Kongos (suite)
Les Kongos sont essentiellement des commerçants et des artisans, mais ils sont également agriculteurs. Les travaux agricoles sont répartis entre les hommes et les femmes. Les premiers s’occupent de la préparation des terres, du débroussage ; mais ce sont les femmes qui assurent le gros des travaux agricoles. Parmi les cultures du sorgho, du mil, du maïs, du riz, de l’igname, le palmier a une place importante. On a pu parler d’une « civilisation du palmier ». C’est un arbre « mâle », arbre du chef ; celui qui tire le vin de palme (musôgi) doit mériter la confiance du chef. Du palmier, on tire de l’huile, du vin, du vinaigre, des fruits, du pain. Le vin de palme est consommé dans toutes les manifestations sacrées ou solennelles de la vie sociale. Le palmier fournit des matériaux pour l’artisanat et la construction ; les maisons, généralement rectangulaires, sont faites de rameaux de palmier entrelacés ; seule une porte permet l’entrée de la lumière.
Les cultures se pratiquent sur des buttes et des billons. Les Kongos élèvent des poules, des chèvres, des moutons et des vaches. La pêche, jadis activité royale, est aujourd’hui générale. Les travaux artisanaux de la forge (fabrication des armes et des outils), du tissage (étoffes de raphia) relèvent des aristocrates ; la diversité des formes et des textures des étoffes a donné lieu à un lexique riche et spécialisé. Les Kongos travaillent aussi le cuivre et font de la vannerie.
Les activités commerciales de l’ethnie sont très importantes, comme l’institution des marchés en témoigne. « Ils étaient et demeurent des lieux sacrés, des lieux de contact et d’information » (G. Balandier). Il existait aussi un commerce à longue distance qui couvrait une large partie du Congo méridional. Il était assuré par les notables et les rois. Les principaux produits échangés étaient le sel, les tissus, les peaux, le fer.
Le système de parenté est matrilinéaire. L’organisation sociale se fait selon trois rangs : les aristocrates, les hommes libres et les esclaves (ki-mfumu) ; ces derniers ne sont pas membres du clan, mais « enfants du village » (mwana gata ; pluriel : banaba ngata) ; les Kongos conservent le souvenir d’un de leurs rois (ntotila). Il y a des chefs « couronnés » (mfumu) qui s’imposent aux clans dominants. L’unité de résidence est le village, constitué par le lignage. Si le village est composite, des quartiers distincts font apparaître les différents clans. Les tombeaux des ancêtres et le foyer des hommes de même sang en sont les centres de force.
Les relations entre les sexes sont définies avec précision, et les Kongos pratiquent l’initiation. Le savoir des choses cachées appartient aux sorciers (nganga). La littérature orale des Kongos est riche ; elle est aussi bien profane que politique et au service du pouvoir.
La religion kongo connaît plusieurs dieux, dont une divinité suprême (nzambi ampungu), qui n’est jamais matérialisée et est inaccessible. Elle ne peut recevoir de culte, et cependant elle est à l’origine de toute chose et représente la puissance et la liberté. Ce sont les dieux inférieurs du monde des esprits qui sont l’objet de cultes : les bankita, ou « êtres du commencement », les bakulu (de nkulu, les anciens), membres défunts du clan. Ils favorisent ou contrarient les entreprises de leurs descendants. Enfin, au sein de la nature, des forces (basimbi) peuvent être esprits des eaux, de la terre ou des forêts ; ils agissent directement ou par le truchement de « pièges à esprits » (image de bois ou de pierre).
J. C.
G. Balandier, Sociologie actuelle de l’Afrique noire (P. U. F., 1955) ; la Vie quotidienne au royaume de Kongo, du xvie au xviiie siècle (Hachette, 1965).