Principale ville et port du Pākistān ; plus de 2 millions d’habitants.
Située au débouché de la vallée de l’Indus, un peu en dehors du delta, la ville a connu un essor assez récent. Des communautés de pêcheurs et de marchands se sont installées au xviie s. sur l’île de Kiamari et la presqu’île de Manora, en face d’une péninsule séparant l’embouchure de deux rivières modestes, la Layārī et la Malīr. Mais cette installation côtière ne devint pas un grand comptoir, comparable à Bombay et à Calcutta par exemple. En effet, l’arrière-pays est désertique, et les souverains du Sind n’acceptèrent pas l’installation des Européens.
Un premier tournant fut pris en 1843 à la suite de la conquête anglaise du Sind. Sir Charles Napier, qui avait eu l’initiative de cette conquête, s’efforça de développer Karāchi. Toutefois, ce n’est qu’avec l’essor de la culture du coton le long de l’Indus et l’augmentation rapide de la production pendant la guerre civile américaine que Karāchi acquit de l’importance. Mais, encore en 1947, le port était d’une importance limitée, comparée à celle de Bombay, qui concurrençait victorieusement Karāchi pour les liaisons avec l’Inde du Nord. Un nouveau tournant fut pris en 1947 avec l’indépendance du Pākistān. La ville fut, en effet, préférée à Lahore, trop proche de la frontière, comme capitale du nouvel État fédéral (1948). Elle devait le rester pratiquement jusqu’en 1967, date du transfert effectif du gouvernement à Rāwalpindī, ville à proximité de laquelle est construite Islāmābād, la nouvelle capitale.
Karāchi commença dès lors à croître rapidement sous une double impulsion. D’une part, les industriels souhaitaient s’installer près du centre de décision politique ; d’autre part, de nombreux réfugiés de l’Inde vinrent s’y installer. Ils constituaient en 1960 environ les deux tiers de la population. Parmi eux, il y avait un grand nombre de gens dotés d’un réel esprit d’entreprise et de capitaux. Karāchi devint donc, en même temps qu’un centre administratif, une ville industrielle importante, et des investissements considérables y furent engagés, tant publics que privés (près des deux tiers des dépenses de logements faites dans tout le Pākistān furent concentrés à Karāchi). Dans le même temps, le port était débarrassé de la concurrence de Bombay. Il est moins étonnant, dans ces conditions, que la population soit passée de 350 000 habitants en 1947 à plus de 2 millions d’habitants aujourd’hui.
La ville est donc surtout un port (trafic avoisinant 10 Mt) qui ravitaille le Pākistān et exporte ses produits, notamment son coton, ainsi qu’un centre industriel. Le textile domine encore largement, mais la gamme des activités est assez étendue, de la sidérurgie au raffinage du pétrole en passant par la métallurgie de transformation.
L’agglomération se développe très vite. Elle est encore mal organisée et insuffisamment équipée, et ne comporte guère de beautés architecturales. Au sud, le port s’étend le long d’un môle de 3 km qui relie l’île de Kiamari au continent. Il est entouré d’un quartier commercial et artisanal assez serré. Celui-ci est flanqué au nord-ouest d’un quartier résidentiel pauvre. Dans certains îlots, 80 p. 100 des habitants sont logés dans des jhuggī, ou huttes, avec des conditions de vie assez mauvaises (dans l’ensemble de l’agglomération, plus des trois quarts des habitants vivaient vers 1960 dans des logements sans eau et sans électricité). Ce quartier résidentiel pauvre est limité au nord-ouest par la zone industrielle. Les quartiers de villas riches se développent vers l’est, tandis que tout le nord-est de l’agglomération est formé de quartiers résidentiels de niveau moyen. On s’efforce de développer vers l’est des « colonies », formes d’urbanisation organisée de qualité moyenne.
F. D.-D.
Pakistan Institute of Development Economics, The People of Karachi (Karachi, 1966).