Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
L

Leao-ning (suite)

Trois autres grands centres urbains sont localisés sur la longue façade maritime de la province. À l’ouest, Jinzhou (plus de 300 000 hab.) commande le passage, par l’étroit corridor du Liaoxi, vers la Chine du Nord. Le charbon de Fuxin, les schistes bitumineux et le coton de son arrière-pays alimentent ses trois grandes activités industrielles. À l’est, Andong (420 000 hab.), desservi par la grande centrale électrique de Shifeng (Che-fong), sur le Yalu, est le grand centre de transformation des produits forestiers du Liaodong : travail de la soie (sept usines), papeteries et, plus récemment, fibres synthétiques et aciéries. À la pointe de la péninsule, Lüshun (Liu-chouen) [Port-Arthur] et Dalian (Ta-lien) [Dairen] sont regroupés en un district urbain : Lüda (Liu-ta) [3 000 000 d’hab.]. C’est à la fois un des plus grands ports chinois et un puissant complexe industriel : constructions navales, industries mécaniques et électriques (au second rang après Shenyang), chimie et raffinage du pétrole.

P. T.

➙ Chen-yang.

Lebesgue (Henri)

Mathématicien français (Beauvais 1875 - Paris 1941).


D’origine très modeste, Henri Lebesgue fut l’un des plus éminents représentants d’une grande époque des mathématiques françaises. En 1894, il entre à l’École normale supérieure, où il est le condisciple du physicien Paul Langevin* (1872-1946) et du mathématicien Paul Montel. Agrégé de mathématiques en 1897, il exerce pendant quelques années dans des lycées de province. Mais, dès 1902, sa thèse de doctorat, révolutionnaire dans ses conceptions « intégrale-longueur-aire », le situe à l’avant-garde des mathématiciens du siècle. Pour la première fois est exposée une nouvelle théorie de l’intégration des fonctions de la variable réelle. Cette nouvelle intégrale détrône vite celle de Bernhard Riemann (1826-1866) : plus souple, plus puissante, elle étend considérablement le champ des fonctions intégrables. Pour son élaboration, Lebesgue doit introduire la notion de mesure d’un ensemble de points de la droite réelle. De cette mesure, il donne une définition descriptive, alors qu’en 1894 Émile Borel* en avait donné une définition constructive, un peu moins maniable. Curieusement, une polémique s’élève entre ces deux mathématiciens de grande classe, qui pourtant s’apprécient mutuellement. Chacun refuse à l’autre, en la circonstance, ce qui fait l’essentiel de son œuvre. Mais, aujourd’hui, il faut reconnaître que la mesure des ensembles est due à Borel, et la nouvelle intégrale à Lebesgue.

Dans l’intégrale de Riemann, pour calculer

on partage l’intervalle [ab] en intervalles disjoints [xi, xi + 1], dans chacun desquels on prend une valeur x de la variable. Si f (x) est la valeur associée de la fonction, on totalise les produits f (x) . (xi + 1 – xi), et l’on passe à la limite.

Dans l’intégrale de Lebesgue, si A et B sont les valeurs extrêmes de f (x) sur [ab], on partage l’intervalle [A, B] en intervalles disjoints [yi, yi + 1], yi < yi + 1. Si m est la mesure de l’ensemble des valeurs x pour lesquelles yi < f (x) < yi + 1, et si y est un nombre compris entre yi et yi + 1, on totalise les produits y . m, et l’on passe à la limite. Lebesgue appliquera son intégrale à l’étude des séries trigonométriques, domaine où elle révélera toute sa puissance. Cependant, certaines catégories de fonctions, intégrales au sens de Lebesgue, ne le sont pas au sens classique.

Son grand mémoire de 1905 « sur les fonctions représentables analytiquement » a été le point de départ d’importants travaux sur les ensembles analytiques, développés en particulier dans les écoles mathématiques russe et polonaise.

Appelé en 1902 à la faculté des sciences de Rennes comme maître de conférences, Lebesgue peut, d’autre part, exposer pendant deux ans ses découvertes au Collège de France, grâce à la fondation Peccot. Professeur à la faculté des sciences de Poitiers de 1906 à 1910, il est nommé maître de conférences, puis professeur, à la Sorbonne jusqu’en 1921, époque où il succède à Georges Humbert (1859-1921) au Collège de France. En 1922, il remplace Camille Jordan (1838-1922) à l’Académie des sciences. Maître de conférences, pendant de longues années, tant à l’École normale supérieure qu’à l’École normale supérieure de jeunes filles de Sèvres, il a formé des générations de professeurs. Ses recherches de mathématiques élémentaires sur la mesure des grandeurs, sur les constructions géométriques et sur les coniques, recherches où il a mis toutes les ressources de son génie au service de l’enseignement du second degré, ont eu une influence considérable sur l’évolution de la pensée mathématique.

J. I.

Le Brun (Charles)

Peintre français (Paris 1619 - id. 1690).


Malgré sa célébrité et l’éminence de son rang dans l’école française du xviie s., Le Brun reste méconnu : la carrière officielle du Premier peintre du roi fait souvent oublier l’œuvre, que l’on croit volontiers ennuyeuse. Cette œuvre, qu’il faut certes replacer dans son temps pour en comprendre l’esprit, porte cependant la marque d’une personnalité forte et riche, qui avait donné des preuves d’indépendance avant de se mettre au service de la volonté royale.


La formation

Le fils du sculpteur Nicolas Le Brun se fit remarquer par un talent précoce. Son apprentissage auprès de François Perrier (v. 1590-1656), puis de Simon Vouet* l’initia à une manière large et noble. Le Brun étudia aussi avec profit les fresques de Fontainebleau*, les tableaux et les antiques des collections royales. Avant l’âge de vingt ans, il s’était déjà assuré la protection du chancelier Séguier (1588-1672) et avait commencé à fréquenter un milieu de lettrés. La première commande importante lui vint de Richelieu, qui lui fit peindre en 1641, pour le Palais-Cardinal (Palais-Royal), trois tableaux, dont subsiste (au musée de Nottingham) le Diomède livré par Hercule à ses chevaux, d’une fougue juvénile. L’année suivante, Le Brun offrit à la communauté parisienne des peintres et sculpteurs, pour sa chapelle établie dans l’église du Saint-Sépulcre, un Martyre de saint Jean l’Évangéliste (auj. à Saint-Nicolas-du-Chardonnet), grande composition qui le montre déjà en possession de ses moyens. Il voulut cependant parfaire son éducation en Italie. À Rome, où il arriva en 1642, il subit l’influence de Poussin* et celle des Bolonais (v. Académisme), tout en étudiant Raphaël*. La leçon de Poussin inspire Mucius Scaevola devant Porsenna (musée de Mâcon), où un réalisme plus franc trahit cependant la personnalité du jeune artiste : l’influence du Guerchin l’emporte dans la Pietà pathétique qu’il envoya au chancelier Séguier (musée du Louvre). Sur le chemin du retour, Le Brun s’arrêta à Lyon ; c’est là sans doute qu’il peignit une Mort de Caton (musée d’Arras) réaliste jusqu’à la brutalité.