Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
J

jumeaux (suite)

• Lorsque cette division se fait plus tard, vers le cinquième jour, au stade du bouton embryonnaire, alors que la coque trophoblastique est déjà différenciée, il se formera deux embryons ayant le même placenta, mais deux cavités amniotiques distinctes. Deux membranes seulement séparent ces deux cavités. C’est le type le plus fréquent de grossesses uni-ovulaires (65 à 75 p. 100).

• Lorsque la division se fait plus tardivement encore, vers le quinzième jour, date à laquelle une cavité amniotique unique est déjà constituée, elle ne peut plus porter que sur la plaque embryonnaire. Les jumeaux seront donc contenus dans une cavité amniotique unique, et tributaires d’un seul placenta. Ce type de gémelléité est exceptionnel. Il doit être considéré comme à la limite de la tératologie. Il peut donner des jumeaux en miroir et, à un stade de plus, des jumeaux soudés entre eux de façon symétrique (omphalopages, xylopages, etc.). La fusion peut être superficielle, mais parfois elle est plus profonde, avec des viscères communs. Il se peut que l’un des jumeaux soit privé de cœur et ne vive qu’en parasite de son frère, sous l’aspect d’une masse sans morphologie définie.

Dans les deux dernières variétés de grossesses gémellaires avec placenta unique, il existe d’importantes communications vasculaires entre les territoires placentaires des deux jumeaux. Si les deux circulations s’équilibrent, les deux jumeaux ne s’en ressentiront pas et auront un poids égal. Si, au contraire, les deux circulations n’arrivent pas à s’équilibrer, l’un des jumeaux devient « transfuseur actif », et l’autre « transfuseur passif ». Ce déséquilibre aboutit à une inégalité de développement, bien qu’il s’agisse de vrais jumeaux, où le transfuseur est hypotrophique (petit), et le transfusé hypertrophique (gros). Ce déséquilibre explique la fréquence élevée des avortements tardifs et des morts in utero dans les cas de grossesses gémellaires monochoriales, c’est-à-dire à placenta unique. L’accouchement prématuré et la mortalité fœtale sont également plus fréquents. Néanmoins, la différence de poids, lorsqu’elle existe, disparaît après la naissance, et les jumeaux de ce type s’élèvent aussi bien.

Ainsi, les vrais jumeaux ont à l’origine des caractères de ressemblance objective des plus nets, mais ces caractères peuvent se modifier sous l’influence du milieu tant extra- qu’intra-utérin, durant la grossesse. Les vrais jumeaux sont en tout cas obligatoirement du même sexe, du même groupe sanguin et tissulaire, et de potentiels pathologique et psychologique communs.


Les faux jumeaux

Appelés dizygotes ou bi-ovulaires, ils proviennent de deux ovules fécondés chacun par un spermatozoïde. Normalement, à chaque cycle menstruel, il ne mûrit qu’un seul follicule de De Graaf, et donc il y a ponte d’un seul œuf par mois. Si une grossesse survient, les modifications hormonales bloquent toute possibilité d’autre ovulation. Dans le cas de grossesse de faux jumeaux, il y a ponte de deux ovules, soit contenus initialement dans le même follicule, soit provenant de la maturation simultanée de deux follicules. Quoi qu’il en soit, il s’agit d’ovules pondus au cours d’un même cycle menstruel, et l’on parle de « superfécondation ». L’hypothèse de la fécondation d’ovules pondus au cours de deux cycles successifs (« superfœtation ») ne semble pas pouvoir être retenue. En revanche, les spermatozoïdes peuvent provenir de coïts successifs et de procréateurs mâles différents.

Provenant de deux ovules différents, les deux œufs se développent indépendamment et, s’il est possible qu’ils s’accolent, il existe toujours un plan de clivage entre eux. Les deux placentas peuvent former une masse placentaire unique en apparence, mais l’examen attentif retrouve une ligne de séparation. Chaque œuf a son placenta et sa cavité amniotique propres, et, si les deux cavités amniotiques sont accolées, quatre membranes séparent celles-ci.

Les faux jumeaux ne sont différents de simples frères ou sœurs que par la simultanéité de leur gestation. Ils n’ont pas plus de chances de se ressembler que des enfants nés de mêmes parents à des époques différentes. Ils peuvent être aussi bien de sexe différent que de même sexe.

Le diagnostic de la variété de jumeaux n’est pas toujours facile à faire à la naissance. Devant des jumeaux de sexes différents, on peut affirmer à l’évidence qu’il s’agit de faux jumeaux. Devant l’existence d’anastomoses vasculaires entre les deux placentas, on pourra affirmer qu’il s’agit de vrais jumeaux. Par contre, dans bien des cas, il est difficile de se prononcer : si les enfants sont de même sexe, il peut s’agir de vrais ou de faux jumeaux ; si les deux enfants ont chacun un placenta et une cavité amniotique, il peut s’agir malgré tout, comme on l’a vu, de vrais jumeaux, car une division extra-précoce de l’œuf peut aboutir à une grossesse bichoriale, cependant uni-ovulaire. Aussi, dans environ 50 p. 100 des cas, faut-il faire ultérieurement appel à l’étude des caractères anthropométriques.


Causes des grossesses gémellaires

Si l’on connaît bien les mécanismes des deux variétés de jumeaux, on en connaît mal les raisons. On a cependant pu mettre en évidence un certain nombre de facteurs prédisposants.

• L’hérédité joue un rôle incontestable. Classiquement, on estimait que seule la grossesse bi-ovulaire était héréditaire, mais en réalité on a montré que les deux variétés l’étaient et que l’on retrouvait souvent la succession des deux processus dans une même lignée. Il est fréquent de retrouver, dans les antécédents de mères de jumeaux, l’existence de jumeaux chez les ascendants ou les collatéraux.

• La race et le climat interviennent également. Les races très prolifiques comptent un grand pourcentage de jumeaux. Ce pourcentage s’abaisse, par ailleurs, des régions froides vers les régions chaudes : la proportion de grossesses gémellaires est de 1,4 p. 100 en Scandinavie, de 1,1 p. 100 en France et de 0,5 p. 100 au Japon.

• Enfin, la fréquence des grossesses gémellaires augmente avec l’âge et le nombre d’enfants antérieurs. Les vrais jumeaux semblent être plus fréquents chez la femme jeune et spécialement chez la primipare, tandis que les faux jumeaux s’observent plus souvent chez les multipares.

Les grossesses gémellaires sont particulièrement fréquentes chez les femmes ayant présenté une stérilité par absence d’ovulation et traitées par des médicaments inducteurs de l’ovulation à effets gonadotropes.