Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
I

Islande (suite)

Au milieu du xixe s., la population était essentiellement rurale, et l’île ne possédait aucune agglomération dépassant 1 500 habitants. Actuellement 70 p. 100 des habitants vivent dans les villes, presque toutes situées sur les côtes. Ce sont pour la plupart des bourgades, où les activités commerciales, sociales et administratives, les écoles, etc., équilibrent les fonctions portuaires (pêche) et industrielles (transformation du poisson). Les plus importantes sont Reykjavík* (80 000 hab. ; 92 000 avec la banlieue), Akureyri (10 000 hab.), Hafnarfjörður (10 000 hab.), Keflavík (5 000 hab.), Akranes (4 000 hab.), Ísafjöður (3 000 hab.), Siglufjörður (2 500 hab.).


L’agriculture

Les sols, acides, et le climat sont peu favorables aux cultures, et de vastes surfaces sont stériles ou recouvertes seulement par la toundra subarctique. L’orge et l’herbe sont principalement cultivées pour l’élevage du bétail. Environ 90 p. 100 du revenu des fermes dépendent de l’élevage (17 p. 100 de la population vivent dans des fermes isolées). On compte 5 200 exploitations. Le lait, seul, représente 45 p. 100 des bénéfices. Les principales régions productrices sont les basses terres de Suðurland, au sud de Reykjavík, avec la grande laiterie de Selfoss, et la région de l’Eyjafjörður, au nord, autour d’Akureyri. Les moutons sont nombreux dans le Nord et le Nord-Est. Les cultures maraîchères avec serres chauffées sont très développées autour de Reykjavík.


La pêche et les industries

Principale activité économique, la pêche n’emploie que 7 p. 100 de la population active, et les industries de transformation du poisson que 10 p. 100. Mais elle fait vivre près du quart de la population, assure 40 p. 100 du revenu national et, en 1970, plus de 77 p. 100 de la valeur des exportations. 6 000 pêcheurs environ, utilisant surtout des navires de petite taille basés dans de nombreux petits ports, assurent, à l’intérieur des 50 milles marins de la limite des eaux territoriales, plus de 80 p. 100 des apports. Les morues sont pêchées surtout à l’ouest et au sud de l’île, et les harengs au nord. Une cinquantaine d’usines assurent la production de filets surgelés de morue (34,7 p. 100 de la valeur des exportations en 1970), d’huile et de farine, de hareng et de capelan.

Trop dépendante d’une activité menacée par la surexploitation des fonds et la concurrence d’autres puissances maritimes, l’Islande essaie de diversifier son économie. En dehors des industries du poisson, elle ne possède surtout que de moyennes et petites entreprises : cimenteries, usines textiles, petits chantiers navals. Une usine traitant la diatomite du lac Mývatn peut en exporter 30 000 t par an. Les 900 000 têtes du troupeau ovin offrent une matière première de qualité à l’industrie textile. Manquant de minerai, l’Islande dispose d’un potentiel énergétique considérable, hydraulique et géothermique, en grande partie encore non utilisé. La grande centrale hydraulique de Búrfell, sur la Pjorsá (100 km à l’est de Reykjavík), assure la marche de l’usine d’aluminium de Straumsvík, près de Hafnarfjörður, au sud de Reykjavík (capacité de 75 000 t d’aluminium par an).

J. G.


L’histoire


Des origines au réveil national

La présence de colons n’est attestée dans l’île qu’à partir du ixe s., lorsque des ermites venus d’Irlande élirent domicile sur quelques points de son territoire. Mais on sait fort peu de chose sur ces premiers établissements, qui disparurent à l’arrivée des envahisseurs païens.

La colonisation commence réellement vers 874, avec l’arrivée d’un chef de clan de l’ouest de la Norvège, Ingólfur Arnarson, qui s’y établit à l’emplacement de l’actuel Reykjavík avec sa famille et ses serviteurs.

Le flot des colons augmente à la fin du siècle, probablement lorsque le roi de Norvège Harald Ier Hårfager étend en 890 sa domination sur les Orcades et les Shetland. Cette colonisation, comme celle du Groenland, relève de la poussée viking sur les mers européennes. Les hommes qui peuplent l’Islande viennent essentiellement de la Norvège, d’Irlande, d’Écosse, des îles Hébrides, des Orcades et des Shetland.

Les structures sociales reposent sur la prédominance des grands propriétaires. La pêche et l’élevage du mouton sont les principales activités d’une population qui vit en économie fermée. Au début du xiie s., cette population s’élève à 75 000 âmes, chiffre qui ne sera pas dépassé avant le xxe s.

Les notables, les goðar (sing. goði), possèdent la réalité du pouvoir : ils remplissent les tâches de juges, d’administrateurs et accomplissent les fonctions religieuses. Ces chefs locaux coopèrent à la création d’une assemblée générale, le Parlement national (Alþingi, ou Althing), qui édicté un ensemble de lois imitées de celles de la Norvège, valables pour l’ensemble du pays. L’Alþingi se tient d’abord à Reykjavík avant de se fixer à Þingvellir, à l’intérieur des terrés. Mais le pouvoir des « goðar » n’en sera pas diminué pour autant ; au contraire, par le système des héritages, on verra certains chefs concentrer entre leurs mains l’administration de très vastes territoires.

Au xe s., des missionnaires chrétiens prêchent en Islande et, en l’an 1000, l’Alþingi décrète que tous les habitants de l’île doivent embrasser le christianisme. Cette conversion ne va pas sans de vives résistances qui frisent la guerre civile, et la tradition païenne demeurera longtemps vivace. Cela explique que les vieux textes de la civilisation germanique, disparus partout ailleurs en Europe, seront conservés en Islande sous forme d’admirables récits en prose ou en vers (Eddas* et sagas*).

Le premier évêché autonome est créé en 1056 en Islande, et c’est d’ailleurs par ce biais que les rois de Norvège essaieront, puis finalement réussiront à établir leur domination sur l’île. En effet, dès Olav Ier (995-1000), les rois s’intéressent de près à l’Islande ; plus tard, ils se serviront de l’influence de l’archevêque norvégien de Trondheim, dont relèvent les deux évêchés islandais.

À partir de 1238, ce sont des Norvégiens qui occupent les sièges épiscopaux en Islande. En 1262, le roi Haakon IV (1223-1263) soumet les Islandais à son pouvoir. L’Islande manque de vaisseaux, en raison de la rareté du bois de construction dans l’île, et le trafic commercial est aux mains des marchands norvégiens.

À partir de 1380, l’Islande tombe avec la Norvège sous l’autorité des rois de Danemark, et l’île glisse peu à peu à l’abandon : les étrangers dominent le pays, occupent les sièges épiscopaux ; les agents royaux tyrannisent les habitants pendant que marchands anglais et allemands se disputent les profits du trafic islandais.