Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
L

littoral (suite)

Les types littoraux

Les littoraux actuels datent de la dernière remontée eustatique, vieille de quelques millénaires, et, depuis lors, sont livrés à l’action de l’érosion qui détruit les saillants, et à celle de l’accumulation, qui comble les rentrants. Les falaises et les plages tendent à adopter un tracé simple : c’est la régularisation littorale, qui est encore loin de son achèvement. Aussi une classification des littoraux doit-elle tenir compte de la structure et, plus encore, de l’origine primitive des reliefs ennoyés à l’issue de multiples variations du climat et du niveau marin.


Les littoraux structuraux

L’orientation originelle des rivages est conditionnée par les directions tectoniques de l’arrière-pays et la nature des terrains. Influence si puissante qu’elle imposa et impose encore sa loi aux processus continentaux et marins.

• En structure subtabulaire, les alternances de dureté des roches se traduisent par une succession de caps taillés en falaises (la corniche sommitale peut être un front de cuesta) et de baies (correspondant aux dépressions monoclinales) plus ou moins colmatées par des vasières (fig. 19).

• En structure faillée (fig. 20), nombre de littoraux au dessin géométrique, composés de segments rectilignes, dérivent de dislocations qui ont pu rejouer jusqu’à des périodes très récentes sous l’effet des surcharges et des décharges liées aux oscillations eustatiques et, plus encore, glaciaires. La faille (ou la flexure) responsable peut se disposer longitudinalement (côte sud de la Bretagne) ou transversalement (côte ouest de la Bretagne) par rapport à l’orientation d’ensemble de la côte. L’influence combinée de ces dispositions fait apparaître un littoral dentelé ou à redans. Beaucoup de fjords et de rias sont établis sur de tels réseaux de cassures.

• En structure plissée, l’asservissement aux conditions tectoniques est encore plus manifeste. La côte, fortement découpée, est une suite de golfes et de bras de mer allongés dans les vals (synclinaux), de promontoires et d’îles déchiquetées correspondant aux monts (anticlinaux). Lorsque le littoral s’oriente parallèlement aux axes structuraux (fig. 21), il appartient au type dalmate : les bras de mer, réunis par des chenaux formés par les cluses ennoyées, sont de plus en plus colmatés à mesure qu’on se rapproche de la côte ; les îles, allongées, sont des monts dont les flancs sont sculptés en falaises. Si le littoral est perpendiculaire à la structure (fig. 22), les baies (ou synclinaux) sont en voie de comblement (divergence des houles) par création de plages adossées ou de flèches enfermant des lagunes ; les pointes à falaises sont précédées d’îlots et de hauts-fonds à écueils violemment attaqués par les houles convergentes (exemples fréquents dans les régions de reliefs appalachiens, comme le sud de l’Irlande ou l’ouest de la Bretagne).

• En structure volcanique (fig. 23), le littoral est multilobé et protégé par un chapelet d’îles alignées sur une faille et souvent réunies par le cordon des dépôts récents. Le détail du tracé et des formes est en relation avec l’intensité du volcanisme et la résistance des terrains : falaises dans les champs de coulées basaltiques, baies dans les cinérites ou dans les portions de cratères affectées par les ravinements ou les explosions (par exemple l’île de Santorin).


Les littoraux non structuraux

Ils peuvent être classés selon l’origine du relief terrestre submergé. Les processus actuels interviennent de façon plus ou moins sensible selon l’énergie des formes initiales et le volume des apports continentaux.

• Modelé littoral ennoyé. L’exemple classique est fourni par les récifs coralliens (fig. 24), dont la position par rapport à la côte originelle (continentale ou insulaire) varie selon l’importance de la subsidence qui a affecté son soubassement.
a) Les récifs frangeants sont appuyés aux saillants de la côte qu’ils protègent par un cordon rocheux presque continu.
b) Les récifs-barrières, situés à quelque distance de la côte, abritent une ceinture d’eau calme, rectiligne ou circulaire, à laquelle on accède par des brèches creusées par les courants.
c) Les récifs annulaires, ou atolls, entourent un lagon lorsque l’île est complètement submergée.
d) Enfin, le stade ultime fait apparaître des récifs entièrement recouverts par la mer.

• Modelé fluvial ennoyé.
a) Les rias résultent de la submersion de vallées jeunes et profondes, creusées dans les roches résistantes (par exemple les massifs anciens). Trois types sont à distinguer selon l’altitude de l’arrière-pays et l’état d’avancement du comblement estuarien (fig. 25) :
— les rias de montagne (exemple : Galice) ont des versants raides qui s’écartent régulièrement vers une embouchure encadrée de falaises ;
— les rias de plateau (par exemple le nord de la Bretagne) sont étroites et sinueuses, privées de tributaires importants : le colmatage est restreint à quelques recoins occupés par des vasières ; les falaises sont peu élevées ;
— les rias de plaine (par exemple : sud de la Bretagne) sont plus larges et mieux ramifiées, chaque affluent formant un diverticule ; le remblaiement gagne rapidement en amont du seuil d’entrée, souvent rétréci ; les falaises sont basses, parfois entaillées dans les sédiments pléistocènes, qui ont partiellement fossilisé l’ancienne vallée.
b) En bordure des montagnes jeunes, les vallées sont devenues des calanques étroites, courtes et très ramifiées (fig. 26). Sur le front de mer, le matériel résistant (calcaire le plus souvent) est sculpté en falaises ; l’intérieur de la calanque évolue plus lentement en l’absence d’action mécanique (falaises rares ou absentes). Le contour d’ensemble de la calanque dépend de la dissection originelle, extrême dans le cas d’un émiettement tectonique ou d’une profonde dissolution karstique (par exemple la baie d’Along).
c) Les vallées entaillées dans les bassins sédimentaires offrent de plus grandes facilités au travail marin et au comblement fluviatile (fig. 27). Ai début de l’ennoyage, le littoral conserve un tracé très irrégulier, avec des baies et des estuaires nombreux, séparés par des falaises généralement élevées. La régularisation, en entaillant des musoirs et en créant des pouliers, a isolé des baies profondes, connues sous le nom de « limans ». Le remblaiement se fait latéralement, par création de petites plaines deltaïques ; s’il est abondant, le liman comblé cède la place à un delta.
d) Dans les plaines sédimentaires basses, la tendance à l’émersion est plus accusée (fig. 28). La surabondance alluviale, qui s’explique par le voisinage d’un puissant delta, détermine la formation d’une côte remarquablement plate, qui progresse par édification de cordons successifs et parallèles clôturant des lagunes (par exemple le golfe du Mexique) : c’est la côte à lido. Certains segments du cordon ont pu être transformés en dunes. L’évolution des passes (qui subissent migration, comblement, réouverture) est en rapport avec le bilan hydrologique de la lagune et l’agressivité des houles de tempêtes.