Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Laos (suite)

Le Mékong (1 865 km au Laos) ne constitue pas un bon axe de communication à cause des nombreux rapides qui compartimentent le fleuve en biefs plus ou moins longs et qui sont dangereux en période de basses eaux. Un premier bief au nord, de Ban Houei-Sai à Luang Prabang, est praticable pendant les hautes eaux aux bateaux de moins de 100 t. Les rapides de Xieng Khouang coupent en saison sèche la circulation entre Luang Prabang et Vientiane.

Un bief important entre Vientiane et Savannakhet (450 km) est accessible durant les hautes eaux aux péniches à moteur de 200 t ayant un tirant d’eau inférieur à 2 m. Un dernier bief navigable s’étend au sud de Paksé, mais est limité à la frontière cambodgienne par les chutes de Khong, infranchissables en toutes saisons.

L’irrégularité du débit du Mékong (minimum de 920 m3/s en juin et maximum de 15 800 m3/s en novembre à Ventiane), partagé entre une période de basses eaux de février à juin et une période de hautes eaux de juillet à janvier, avec, certaines années, des crues dévastatrices en octobre, est déterminée en grande partie par le climat de mousson qui rythme la vie du pays. Les précipitations annuelles, variant de 1 500 à 2 000 mm selon les régions, se concentrent en été, alors que la saison sèche, oscillant entre deux et cinq mois, se situe en hiver. Les températures varient beaucoup moins en fonction des saisons que de l’altitude, qui détermine la répartition de la végétation.

Dans les régions basses, de température moyenne annuelle comprise entre 24 °C (Luang Prabang) et 27 °C (Paksé), dominent les forêts denses humides à Diptérocarpacées, comprenant des arbres à feuilles persistantes et des arbres à feuilles caduques, et les forêts à teck. En altitude, la température moyenne annuelle devient égale ou inférieure à 20 °C, ce qui entraîne l’apparition de forêts denses à feuillus et à conifères très différentes des précédentes. Partout, les forêts denses sont souvent dégradées en forêts claires ou même en savanes.

Plus de 60 p. 100 de la population se concentrent dans la vallée du Mékong et les terres basses en général. Ce sont essentiellement des Laos, alors que la montagne est inégalement occupée par des ethnies très variées.


La diversité ethnique


Les Laos

Les Laos, ou Thaï Laos, installés dans les plaines alluviales et les basses vallées les plus fertiles du pays, sont l’ethnie dominante sur les plans numérique et surtout culturel et politique. Descendus des montagnes du sud-est de la Chine, ils envahirent peu à peu le Laos du nord vers le sud à partir du xe s. au moins. Ce sont des mongoloïdes qui se sont métissés d’Indonésiens autochtones, surtout dans le Sud. Ils habitent des villages allongés le long des cours d’eau, dans lesquels leurs maisons en bois ou en bambou sur pilotis sont entourées de vergers exubérants d’arbres fruitiers. Bouddhistes, ils construisent dans chaque village une pagode, centre de la vie sociale, où réside une petite communauté de bonzes. Riziculteurs, ils labourent leurs rizières, alimentées en eau par la pluie ou par irrigation, avec une charrue de type chinois tirée par un buffle ou un attelage de bœufs à bosse, et cultivent essentiellement du riz gluant qui constitue la base de leur alimentation. Ils pratiquent aussi la pêche, dont ils consomment le produit sous forme de saumure de poisson ou de crevettes d’eau douce. Divers légumes, cucurbitacées, patates douces et feuilles comestibles, les volailles et les porcs élevés sous la maison complètent l’alimentation. L’agriculture est essentiellement orientée vers l’autosubsistance. Les femmes filent et tissent le coton dans presque tous les villages, dont certains sont spécialisés dans la poterie, la vannerie ou la fabrication d’ustensiles en bois ; les objets en métal sont généralement importés.


Les minorités

Il existe une grande variété d’ethnies, qui se répartissent en quatre catégories principales.

• Les minorités thaïes. Venant du nord comme les Laos, les Thaïs sont arrivés plus tard. Ils ont souvent conservé une société avec une hiérarchie de type féodal et parlent des dialectes très voisins du lao, ayant parfois une écriture semblable.

Ils habitent les hautes vallées où, la superficie des rizières étant insuffisante, ils font des « rây », ou cultures sur brûlis. Ils défrichent la forêt en début de saison sèche. Avant les premières pluies, ils y mettent le feu, nettoient le terrain et, sans retourner la terre, sèment des graines de riz, de maïs et de divers légumes dans des trous faits à l’aide d’une perche de bambou munie d’un couteau de fer à son extrémité. Après un ou deux ans de culture, le sol est abandonné à une jachère forestière qui peut durer une dizaine d’années ou plus. Ce type d’agriculture itinérante sur brûlis est pratiqué par toutes les populations montagnardes.

Certaines de ces ethnies thaïes sont bouddhistes comme les Laos, mais la plupart sont animistes et s’adonnent au culte des génies (phi).

• Les Khas. Ce sont les anciens occupants du pays, qui ont été refoulés dans les montagnes par les Laos. Ils ont des caractères physiques particuliers qui les différencient des autres populations : petite taille, peau foncée, nez droit et large, yeux moins bridés, cheveux légèrement ondulés. Leur langue appartient à la famille môn-khmer. Ils n’ont pas d’écriture et sont animistes. Ils construisent des maisons sur pilotis en bois et bambou avec un toit en chaume. Ils ont en outre des greniers sur pilotis à l’écart des maisons. Désignés par les Laos sous le nom générique de Khas, qui signifie « esclaves » ou « sauvages », ils se divisent en un grand nombre de tribus.

Pratiquant des « rây » sur un territoire bien délimité, avec une jachère forestière permettant une conservation des sols, ils vivent en économie fermée. La pêche, la chasse et la cueillette fournissent des ressources qui complètent celles de l’agriculture. Ils domestiquent et élèvent des éléphants qui servent au traînage des grumes, le travail salarié dans l’exploitation forestière pouvant leur fournir une ressource complémentaire. Leur société, divisée en clans, eux-mêmes subdivisés en familles restreintes, est de type patriarcal patrilinéaire.