Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
L

Le Sueur (Jean-François)

Compositeur français (Drucat 1760 - Paris 1837).


Issu d’une humble famille de paysans, Le Sueur est placé comme enfant de chœur à la maîtrise d’Abbeville, puis à celle d’Amiens jusqu’à l’âge de seize ans.

Pendant près de dix ans, sa vie est celle d’un jeune maître de chapelle se déplaçant de province en province : il occupe ainsi les postes de la cathédrale de Sées, ceux de Saint-Étienne de Dijon, de Saint-Julien du Mans et de Saint-Martin de Tours ; en 1784, il arrive à Paris maître de chapelle aux Saints-Innocents et deux ans plus tard il obtient la place vacante à Notre-Dame (1786). Il n’y restera qu’une année, le temps cependant de susciter de violentes polémiques : sa conception théâtrale et très personnelle de la musique d’église lui attire les foudres du chapitre, qui saisit la première occasion venue de le renvoyer.

Après une retraite studieuse de quelques années dans la banlieue de Paris, Le Sueur reparaît dans le monde musical parisien sous la Révolution. En 1793, il fait jouer au théâtre Feydeau son premier opéra, la Caverne (sujet tiré du Gil Blas de Lesage), son chef-d’œuvre peut-être, qui obtient un triomphe ; deux autres opéras suivent, représentés également avec succès à Feydeau, Paul et Virginie (1794), Télémaque (1796).

Inspecteur de l’enseignement dans le nouveau Conservatoire qui vient d’être créé (1795), Le Sueur doit le quitter en 1802 après une violente querelle avec le directeur de l’établissement, Bernard Sarrette ; c’est alors qu’il publie, pour se défendre, sa Lettre en réponse à Guillard (brumaire an X).

Il ne sortira de cette situation matérielle difficile qu’en 1804, lorsque Bonaparte le nomme directeur de la chapelle des Tuileries en remplacement de Giovanni Paisiello (1740-1816) ; il restera à ce poste sous l’Empire et toute la Restauration (jusqu’en 1830).

Au début de cette nouvelle période de sa vie, son succès atteint son apogée avec la représentation en 1804 des Bardes (ou Ossian) à l’Opéra (livret de Dercy) ; c’est un des plus grands triomphes de l’opéra français dans la première moitié du siècle ; un autre opéra, la Mort d’Adam, échoue en 1809 ; sa dernière production dans ce genre, Alexandre à Babylone (1815), ne connaîtra jamais les honneurs de la scène.

Pendant tout le temps qu’il exerce ses fonctions aux Tuileries, Le Sueur est considéré, avec Cherubini*, comme le maître de la musique religieuse française. On possède de lui plusieurs messes, des oratorios, des motets, une quarantaine d’œuvres en tout dont certaines sont restées inédites : musique peu savante, mais qui dénote un sens remarquable de la mélodie et de l’équilibre des masses chorales.

Le plus célèbre de ses élèves est Berlioz*, qu’il a vivement défendu dans ses débuts difficiles ; ce dernier lui en a toujours été reconnaissant, mais il est probable qu’il faut minimiser l’influence du maître sur l’élève. Berlioz adulte a reconnu lui-même les faiblesses de l’enseignement qui lui avait été dispensé.

Le Sueur a prétendu aussi être un théoricien et un historien de la musique : la seule œuvre de lui qui compte sur ce point consiste en quatre volumes qu’il a publiés en 1787 (Exposé, d’une musique une, imitative et particulière à chaque solemnité), où l’auteur développe des vues originales, notamment sur sa conception de la musique d’église.

Outre les œuvres mentionnées, on peut encore citer de lui une dizaine d’hymnes révolutionnaires, une Marche triomphale, quelques romances et œuvres diverses.

Très célèbre en son temps, ce compositeur est injustement oublié aujourd’hui : il a su se créer une manière propre, mais a eu le tort de rester systématiquement à l’écart, à partir de 1800, de l’immense révolution musicale que le romantisme allait effectuer de son temps à l’étranger et particulièrement dans les pays allemands.

J. M.

 C. Pierre, les Hymnes et Chansons de la Révolution (Impr. nat., 1904). / W. Buschkötter, J.-F. le Sueur (Halle, 1912). / F. Lamy, Jean-François Le Sueur (Fischbacher, 1912). / G. Servières, Épisodes d’histoire musicale (Fischbacher, 1914).

létal (gène)

Gène qui tue l’individu qui le porte, à moins que cette action ne soit corrigée par la présence de son allèle normal.


Le premier cas de létalité a été découvert par L. Cuénot (1905) chez la Souris jaune, porteuse du gène Ay. Ce gène est un allèle dominant du gène Agouti A. Les divers croisements entre Souris jaunes produisent toujours 67 p. 100 de Souris hétérozygotes AyA et 33 p. 100 de Souris grises ou noires homozygotes AA. Ce croisement, pour être correct et répondre aux lois de Mendel, devrait comporter, outre 25 p. 100 de grises homozygotes AA et 50 p. 100 d’hétérozygotes jaunes Ay, 25 p. 100 de Souris jaunes homozygotes AyAy, qui, croisées entre elles, donneraient toujours des Souris jaunes homozygotes AyAy, alors que le croisement entre Souris hétérozygotes engendre toujours à la fois des Souris jaunes et des Souris grises ou noires.

Quelle est la cause de cette anomalie dans la descendance, constatée par L. Cuénot ? La réponse fut apportée par W. B. Kirkham. Ayant répété les croisements entre Souris jaunes, il eut l’idée de pratiquer des dissections ; il trouva, dans 19 utérus, 131 embryons normaux et 43 en dégénérescence ; ce nombre 43 correspond presque exactement au quart du nombre total des embryons (131 + 43), ce qui signifie que 25 p. 100 des embryons ne se développaient pas. Le gène  Ay à l’état homozygote entraîne la mort ; mais, chez un hétérozygote AyA, son action est contrebalancée. Cette action nocive est imputable au gène Ay et aussi vraisemblablement au séjour dans l’utérus maternel ; l’implantation des embryons homozygotes AyAy ne se fait pas dans l’utérus. D’après G. G. Robertson (1942), de très jeunes embryons homozygotes AyAy, transplantés dans un utérus d’une Souris agouti AA, commencent de se développer, mais meurent avant la naissance.

Dominant quant à la couleur, le gène Ay est donc récessif pour la létalité.