Mathématicien français d’origine piémontaise (Turin 1736 - Paris 1813).
Fils aîné d’une famille nombreuse, noble, mais peu fortunée, qui portait le nom d’un bisaïeul, capitaine de cavalerie, venu de France se mettre au service du duc de Savoie, Lagrange a pour père le trésorier de l’Intendance royale des fabriques et fortifications.
Dès 1754, il se distingue par un petit écrit, en italien, dédié à un mathématicien célèbre, Giulio Cesare Fagnano dei Toschi e di Sant’Onofrio (1682-1766). L’année suivante, il adresse à Leonhard Euler*, alors directeur de la section mathématique de l’Académie de Berlin, un résumé en latin d’une nouvelle méthode, purement analytique, pour l’étude de problèmes d’extrémums et dont la technique donna ultérieurement naissance au calcul des variations selon l’expression d’Euler en 1766. En 1769, il déclare à d’Alembert* que cette découverte était ce qu’il avait fait de mieux en géométrie.
Nommé, en 1755, professeur aux écoles royales d’artillerie de Turin, il est choisi en 1756 par l’Académie de Berlin comme associé étranger. En 1758, il fonde, avec quelques jeunes autres scientifiques, une société qui est à l’origine de l’Académie royale des sciences de Turin, et c’est dans l’organe de cette société qu’il publie l’essentiel de son œuvre scientifique durant son séjour dans sa ville natale : calcul des variations avec ses applications à la mécanique, recherches sur la nature et la propagation du son, calcul intégral, théorie des mouvements de Jupiter et de Saturne. En 1764, il emporte le prix du concours biennal de l’Académie des sciences de Paris, sur la libration de la Lune. Au cours d’un voyage que lui facilite l’amitié généreuse du marquis D. Caracciolo (1715-1789), ambassadeur du roi de Naples, plus tard vice-roi de Sicile, il entre en contact avec les milieux scientifiques parisiens en 1763, se liant d’une façon durable avec d’Alembert. Lorsqu’en 1766 Euler quitte Berlin pour rejoindre Saint-Pétersbourg, c’est le même d’Alembert qui lui fait obtenir la succession du célèbre géomètre suisse.
Cependant, tout en continuant ses travaux de mécanique céleste, qui l’occuperont jusqu’à la fin de ses jours, Lagrange se tourne vers un genre de recherches peu cultivé, la théorie des nombres, dans lequel il se rencontre avec Euler, dans le sillage de Pierre de Fermat*. Il démontre la résolubilité, dans l’ensemble ℕ des nombres entiers naturels, de l’équation indéterminée x2 – ay2 = 1, pour tout a non carré parfait, et surtout il fonde la théorie moderne des formes quadratiques.
S’attaquant à la théorie des équations algébriques, il est, avec Alexandre Vandermonde (1735-1796), à l’origine du courant moderne qui devait aboutir, grâce surtout à Évariste Galois*, à la théorie des groupes et déboucher sur l’algèbre* moderne.
Ses nombreux travaux de mécanique nécessitent une mise au point définitive, qu’il expose dans sa Mécanique analytique. L’abbé Joseph-François Marie (1738-1801) et Adrien Marie Le Gendre (1752-1833) se chargent de son édition à Paris en 1788.
La mort de sa femme, sa cousine Vittoria Conti, en 1783, puis celle du roi de Prusse le décident à quitter Berlin. Les efforts de Honoré Gabriel Riqueti, comte de Mirabeau* (1749-1791), déterminent alors la cour de France à l’appeler à Paris, où il s’installe en 1787. La pension qui lui est allouée lui est scrupuleusement versée par tous les gouvernements qui se succèdent durant sa vie.
Membre de l’Institut dès sa création (1795), sénateur sous le Consulat et l’Empire, comte, grand officier de la Légion d’honneur, grand-croix de l’ordre impérial de la Réunion, il reste jusqu’à sa mort le savant discret et aimable qu’il a été toute sa vie. Ses cours à l’École normale de l’an III et à l’École polytechnique ont donné naissance à plusieurs grands traités didactiques et ont exercé une influence considérable sur l’enseignement des mathématiques dans le monde entier.
J. I.