Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Ku Klux Klan (suite)

Mais la violence du Klan ne connaît bientôt plus de limites, et l’anonymat permet à de simples malfaiteurs d’accomplir leurs forfaits. Aussi le Tennessee réagit-il en 1868 en votant une loi « pour maintenir la paix publique ». L’Alabama, l’Arkansas, la Caroline du Nord et du Sud, le Mississippi suivront en 1870-71. Dès 1869, le général Forrest annonce la dissolution du Klan, dont les agissements se poursuivent néanmoins. Le 31 mai 1870, le Congrès adopte une première mesure de répression, qui est renforcée par deux fois en 1871. Ces lois, ou Force Acts, qu’on surnomme aussi les Ku Klux Acts, dénoncent « la rébellion contre le gouvernement des États-Unis », accordent au président le droit de suspendre l’habeas corpus et de proclamer la loi martiale, punissent les coupables, leurs complices et ceux qui auraient refusé de les dénoncer. Dans plusieurs cas, le président Grant manifesta son autorité. Mais si le Klan disparaît réellement, c’est sans doute en raison de l’évolution politique. De 1870 à 1872, les grands planteurs reprennent, sous une forme différente, le pouvoir. Pour « remettre les Noirs à leur place », il n’est plus nécessaire de recourir à la violence ; les assemblées législatives s’en chargeront. L’activité du Klan, toutefois, a contribué à annihiler les effets de la Reconstruction.

Le Klan renaît en 1915. William J. Simmons, un ancien prédicateur laïque, l’exhume de l’oubli à Atlanta (Georgie). Pourtant, le mouvement ne se développe pas ; il décline même à la fin de la Première Guerre mondiale. Deux excellents organisateurs, Edward Y. Clarke et Elizabeth Tyler, prennent alors l’affaire en main. Ils portent la cotisation à 10 dollars et vont, de maison en maison, recueillir les adhésions. Depuis 1922, H. W. Evans, un dentiste du Texas, est Sorcier impérial. C’est en même temps un businessman avisé et dynamique ; il sait qu’un mouvement puissant enrichit ses dirigeants. Le Klan compte 100 000 membres en 1920 et plus de 5 millions en 1925. Si son domaine d’élection demeure le Sud, il s’implante aussi dans le Midwest, notamment en Ohio, en Indiana, en Californie, en Oregon.

C’est que le Klan des années 1920 poursuit des objectifs plus larges, plus nationaux que son prédécesseur. Certes, il continue de chercher à intimider les Noirs : ceux-ci ne reviennent-ils pas du front avec la fierté ou l’arrogance, comme disent les sudistes, que confère l’uniforme ? N’ont-ils pas entrepris d’envahir les grandes villes industrielles du Nord ? Mais, au moment où le fondamentalisme triomphe dans la Bible Belt, le Klan fait la chasse aux papistes : en Oregon, il s’efforce de confier le monopole de l’enseignement à l’école publique, grâce à laquelle on supprimera les écoles paroissiales ; dans le Nord-Est, il stigmatise les « wet », c’est-à-dire les partisans de la vente libre des boissons alcoolisées, nombreux parmi les Italiens et les Irlandais. Défenseur de l’« américanisme à 100 p. 100 », il déteste les étrangers et les Juifs, tous suppôts, d’après lui, de la révolution bolchevique. Sa clientèle vient surtout de la petite bourgeoisie, rurale et citadine, qui ne profite guère des années de prospérité. Le rituel plus ou moins magique, le mystère, le goût des amitiés viriles, les tendances au sadisme se donnent libre cours au niveau des militants de base, qui se libèrent, dans l’anonymat, de leurs peurs, de leurs angoisses et de leurs frustrations. Les points communs ne manquent pas avec les mouvements fascistes d’Europe.

Sur l’attitude à adopter à l’égard du Klan, les partis traditionnels sont divisés ; c’est ainsi qu’à la Convention nationale de 1924 les démocrates ne parviennent à choisir leur candidat à la présidence qu’après 103 tours de scrutin. Pendant quelque temps, le Klan parvient à dominer les assemblées législatives du Texas, de l’Oklahoma, de l’Arkansas, de la Californie, de l’Oregon, de l’Indiana, de l’Ohio. En 1923, le gouverneur de l’Oklahoma, qui a manifesté son hostilité au Klan, est « empêché », c’est-à-dire suspendu par la législature de l’État.

À partir de 1926, le Klan décline. Sans doute les dirigeants avaient-ils un goût trop prononcé pour les affaires. Mais il ne faut pas sous-estimer la force des adversaires du Klan : journalistes, politiciens, hommes d’Église, enseignants ont été nombreux à prendre le risque de lutter, sans défaillances, contre l’« Invisible Empire » ; en faisant appel à la tolérance, à la justice, au libéralisme, qui sont autant des traditions américaines que l’intolérance et la violence, ils ont, peu à peu, convaincu leurs compatriotes. À la veille de la Seconde Guerre mondiale, le Klan n’était plus qu’un groupuscule que ses attaches avec le Front américano-allemand discréditèrent complètement.

Il y eut dans les années 50 et au début des années 60 un troisième Klan, qui s’est surtout employé à combattre la déségrégation raciale et les lois sur les droits civiques. Si ses activités ont été spectaculaires, par exemple lors du boycottage des autobus de Montgomery en 1956, son influence est toujours restée limitée à une infime minorité.

A. K.

➙ Noirs des États-Unis (les).

 D. M. Chalmers, Hooded America, the First Century of the Ku Klux Klan (Garden City, N. Y., 1965 ; trad. fr. l’Amérique en cagoule. Cent ans de Ku Klux Klan, Éd. de Trévise, 1968). / W. P. Randel, The Ku Klux Klan : a Century of Infamy (Philadelphie, 1965 ; trad. fr. le Ku Klux Klan, A. Michel, 1966). / G. Hodgson, Carpetbaggers et Ku Klux Klan (Julliard, coll. « Archives », 1966).

Kulturkampf

Action menée par Bismarck* contre les catholiques allemands.



Les prodromes

Dans la Confédération* germanique, le catholicisme, qui représentait du reste la majorité confessionnelle, se trouvait bien traité. On peut même parler d’un renouveau du catholicisme allemand, attesté par le concordat bavarois, la bulle De salute animarum réorganisant la hiérarchie et la création, au ministère prussien des Cultes, d’une « division catholique » (katholische Abteilung) [1841]. Quant à la Constitution prussienne de 1850, elle stipule : « L’Église protestante, comme l’Église catholique romaine, ainsi que toute autre société religieuse, ordonne et administre ses affaires librement. »