Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

anévrisme (suite)

Si des opérations reconstructives ont pu être pratiquées avec succès dès le début de ce siècle sur les anévrismes artériels des membres, ce n’est qu’en 1951 que Charles Dubost, de Paris, réalisa pour la première fois la cure d’un anévrisme de l’aorte abdominale. Certaines zones, telle l’aorte thoracique, nécessitent des mesures peropératoires particulières pour diminuer les besoins en oxygène (hypothermie) ou assurer la circulation (circulation extracorporelle) d’organes tels que le cerveau, qui ne peuvent subir une anoxie prolongée.


Anévrisme veineux

Plus souvent appelé phlébectasie, il est habituellement observé au niveau des varices, où il est la conséquence d’une hypertension endoveineuse. Exceptionnels sont les anévrismes veineux congénitaux sans élévation de pression ; ils ne sont pas graves.


Anévrismes artério-veineux

C’est une communication directe entre une artère et une veine. Les premiers cas observés comportaient de larges poches intermédiaires, et c’est Hunter qui créa le terme en 1757 en distinguant l’anévrisme artério-veineux de l’anévrisme artériel. Mais l’ectasie manque souvent, et on préfère maintenant la dénomination de fistule* artério-veineuse. L’usage a cependant consacré le terme d’anévrisme pour certaines de ces fistules, ainsi l’anévrisme circoïde, qui est une fistule artério-veineuse congénitale sous-cutanée avec aspect angiomateux et dilatation veineuse variqueuse.


Anévrisme du cœur ou anévrisme ventriculaire

C’est une complication assez fréquente des infarctus du myocarde. Il siège surtout sur la face antérolatérale du ventricule gauche. Son sac est formé de fibres scléreuses résultant d’une nécrose du myocarde, doublée du péricarde qui y adhère. Comme les anévrismes artériels, il peut se rompre, ou, du fait des caillots qu’il contient, être la source d’embolies artérielles. Mais, de plus, il entraîne une insuffisance ventriculaire gauche et peut s’accompagner d’accès de tachycardie ventriculaire, prenant leur origine dans le myocarde distordu de la région du collet. Sa cure radicale est une acquisition chirurgicale récente. Ses indications restent rares ; c’est la résection avec suture du collet, effectuée sous circulation extracorporelle.

J. T.

 P. Bonnet, les Anévrismes artériels intracrâniens (Masson, 1955). / A. Porchet-Brauchli, Zum klinischen Bilde des Anevrysma dissecans (Bâle, 1956). / M. Trimaille, Résultats du traitement chirurgical des anévrismes artériels et artério-veineux (thèse, Strasbourg, 1957). / W. Slama, les Aspects radiologiques des anévrismes disséquants (thèse, Paris, 1962).

Angelico (Fra)

Peintre italien (Vicchio di Mugello v. 1400 - Rome 1455).


Artiste de la première Renaissance, contemporain de Donatello*, Fra Angelico (Guidolino di Pietro, en religion Fra Giovanni da Fiesole, dit il Beato) donne ses premières œuvres connues à l’époque où meurt Masaccio*. À ce moment, la peinture est en plein désarroi à Florence, aucun style n’est réellement défini. En 1436 paraît le traité de L. B. Alberti*, Della pittura, éloge de l’inspiration pittoresque, fertile en détails, par opposition à l’art monumental de Masaccio. Le grand représentant de cette nouvelle conception est Fra Angelico ; sa formation de miniaturiste l’oriente directement vers la manière tendre et courtoise du style gothique international. Ses débuts sont obscurs — il commence à peindre tard — et, de plus, il parvient jusqu’à nous entouré d’une légende mystique que Vasari s’est appliqué à renforcer. Dominicain au couvent de Fiesole, dont il est prieur en 1449-1452, il avait été pressenti par le pape Nicolas V pour une nomination à l’archevêché de Florence. Il faut le replacer dans l’ambiance intellectuelle dont se nourrissent les différents foyers de recherche à Florence, au milieu du quattrocento.

Moine dominicain, thomiste, son programme pictural tient de la propagande : rallier humanisme et religion, que les attaques des observantins, au début du xve s., avaient séparés, mettre au profit de l’art ancien les recherches nouvelles, afin d’élaborer un humanisme chrétien, où le réalisme acquerra une dimension poétique. L’insuccès des représentants de la grande lignée novatrice, Donatello et Masaccio, auprès des Florentins, permet à « l’élégant classicisme médiéval » d’aboutir, avec des personnalités comme la sienne ou celle de Ghiberti*. Ils ont en commun ce même amour des rapports harmonieux établis entre les êtres et l’espace, entre les formes enveloppées et les formes enveloppantes. Pour eux, la perspective se découvre de façon empirique, elle n’est pas un a priori de construction, un « vertige ». Dans le Couronnement de la Vierge (v. 1434-1435, Louvre), la composition se fait sur un plan vertical, et conserve de l’esprit gothique ses détails pittoresques et le chatoiement des couleurs ; de l’art des enlumineurs vient la représentation des paysages paradisiaques dans la prédelle. Cette tradition picturale, qui mène de Simone Martini* à l’Angelico en passant par Gentile da Fabriano (v. 1370-1427) et Lorenzo Monaco (v. 1370 - apr. 1422), recherche dans la création d’un univers de légende un moyen onirique d’éviter les grandes questions théologiques qui ont secoué le Moyen Âge.

Le grand mérite de Fra Angelico est de ne s’être pas cantonné dans cette impasse, et d’avoir su adapter son art aux nouvelles découvertes ; mérite d’autant plus grand qu’il ne s’agit pas d’une simple évolution, mais d’un changement radical qui met en cause non seulement la production artistique d’une époque, mais encore les fondements de la mentalité nouvelle qui apparaît à l’aube des Temps modernes. Le passage à l’esprit humaniste implique que la vérité, qui jusqu’ici était donnée, soit maintenant construite par l’homme seul. Le débat se trouve illustré dans la Crucifixion du couvent de San Marco (1440) ; le Christ est entouré de deux groupes, les saintes femmes et les docteurs : on peut aller à Dieu par deux voies, le cœur et la science. L’origine directe de cette nouvelle orientation se trouve dans les fresques de Masaccio, à San Maria del Carminé de Florence (1425). Au couvent de San Marco, reconstruit entre 1436 et 1452 par Michelozzo, la suite des fresques (v. 1437-1445) relate, de cellule en cellule, la vie du Christ ; dépouillement et austérité viennent en droite ligne de Giotto* ; les corps s’imposent, maintenant, avec un modelé sculptural qui rappelle le parti monumental de la sculpture française du xiiie s.