Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
I

Italie (guerres d’) (suite)

L’État pontifical, pour sauvegarder son indépendance, doit à la fois lutter contre ses vassaux et participer aux luttes italiennes : il perd dans ces conflits son prestige moral. Au nord, le duché de Savoie est sous l’influence française et celui de Milan est réclamé par la maison d’Orléans. Venise, elle, offre son alliance indifféremment aux uns et aux autres, son but étant d’élargir ses possessions de Terre Ferme. Incapables de s’unir, divisés, ces États seront la proie toute désignée des ambitions européennes. La France, l’Espagne et l’Empire s’y mesureront durant plus d’un demi-siècle.

L’expédition de Charles VIII commence en triomphe. Tout cède au vainqueur, les Médicis s’enfuient de Florence, les Français sont accueillis en sauveurs, le roi fait son entrée dans Rome le 31 décembre 1494. Mais, diplomate inhabile, Charles VIII ne sait pas exploiter ses succès et se laisse berner par le pape Alexandre VI*. Le royaume de Naples n’en est pas moins conquis en quelques jours. Cependant, le désastre est proche. L’armée est d’abord décimée par la syphilis, puis les États italiens, effrayés par le triomphe français, se coalisent. Le 31 mars 1495, sous l’égide de l’Espagne, une Sainte Ligue est formée avec l’empereur, le pape, Venise et le duc de Milan.

Charles VIII, sous peine d’être pris dans la souricière, doit quitter en toute hâte sa nouvelle conquête. Il réussit à regagner la France avec son artillerie, mais, à Fornoue (6 juill. 1495), seule l’indiscipline des coalisés évite à l’armée française d’être taillée en pièces. L’aventure se termine en 1496, lorsque le grand capitaine espagnol Gonzalve de Cordoue (1453-1515) fait capituler à Atella les soldats français restés à Naples. Le plus clair résultat de l’expédition est l’implantation de l’Espagne dans la péninsule et sa domination en Méditerranée.


De Louis XII à Henri II

La Sainte Ligue ne poursuit pas son avantage ; fidèles à leur politique d’équilibre, les États italiens ne se soucient pas de favoriser l’Aragonais après avoir évincé le roi de France. À Charles VIII, qui meurt en 1498, succède son cousin Louis XII*, chef de la maison d’Orléans, héritière du duché de Milan. Le nouveau roi mène une campagne diplomatique qui lui procure l’alliance de Venise, du pape et de Florence.

En juillet 1499, Louis XII, après avoir conclu le traité de Lucerne avec les cantons suisses, ces portiers des Alpes, qui lui fournissent en outre de nombreux mercenaires, passe les monts et s’empare du Milanais ; le duc Ludovic Sforza le More, s’appuyant sur d’autres Suisses, reprend son duché au début de 1500, et une seconde expédition est nécessaire aux troupes de Louis XII pour récupérer la ville (bataille de Novare, 10 avr. 1500).

En même temps, le roi de France s’empare du royaume de Naples avec l’accord de l’habile Ferdinand II d’Aragon (V d’Espagne) qui espère, par ce biais, éliminer la branche cadette de sa maison, qui y règne. Après la mort d’Alexandre VI, la puissance des Borgia*, — alliés de la France — s’effondre en Italie ; depuis leur base de Sicile, les Espagnols, qui ont conservé la maîtrise de la mer, reprennent la lutte dans la péninsule et s’emparent du royaume de Naples (1504) malgré les exploits de La Palice et de Bayard (1476-1524).

Ne percevant pas les vues du pape Jules II, Louis XII accepte de combattre pour lui les Vénitiens, qu’il écrase à Agnadel (14 mai 1509). En fait, Jules II désire chasser les « Barbares », c’est-à-dire les Français, d’Italie. Son meilleur allié est le cardinal de Sion, Matthaüs Schiner (v. 1470-1522), très influent sur les cantons suisses. Le pontife conclut une nouvelle Sainte Ligue avec l’Espagne et Venise (oct. 1511). Grâce au génie stratégique d’un grand capitaine, Gaston de Foix (1489-1512), Louis XII remporte d’abord la bataille de Ravenne (11 avr. 1512), mais il ne sait pas en profiter ; avec le secours des Suisses, Jules II force bientôt les Français à abandonner le Milanais. Après la mort du pape, une tentative pour reprendre le duché échoue le 6 juin 1513 (bataille de Novare), toujours à cause des troupes suisses de Schiner.

C’est le jeune François Ier* qui reprendra le Milanais l’année même de son avènement, par la victoire de Marignan (13-14 sept. 1515). Il gardera le Milanais dix ans, jusqu’à une autre bataille, celle de Pavie (24 févr. 1525) — un désastre français, cette fois —, conséquence de la rivalité entre la France et la maison d’Autriche après l’élection de Charles Quint au trône impérial. À la paix de Cambrai ou des Dames (5 août 1529), François Ier renoncera à l’Italie.

Son fils Henri II* fera renaître, et le dernier, les ambitions italiennes de ses prédécesseurs, mais dans le cadre de la lutte contre Charles Quint* et Philippe II*. En 1559 le traité du Cateau-Cambrésis mettra fin à toute espérance d’établissement français en Italie.

À l’issue de ce long conflit, c’est la puissance espagnole qui s’établissait pour longtemps à Milan et à Naples. Les causes de l’échec français en Italie doivent être cherchées principalement dans l’absence d’une forte marine de guerre qui aurait pu s’opposer à celle de l’Espagne et qui aurait dû appuyer les opérations militaires de Terre Ferme.

P. R.

➙ Charles VIII / François Ier / Henri II / Louis XII.

italo-éthiopiennes (guerres)



1889-1896

Entendant jouer en Afrique le rôle d’une grande puissance coloniale, l’Italie, après son installation en Somalie et en Érythrée, cherche à opérer la jonction de ces deux territoires par la conquête de l’Éthiopie. Sa première tentative se solde par les deux échecs militaires de Dogali (26 janv. 1887) et de Saganeiti (8 août 1888). Par le traité d’Uccialli (2 mai 1889), Rome doit reconnaître le Négus Ménélik II* comme souverain d’Éthiopie. Sans renoncer à leur projet, les Italiens tentent alors, par la pénétration de leurs colons et de leurs agents, d’instaurer un protectorat de fait sur l’Éthiopie. Aussi. Ménélik II dénonce-t-il en 1893 le traité d’Uccialli et inflige-t-il deux nouvelles défaites aux Italiens à Amba Alagi (7 déc. 1895) et à Adoua (1er mars 1896). L’Italie doit signer la paix d’Addis-Abeba (26 oct. 1896) et renoncer une fois encore à son dessein.