire ; plus particulièrement, partie qui n’est plus inondée par la mer.

marée dynamique, onde d’oscillation affectant l’eau continentale refoulée par l’eau marine d’un estuaire.

marée de salinité, onde d’oscillation affectant les eaux marines remontant un estuaire.

marnage, dénivellation entre la pleine mer et la basse mer.

mascaret, surélévation du plan d’eau d’un estuaire au cours du flot.

mésolittoral (étage), partie du littoral couverte et découverte par la mer (fig. 1).

musoir, rivage opposé à un poulier.

orthogonale de houle, ligne tracée perpendiculairement aux crêtes de houles (fig. 5).

passe, ouverture dans un cordon littoral (fig. 15, 28).

pied de glace, glace de rive formée en bas d’une falaise.

platier, plature, estran rocheux doucement incliné et développé sur l’emplacement de la falaise au fur et à mesure de son recul (fig. 12).

poulier, flèche allongée dans ou à l’entrée d’une baie ou d’un estuaire (fig. 15).

pré-salé, syn. de schorre.

presqu’île, saillant littoral uni à la terre par un isthme.

récif, suite d’écueils rocheux ou madréporiques (fig. 11, 24).

réflexion de la houle, mouvement de retour contre un obstacle (fig. 7).

réfraction de la houle, déviation de la houle, dont la crête tend à se placer parallèlement à la côte (fig. 7).

régularisation littorale, simplification du dessin de la côte.

retrait, mouvement descendant de l’eau apportée par le jet de rive (fig. 9).

ria, vallée profonde creusée dans les terrains durs et envahie par la mer (fig. 25).

rivage, syn. de mésolittoral (étage) [fig. 31].

schorre, partie d’un wadden située au-dessus des hautes mers moyennes et dont la vase a été convertie en sol couvert par une végétation halophile dense (fig. 14, 17).

skärgård, îlots et récifs formant barrière en avant d’une côte englacée au Pléistocène.

slikke, partie basse d’un wadden, recouverte à chaque marée.

supralittoral (étage), partie du littoral située au-dessus du trait de côte (fig. 1).

taffoni, cavité creusée dans les roches massives.

tangue, sédiment pélitique limoneux et calcaire.

terrasse littorale, banquette de matériaux façonnés et accumulés par la mer.

tombolo, flèche simple, double ou triple formant isthme (fig. 15).

trait de côte, ligne correspondant au niveau des plus hautes mers (fig. 1, 13).

valleuse, vallon suspendu au sommet d’une falaise.

wadden, estran vaseux (fig. 14, 16).

zéro hydrographique, plan de référence à partir duquel sont évaluées les profondeurs marines. Correspond au niveau des plus basses mers, au niveau moyen des basses mers ou au niveau moyen de la mer, selon les États et les mers. Distinct du zéro géographique (fig. 1, 13).

J.-R. V.

J.-R. V.

➙ Érosion / Hydrologie / Mer / Onde / Rivage / Tourisme.