Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
K

Koniev (Ivan Stepanovitch) (suite)

Après la victoire, Koniev commande les forces soviétiques, en Autriche et en Hongrie, puis remplace en 1946 Joukov à la tête de l’armée de terre. En 1953, il présidera le tribunal qui jugera L. P. Beria. Chargé de la coordination de la politique militaire des pays satellites de l’U. R. S. S., il deviendra, de 1955 à 1960, le commandant en chef des armées du pacte de Varsovie*. En septembre 1961, au lendemain de la crise de Berlin, il reprendra pendant quelques mois le commandement des forces soviétiques en Allemagne. Type accompli du grand chef militaire communiste, Koniev est membre du Comité central du Parti. Il n’avait pas hésité à attaquer publiquement Joukov dans la Pravda au lendemain de sa disgrâce de 1957 et témoignait encore dans les Izvestia en 1970 de son admiration pour Lénine et Staline, dont l’enseignement — souligne-t-il — fut la base de la victoire de l’U. R. S. S. en 1945. Koniev a publié ses souvenirs de guerre en 1966 sous le titre Année 1945 (traduits en français en 1968 : l’Invasion du IIIe Reich).

L. A.

Kooning (Willem de)

Peintre américain d’origine néerlandaise (Rotterdam 1904).


Il s’impose autour des années 40 comme une des forces les plus fécondes du nouvel art américain. L’œuvre qui, en 1950, le révèle au grand public, Woman I (Museum of Modern Art, New York), le place à côté des grands noms de l’avant-garde expressionniste* abstraite, comme Jackson Pollock*, Franz Kline et Robert Motherwell.

Willem de Kooning quitte l’école à l’âge de douze ans pour devenir apprenti dans une entreprise de peinture et suit pendant huit ans les cours du soir d’une académie. La découverte du mouvement De Stijl*, animé par Mondrian*, et un contact, en Belgique, avec l’expressionnisme flamand fondent en partie son expérience picturale, dont les premières affirmations coïncident avec son départ pour les États-Unis, en 1926. Le vocabulaire formel du jeune homme se réfère alors à des motifs de la vie quotidienne, vase, chaise, table... et traduit une certaine ambiguïté de l’espace dans le rapport entre les objets. Peu à peu, il s’affranchit de l’écriture construite de ses premières œuvres, et la peinture murale qu’il exécute en 1935 pour le W. P. A. Federal Art Project (commandes d’État de l’administration Roosevelt) illustre une plus libre sensibilité dans ses formes curvilignes, au tracé ample qui évoque Miró*.

De 1935 à 1945, Willem de Kooning se trouve au centre d’un conflit entre les méthodes abstraites et figuratives de création ; il entame une série de peintures où le corps humain devient son sujet de prédilection. Cette phase biomorphique va s’appuyer sur l’expérience surréaliste, pour aboutir à une fulgurance du geste qui déforme et remodèle des femmes sous un aspect hideux et féroce. Cette lutte de la forme se déroule sur un espace sans profondeur et très dense, établi par la ligne et les modulations de valeurs. Parallèlement, la palette s’enrichit de couleurs plus brillantes ; une toile comme Pink Lady, de 1944, introduit la couleur chair, que le peintre modifie et purifie pour donner cette teinte unique, le « rose de Kooning ». Mettant par la suite directement en cause les rapports classiques du motif principal à l’arrière-plan, il approfondit le problème de la forme à significations multiples dans la série célèbre de peintures dites « positif-négatif », traitées au sapolin (sorte d’émail synthétique).

Mais c’est à partir de 1950, dans un retour à une technique d’art monumental, et en reprenant le thème de la femme, qu’il explore une nouvelle dimension picturale, celle de la matière. Certaines peintures, comme Gotham News (1955), dont la pâte encore fraîche, triturée et malaxée, a été provisoirement recouverte par des pages de journaux qui y laissent des traces d’inscriptions ou de photographies, deviennent le lieu d’un affrontement expressif qui témoigne de la violence du processus technique, dissout l’impression d’unité au profit de la seule puissance et brise l’idée traditionnelle (européenne) de la partie constitutive du tout. De telles œuvres expliquent l’influence qu’aura W. de Kooning sur Rauschenberg* et sur le pop’art*. L’espace d’un tableau comme Excavation (1950) se déroule sur plusieurs plans, en dérive perpétuelle et sans références lisibles, comme par analogie au déracinement de ce que l’artiste appelle le « non-milieu contemporain ».

Vers 1955, W. de Kooning peint une série de toiles abstraites, Interchange (1955), February (1957), qui conservent néanmoins le caractère formel biomorphique des peintures figuratives. Une espèce d’autorité et de franchise, par exemple dans Merrit Parkway, marque un nouveau pas dans l’expressionnisme de W. de Kooning, fait des contradictions mêmes d’un art toujours au bord de la rupture.

En 1963, de Kooning quitte New York, où il habitait depuis son arrivée aux États-Unis, pour Long Island : afin de fuir, en particulier, les innombrables visites que lui attirait sa célébrité croissante. Il multiplie les dessins, parfois quasi automatiques, qui lui permettent sans cesse de trouver de nouvelles formes. Il reprend le thème des Femmes, au corps écartelé sous de multiples angles de présentation, et les situe pour la première fois, non plus dans un entourage abstrait, mais dans la lumière du « plein air ». En même temps, dans cette œuvre qui n’avait jamais sacrifié à l’exhibition égocentrique, l’humour, la joie semblent succéder à une longue angoisse.

B. B.

 T. B. Hess, Willem de Kooning (New York, 1959) ; Willem de Kooning : Recent Paintings, avec textes de l’artiste (New York, 1967 ; trad. fr. De Kooning : peintures récentes, galerie Knoedler, 1968).

Kōrin et Kenzan

Décorateurs et peintres japonais des xviie et xviiie s.


Fils d’un riche marchand de soieries de Kyōto, Ogata Kōrin (1658-1716) et son frère Ogata Kenzan (1663-1743) illustrent chacun à leur manière, dans leurs œuvres d’une grande élégance décorative, le climat de luxe et de prospérité de la période Genroku (1688-1704), l’une des plus brillantes du shōgunat des Tokugawa.