Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
J

jeunesse (la littérature pour la) (suite)

Problèmes actuels

La crise que traverse la littérature pour la jeunesse à notre époque est grave. Pour la résoudre, elle doit en particulier trouver des réponses aux questions suivantes.
1. Comment satisfaire les besoins du nouveau public qui accède à la culture (répertoire nouveau, choix des livres à adapter, techniques de vulgarisation) ?
2. Comment faire collaborer chercheurs scientifiques et artisans du livre pour enfants, comment utiliser dans la pratique les résultats déjà acquis en psychologie et dans les diverses disciplines qui s’occupent des jeunes ?
3. Comment coordonner les programmes de l’édition et ceux de la télévision (et des autres mass media) pour que ces divers moyens d’expression et de diffusion de la pensée collaborent au lieu de se combattre (politique de la culture) ?

Le souci du livre pour enfants paraît bien mince à côté de tant d’autres. Mais si l’enfant lit peu ou mal, il deviendra un adulte qui n’utilisera pas pleinement la riche expérience de l’humanité. Travailler à ce que les jeunes lisent plus et mieux, c’est à la fois défendre une de nos grandes industries et chercher à maintenir une méthode de culture et de réflexion qui paraît irremplaçable.

M. S.

 P. Hazard, les Livres, les enfants et les hommes (Flammarion, 1933). / F. Böök, H. C. Andersen (Copenhague, 1942). / J. de Trigon, Histoire de la littérature enfantine (Hachette, 1950). / Ceux qui écrivent pour les enfants (en russe, Moscou, 1952). / R. Bamberger, Jugendlektüre (Vienne, 1955 ; 2e éd., 1965). / P. Ariès, l’Enfant et la vie familiale sous l’Ancien Régime (Plon, 1960). / C. Bravo Villasante, Antologia de la literatura infantil española (Madrid, 1968). / A. Lugli, Letteratura per la gioventù (Florence, 1968). / A. Pellowski, The World of Children’s Literature (New York et Londres, 1968). / M. Soriano, les Contes de Perrault, culture savante et traditions populaires (Gallimard, 1968). / I. Jan, Essai sur la littérature enfantine (Éd. ouvrières, 1969). / Dictionnaire des écrivains pour la jeunesse (Seghers, 1969). / J.-P. Dieny, Le Monde est à vous, la Chine et les livres pour enfants (Gallimard, 1971).

Jeunesses musicales de France

Mouvement destiné à promouvoir l’éducation musicale chez les jeunes.


Durant la « drôle de guerre » de 1939-40, René Nicoly (1907-1971), chef du service d’orchestre des Éditions Durand, est affecté à la préparation militaire des élèves des grandes écoles à Rochefort-en-Yvelines. Pour mille jeunes consignés un dimanche, il fait venir des artistes de Paris, conçoit et présente lui-même un programme composé d’œuvres de Mozart, Haydn et Schubert. L’accueil est enthousiaste, la formule embryonnaire des Jeunesses musicales de France — « éveiller la sensibilité musicale des jeunes de toutes conditions pour un mieux-être et un mieux-penser » — est trouvée.

Après l’armistice, René Nicoly, démobilisé, reprend son poste aux Éditions Durand et poursuit ses expériences du temps de guerre. Au collège Stanislas, puis au collège Bossuet, aux lycées Louis-le-Grand, Jules-Ferry, Victor-Duruy, il organise des séances régulières avec les meilleurs artistes français. L’un après l’autre, les orchestres symphoniques et les formations de chambre accordent leur concours. La formule est neuve : tout concert est commenté, toute musique expliquée. La doctrine se confirme : « D’une part, intransigeance à l’égard de la qualité des programmes et de leur exécution ; d’autre part, établissement d’un lien étroit entre le phénomène musical et la culture générale. » D’éminents conférenciers collaborent au mouvement naissant.

Dès 1942, celui-ci a pris un essor important. Il faut de vastes salles pour accueillir les 6 000 J. M. F. de l’époque. Pathé-Marconi leur consacre la répétition générale des galas organisés au palais de Chaillot par la Société des concerts du Conservatoire, dirigés par Charles Munch. Jacques Rouché ouvre, de son côté, les portes de l’Opéra. De 6 000, le nombre des adhérents passe rapidement à 20 000. Dès 1943, le mouvement essaime en province. De nombreuses délégations sont créées. L’orchestre des Cadets du Conservatoire effectue une tournée hors de Paris.

En 1945, il faut, dans la capitale, redoubler les séances du cycle de musique de chambre et sextupler celles du cycle de musique symphonique. L’année suivante, l’action J. M. F. s’étend à l’Afrique du Nord. Une Fédération internationale des Jeunesses musicales associe les divers groupements nationaux. Un Journal des J. M. F. tire à 150 000 exemplaires. Des œuvres sont commandées par les J. M. F. à des compositeurs contemporains. Un cycle spécial est consacré, à Paris, à la musique du xxe s., de Debussy à Hindemith ; en outre à des analyses d’œuvres présentées du point de vue technique. Des analyses-interviews mettent les adhérents en contact avec des créateurs présentant eux-mêmes leurs ouvrages et répondant aux questions posées par les auditeurs. En huit ans, 16 compositeurs français et 8 compositeurs étrangers — L. Aubert, T. Aubin, H. Barraud, M. Duruflé, H. Dutilleux, A. Honegger, J. Ibert, A. Jolivet, R. Loucheur, D. Lesur, D. Milhaud, S. Nigg, F. Poulenc, J. Rivier, H. Sauguet, F. Schmitt, B. Britten, L. Dallapiccola, F. Malipiero, F. Martin, G. C. Menotti, G. Petrassi, A. Stallaert, H. Villa-Lobos — dialoguent avec 1 200 J. M. F., salle Gaveau. À la fin de la saison 1951-52, les J. M. F. comptent 127 délégations régionales, où ont été donnés 841 concerts commentés. Paris aligne à lui seul 42 615 adhérents. Ballet et théâtre voisinent avec la musique. Pour favoriser l’essor de la musique enregistrée, René Nicoly fonde le Club national du disque. Un spectacle itinérant d’opéras de chambre — l’« Opéra de poche » — est présenté dans 152 villes de province, d’Afrique du Nord et d’Afrique noire. Des « rencontres » avec les grands interprètes donnent à ceux-ci l’occasion de dévoiler à de jeunes publics les secrets de leur art. Un cycle de juniors est réservé aux adolescents de dix à quinze ans. Une chorale J. M. F. est fondée (L. Martini).