Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Angleterre (suite)

C’est de l’Est-Anglie que partit la « révolution agricole » du xviiie s. La rotation quadriennale du Norfolk, mise au point alors (blé, navets, orge, prairies artificielles), eut un immense succès au xixe s. ; elle n’a disparu du Norfolk que vers 1940, du Lincolnshire vers 1960 ; des troupeaux d’ovins de plusieurs milliers de têtes broutaient les navets et glanaient les céréales. Mais l’introduction de la betterave à sucre en 1925 a amené l’élimination du navet par la betterave, et du même coup la disparition de l’élevage ovin. La culture de la pomme de terre de saison, en régression dans d’autres régions, tend à se rassembler dans les Fens tourbeux, où ses rendements sont élevés. Aujourd’hui, le blé, l’orge, la betterave et la pomme de terre occupent les trois quarts de la superficie arable, les Fens poussant davantage la culture des racines, les plateaux, celle des céréales ; aussi, la région, qui n’a que 15 p. 100 de la surface de l’Angleterre-Galles, en produit-elle la moitié du blé, 40 p. 100 de l’orge, la moitié des pommes de terre, 80 p. 100 du sucre. Mais ces cultures épuisent les sols ; aussi essaie-t-on diverses « cultures de repos », la moutarde, la luzerne, transformée en cubes concentrés pour l’élevage intensif, les haricots et les petits pois de plein champ pour conserveries.

Les cultures maraîchères spécialisées, souvent irriguées, ont aussi beaucoup progressé depuis un siècle : carottes sur les sols sableux, céleri sur les sols tourbeux (la première région britannique pour ces deux cultures), oignons, choux-fleurs d’été, choux de Bruxelles, fraises et cassis. Les Fens vaseux ont aussi des vergers, où se mêlent pommiers, poiriers, groseilliers, mais la région est dans l’ensemble beaucoup plus légumière que fruitière. Les cultures florales, souvent fondées par des Hollandais, ont fait leur apparition depuis 1920, surtout pour les fleurs à bulbes (tulipes, jacinthes, narcisses, jonquilles) ; les Fens cultivent plus de bulbes que la Hollande ; le Norfolk a des cultures de rosiers et même de lavande de parfumerie.

Parmi les cultures de repos, l’herbe de fauche ou de broutage trouve aussi sa place, en particulier sur les sols argileux de l’Essex ; les marais mal drainés et les déversoirs de crue des Fens servent aussi de pâturage permanent. La région produit assez de lait pour sa consommation, et peut même en expédier vers Londres, en été, quand les excédents du Devon se tarissent. Mais c’est surtout l’élevage pour la viande qui est le plus pratiqué. Depuis plusieurs siècles, on achète aux foires d’automne des bouvillons maigres d’Irlande et d’Écosse, que l’on engraisse à l’aide de collets de betterave, d’orge brassée, de céréales, de cubes de luzerne ; on vend ensuite les bovins gras sur le marché de Londres. Depuis 1955 se sont installés d’énormes élevages de porcs et, en liberté ou en batteries, des élevages de poulets, canards, dindes ; de même, des élevages de poules pondeuses en batteries. Le marché londonien, tout proche, est insatiable.

Les industries principales de la région sont liées à l’agriculture : sucreries, meuneries, brasseries, sécheries de luzerne, conserveries de légumes (la région l’emporte de loin sur toute autre, surtout si on y ajoute Grimsby, pour la production des conserves et surgelés), usines de préparation de la viande de porc, fabrication d’engrais, de machines agricoles, de matériel d’emballage, de clôtures métalliques, etc. Mais elles sont si dispersées qu’elles n’ont suscité aucune agglomération industrielle. Les deux plus grandes villes de la région, Ipswich et Norwich, n’ont que 120 000 habitants chacune. Trois autres villes sont riches en industries non agricoles : Lincoln (moteurs, matériel d’excavation), Peterborough (moteurs, fabrication des briques à partir des argiles jurassiques), Cambridge enfin, premier centre universitaire britannique avec Oxford, et qui a attiré des industries de haute technique (radio, instruments scientifiques). Les deux centrales atomiques de Sizewell et de Bradwell s’imposaient dans cette région, qui manque de charbon, donc d’électricité.

L’encombrement du port de Londres a redonné vie aux petits ports de commerce régionaux (King’s Lynn, Ipswich), tandis que les vieux ports de pêche de Yarmouth et Lowestoft connaissent un profond déclin.

La côte à l’écart des Fens attire les touristes (Skegness, Cromer, Yarmouth, Clacton), de même que les étangs artificiels (broads) du Norfolk.

Le Lincolnshire et l’Est-Anglie manquent d’industries, de villes importantes, d’animation. Le gouvernement veille au maintien de son caractère rural ; sauf à Peterborough, aucun grand développement industriel et urbain n’y est prévu.


Les Midlands

On appelle ainsi la région centrale de l’Angleterre, comprise entre le pays de Galles, le Nord anglais, l’Est-Anglie et le bassin de Londres. C’est la seule qui soit dépourvue de façade maritime, et qui ait quelques points situés à plus de 100 km des côtes.

Ses ressources naturelles ne la favorisent guère. Autour du massif gallois, qui déborde largement sur les Midlands, autour des pointements de roches anciennes qui percent la couverture sédimentaire et morainique de la plaine centrale, plusieurs gisements houillers ont contribué au développement industriel, mais ils sont petits, faillés, et fournissent ensemble moins de 10 p. 100 de la production nationale. Le minerai de fer interstratifié s’est épuisé, et les hauts fourneaux s’éteignent, à l’exception de ceux qui transforment le minerai à faible teneur de l’escarpement jurassique (Melton Mowbray, Corby, Kettering). Les argiles à feu, le pétrole de la Trent inférieure (100 000 t par an, presque toute la production nationale) ajoutent peu. L’éloignement relatif des grands estuaires, par où entrent les matières premières importées, et la médiocrité des ressources locales ont contraint les industries à se tourner vers les productions légères, celles qui exigent beaucoup de travail pour un faible poids. Or, ce sont précisément ces industries légères qui jouissent depuis cinquante ans de la plus grande prospérité, alors que les industries textiles et les industries lourdes du Nord sont en déclin ou stagnantes ; de là le paradoxe : la seule région intérieure de Grande-Bretagne est aussi la plus industrialisée !