Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
I

Islande (suite)

Au xvie s., le roi Christian III (1534-1559) décide un certain nombre de réformes, dont les deux plus importantes sont l’établissement de la Réforme luthérienne et la décision de réserver les avantages commerciaux aux seuls Danois. Le commerce de l’île devient l’apanage des marchands danois, et Anglais et Allemands sont chassés. En 1551, l’instauration du protestantisme dans l’île ruine l’ancienne puissance de l’Église, mais la suppression du catholicisme rencontre de vives résistances ; le dernier évêque catholique, Jón Arason, meurt décapité (1550) ; il fera figure de héros de la cause nationale islandaise.

La réforme religieuse permet au roi de s’attribuer d’énormes territoires ; jusqu’au xixe s., les terres de la Couronne et celles de l’Église représenteront la moitié des propriétés de l’île.

En 1602, le trafic islandais devient un monopole exclusivement danois, et le xviie s. voit s’installer un mercantilisme rigide, avantageux pour le Danemark, mais ruineux pour l’Islande, dont le déclin économique est certain à la fin de ce siècle. En outre, des pirates barbaresques ravagent les côtes de l’île.

La population, tombée à 50 000 personnes, comprend alors 20 p. 100 de mendiants et de miséreux. De 1707 à 1709, une terrible épidémie de variole décime cette population sous-alimentée, bientôt réduite à 35 000 âmes. Au xviiie s., des catastrophes naturelles (éruption volcanique de 1783) et une terrible famine (1785) aggravent la situation. Toutefois, le grand responsable de cette stagnation reste le monopole commercial danois, qui sera enfin modifié dans un sens plus libéral à la fin du xviiie s.


Vers l’indépendance

Toutes les rancœurs des Islandais s’expriment en 1809 dans une tentative de révolte qui échoue. En 1814, au traité de Kiel, le Danemark, qui perd la Norvège, conserve l’Islande : compensation qui est moins médiocre qu’on ne l’imagine généralement. Cependant, lorsque le roi accepte d’établir un Parlement dans son royaume, l’agitation reprend en Islande, où un fort courant autonomiste commence à se faire jour. À partir de 1840, un homme politique, Jón Sigurðsson (1811-1879), réclame des réformes profondes tant économiques que sociales ou constitutionnelles. Le vieil Alþingi est restauré en 1843, et l’entière liberté de commerce est rétablie en 1854.

Jón Sigurðsson n’en continue pas moins à demander l’autonomie pour son pays. En 1874, le Danemark, à l’occasion du millième anniversaire du début de la colonisation, augmente les pouvoirs de l’Alþingi, qui partagera désormais avec le roi de Danemark le pouvoir législatif et le contrôle des finances de l’île.

La fin du xixe s. se caractérise par de grands efforts dans le domaine économique et éducatif. L’Islande, qui a conservé la pureté de sa langue, connaît avec le romantisme un renouveau littéraire et politique ; Jón Sigurðsson est lui-même un grand lettré. Les dernières années du xixe s. sont toutefois mauvaises pour l’économie de l’île, et de nombreux habitants émigrent au Canada.

En 1903, une Constitution nouvelle accorde une plus grande autonomie interne au pays, qui se trouve désormais dirigé par un ministre islandais résidant à Reykjavík. En 1906, le télégraphe relie l’île au continent, alors que la multiplication des bateaux à vapeur favorise le développement de la pêche. Le commerce extérieur devient plus prospère et passe de plus en plus aux mains des Islandais. Aussi l’émigration vers l’Amérique du Nord diminue-t-elle. En 1911, la première université islandaise est fondée.

En 1918, l’Islande devient, par traité, un royaume indépendant : celui-ci ne possède plus désormais de commun avec le Danemark que le souverain ; il est décidé que cet accord, valable pour vingt-cinq ans, pourra ne pas être reconduit à son échéance.

Durant la Seconde Guerre mondiale, la position stratégique de l’île, « immense porte-avions qui ne peut être coulé », lui vaut d’être occupée par les Anglais en 1940, puis par les Américains en 1941. L’Islande, coupée du Danemark, est gouvernée par le régent Sveinn Björnsson (1881-1952), qui ne renouvelle pas le traité de 1918. Un référendum approuvé à une immense majorité met fin à l’union avec le Danemark et établit la république qui est proclamée le 17 juin 1944. Björnsson en est le premier président.

En 1949, l’Islande adhère au pacte de l’Atlantique Nord et, en 1951, autorise les Américains à y installer une base militaire à Keflavík. Sous l’influence du Premier ministre, Bjarni Benediktsson (1908-1970), l’Islande reste dans l’O. T. A. N. De 1958 à 1961, puis de nouveau en 1973, un conflit au sujet de la pêche l’oppose à la Grande-Bretagne, mais, en 1962, son économie profite d’un accord de coopération avec le Danemark, la Suède, la Finlande et la Norvège.

Après la mort de Björnsson (janv. 1952), Ásgeir Ásgeirsson (1894-1972) est élu président ; il le reste durant seize ans après trois réélections ; sous sa présidence, les conservateurs exercent le pouvoir. En 1968, le Dr Kristjan Eldjarn (né en 1916), soutenu par la gauche et hostile à l’O. T. A. N., lui succède. À la suite des élections législatives en 1971, un gouvernement de centre gauche est formé ; toutefois, le problème de la base américaine de Keflavík n’est pas immédiatement soulevé.

P. P. et P. R.


La littérature

V. Edda, saga et scandinaves (littératures).

 K. Gjerset, History of Iceland (Londres, 1923). / M. Cluzel, Essai sur les Scandinaves et l’Islande au xe siècle (G. P. Maisonneuve, 1937). / G. Chabot, Europe du Nord-Ouest, t. II : Finlande et pays scandinaves (P. U. F., 1958). / K. von Maurer, Zur politischen Geschichte Islands (Aalen, 1968). / A. Sömme et S. Thorarinsson, Geography of Norden (Oslo, 1968). / D. Bernard-Folliot, Pays nordiques (Hachette, 1969). / G. Alexandersson, les Pays du Nord (P. U. F., coll. « Magellan », 1971).