Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
J

Justinien Ier (suite)

Inachevée, la reconquête de l’Occident romain favorise en 540 la réouverture du front oriental, où Khosrô Ier, vainqueur de Bélisaire, contraint l’empereur à lui verser tribut en 562, tandis que Huns et Slaves dévastent les Balkans et obligent Justinien à fortifier plus de 400 villes d’Illyricum et de Grèce et à payer leur départ, ce qui nécessite la levée de nouveaux impôts qui ruinent l’Empire. Ainsi sont compromis les efforts faits pour améliorer l’économie byzantine par l’introduction de la culture du mûrier (552) et pour renforcer le rôle de Constantinople en tant que centre d’un trafic (malheureusement toujours déficitaire) entre l’Orient et l’Occident en se libérant du prélèvement perse par la recherche de nouvelles voies vers la Chine : celle des steppes, celle de la mer Rouge.


Le bilan

En fait, en épuisant ses États par une éphémère mais trop coûteuse tentative de restauration territoriale de l’Empire romain, Justinien s’est privé des moyens de reconstruire ce dernier de l’intérieur. En témoignent son impuissance à empêcher l’extension de la propriété latifundiaire, à réorganiser l’administration sur des principes clairs pourtant proclamés en 535 (abolition de la vénalité des charges) et en 536 (concentration des pouvoirs civils et militaires entre les mains d’un même magistrat), etc.

Telle quelle, pourtant, l’œuvre de Justinien Ier permet au « vieil Imperium [de] déployer toutes ses forces et [de prendre] son dernier grand élan politique et culturel », comme l’affirme Georges Ostrogorsky.

P. T.

➙ Byzantin (Empire) / Italie / Ostrogoths / Vandales / Wisigoths.

 C. Diehl, Justinien et la civilisation byzantine au vie siècle (Leroux, 1901). / W. G. Holmes, The Age of Justinian and Theodora (Londres, 1905-1907, 2 vol. ; 2e éd., 1912). / N. Vulič, Origine et race de l’empereur Justinien (Belgrade, 1935). / W. Schubart, Justinian und Theodera (Munich, 1943). / P. Collinet, la Genèse du Digeste, du Code et des Institutes de Justinien (Sirey, 1952). / B. Rubin, Das Zeitalter Justinians (Berlin, 1960).

jute

Filasse textile relativement grossière extraite de la tige d’une plante annuelle, herbacée, du genre Corchorus, qui, autrefois utilisée pour la confection de vêtements par les peuples d’origine hindoue, a, à partir de 1850, servi de matière première de base à la fabrication industrielle de tissu d’emballage notamment pour les produits alimentaires.



Généralités

Le genre Corchorus appartient à la famille des Tiliacées ; il en existe une quarantaine d’espèces dont deux sont cultivées pour des usages textiles et rentrent dans la composition du jute, Corchorus olitorius et C. capsularis. La filasse est localisée dans une couronne péricyclique, dite « liber », qui enserre la partie interne ligneuse située autour de la moelle, d’où le nom de fibre libérienne. Le jute (annuellement 1,5 million de tonnes pour 1 million d’hectares env.) est essentiellement cultivé dans le delta du Gange et du Brahmapoutre, où sont réunies toutes les conditions nécessaires à l’exploitation de la plante, terres alluvionnaires, climat chaud et humide, main-d’œuvre abondante.

Après une période de végétation de 3 à 4 mois, à la floraison, les tiges, qui ont alors atteint une hauteur de 3 à 4 m et un diamètre de 12 à 20 mm, sont coupées à ras de terre et liées en bottillons. Le rouissage qui suit la récolte consiste en une fermentation bactérienne réalisée par immersion des bottillons en eau stagnante ou courante pendant 8 à 30 jours selon les conditions ; le réseau fibreux est alors décollé du bois central. Enfin, les tiges sont brisées avec un maillet, puis frappées sur la surface de l’eau ou sur une planche. Ce décortiquage, suivi du rinçage et du séchage, laisse une filasse d’environ 2 m après la séparation par coupage des extrémités côté pieds (Cuttings), d’un aspect blanc et lustré quand elle est de bonne qualité. La filature transforme les longues filasses en un ruban de fibres techniques courtes par cardage, opération possible grâce au traitement d’ensimage des filasses à base d’émulsion d’huile dans l’eau. La fibre technique représente une agglomération de fibres primaires très courtes et fines de nature cellulosique liées entre elles par un ciment composé en grande partie d’hémicellulose et de lignine ; la sensibilité à la lumière solaire de ce dernier composant entraîne un assombrissement de la filasse avec le temps.

Les fils obtenus ont des usages multiples : le principal est la fabrication de toiles pour sacs et emballages. Le développement du transport en vrac et des fibres de synthèse ont compromis le monopole du jute dans le conditionnement des produits agricoles. D’autres utilisations de la toile de jute se sont partiellement substituées à ce débouché, comme les toiles d’enductions, les dossiers des tapis tuftés. Le fil de jute sert également pour la fabrication de certains tapis bon marché, de semelles d’espadrilles, de toiles dites « Hessians » (pour trame de tapis, linoléums, sacs de qualité, etc.).


Succédanés du jute

Deux Malvacées, l’Urena lobata (Paka, Aramisa) et surtout l’Hibiscus cannabinus (Dah, Mesta, Kenaff) présentes dans toutes les terres arrosées d’Afrique ou d’Asie, sont travaillées de la même façon que le jute. Le Kenaff est en fait un mélange de deux Hibiscus, cannabinus et sabdariffa (Roselle), tous deux beaucoup plus rustiques que le jute, aussi bien dans leurs conditions de végétation que dans la qualité des fils produits. Pour des emplois très grossiers, la tige peut être décortiquée sans rouissage.


Fibres dures

Le jute et ses succédanés présentent des caractéristiques de rigidité plus élevées que les fibres textiles usuelles. Ils sont classés comme fibres semi-dures. Pour la fabrication des ficelles et des cordages, on utilise les fibres dures, dont, pour le règne végétal, les Agaves, qui sont des monocotylédones, appartenant à la famille des Amaryllidacées ; l’édifice fibrillaire de leurs feuilles longues, larges, concaves, dégagé après la coupe par des tambours à couteaux, ou raspadores, lavé, rincé, est filé sous forme de ficelle agricole. La plus connue est le sisal, provenant de l’Agave sisalana.

J. L.