Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
I

Isère. 38 (suite)

Les hommes et les activités

Le Bas-Dauphiné est traversé par quatre grands itinéraires : de Lyon à l’Italie par Bourgoin, où se branche la direction de Grenoble ; de Valence à Grenoble et Genève par la basse Isère ; de Saint-Rambert-d’Albon à Rives par la Bièvre-Valloire ; de Bourg-en-Bresse à Grenoble par Sault-Brénaz et Voiron. À Satolas-et-Bonce, on équipe un grand aéroport international.

Sur des terroirs, somme toute, assez peu favorisés, le département, où dominent les petites exploitations agricoles, a connu longtemps le système de la polyculture. Cependant, sous l’influence des grands centres urbains et avec le progrès des communications, la spécialisation l’a emporté peu à peu : exploitation du bois, élevage surtout pour la viande dans les montagnes (avec prédominance des ovins dans le sud), élevage aussi sur les plateaux et dans les terres humides du Bas-Dauphiné, qui fait partie du bassin laitier lyonnais, culture de céréales et de colza dans la plaine de Lyon et dans la Bièvre, plantation de noyers dans la basse Isère, d’abricotiers, de poiriers et de pêchers dans la Valloire et sur les terrasses rhodaniennes entre Roussillon et Chanas. À différentes époques, pour compléter les revenus de l’agriculture, les campagnes ont accueilli l’industrie sous la forme du travail à domicile (préparation des gants dans les environs de Grenoble, tissage des soieries dans le Bas-Dauphiné, travail de la chaussure en Bièvre, etc.) ou du travail en usine (papeterie et métallurgie de la vallée de la Fure, mécanique et chimie à Lyon et dans la vallée du Rhône, où la culture des fruits permet la survivance de l’ouvrier-paysan).

Actuellement, un peu plus de la moitié de la population active du département travaille dans l’industrie. Pourtant, les matières premières manquent (à l’exception de la pierre à ciment dans la cluse de Voreppe et à Montalieu-Vercieu, de l’anthracite de La Mure), et, dans les Alpes, les communications restent difficiles. Mais l’Isère a profité d’une invention aujourd’hui centenaire, la houille blanche. En 1869, Aristide Bergès équipe une haute chute à Lancey ; en 1883, Marcel Deprez réalise entre Vizille et Grenoble le premier transport d’électricité. Les usines hydroélectriques, créées d’abord sur la rive gauche du Grésivaudan, se multiplient ensuite le long de la Romanche et du Drac, de la Fure et de la Morge. Cette énergie à bon marché d’abord profite à la papeterie (Lancey, Domène, Moirans, Pont-de-Claix), puis attire l’électrométallurgie (aluminium à Rioupéroux et aux Clavaux, aciers spéciaux à Allevard, ferro-alliages à Brignoud et à Livet) et l’électrochimie (carbure, chlore et leurs dérivés à Brignoud, à Jarrie et Pont-de-Claix). Actuellement, toutes les chutes intéressantes étant équipées, le prix de l’énergie tend à augmenter. Aussi, de nouvelles fabrications à haute valeur ajoutée (silicium, magnésium, matières plastiques) se substituent-elles aux anciennes. Cette conversion des industries nées de la houille blanche a été favorisée par la présence d’une université à Grenoble. Voiron, Bourgoin, La Verpillière, La Tour-du-Pin ont attiré des industries nouvelles pour compenser le déclin du tissage des soieries. Vienne, jadis dominée par l’industrie des draps de laine, a réussi à diversifier son économie (papeterie, travail des métaux non ferreux, chaussure, industrie laitière), mais une partie de sa main-d’œuvre est attirée par Lyon et par les usines chimiques de Saint-Clair-du-Rhône, des Roches-de-Condrieu et du Péage-de-Roussillon. Il faut signaler l’importance du tourisme, surtout des sports d’hiver (L’Alpe d’Huez, Les Deux-Alpes, Chamrousse), le Vercors, la Chartreuse attirant à la fois les skieurs et les villégiateurs d’été (Villard-de-Lans, Saint-Pierre-de-Chartreuse).

L’essor industriel explique le relèvement démographique de l’Isère. La population, qui avait atteint 600 000 personnes au milieu du xixe s., était tombée à 570 000 en 1920. Elle est aujourd’hui de 768 000, en majorité agglomérée dans les villes. Cette croissance, due pour l’essentiel à l’immigration (la population étrangère représentait plus de 9 p. 100 du total en 1968), place le département de l’Isère au troisième rang de la Région Rhône-Alpes, après le Rhône et la Haute-Savoie. Pendant la même période, l’exode rural a été considérable. Actuellement, la population agricole ne représente plus que 10 p. 100 du total.

L’agglomération de Grenoble rassemble 43 p. 100 de la population du département. Au deuxième rang, celle de Vienne est dix fois moins peuplée. Sur la rive gauche du Rhône, le site de cette ville gallo-romaine est l’un des plus beaux de la région ; les quartiers du centre conservent d’admirables monuments du passé ; mais la place manque pour profiter d’une situation avantageuse sur un grand axe de communication. Bourgoin-Jallieu, plus peuplé que Voiron, verra naître à proximité la ville nouvelle de L’Isle-d’Abeau. L’ensemble du Péage-de-Roussillon et de Salaise-sur-Sanne forme la cinquième agglomération urbaine du département.

Quelle que soit la vitalité de ces petites villes, aucune ne peut équilibrer Grenoble, et moins encore Lyon. Le département reste donc partagé en deux zones d’influence. Celle du chef-lieu, souveraine dans l’Isère alpestre, s’appuie notamment sur un ensemble d’usines et d’équipements de recherche, échelonnés le long des trois branches formées par les vallées glaciaires de l’Isère et du Drac. Le renom de plusieurs de ces établissements a dépassé le cadre régional, attirant du personnel de toute la France et même de l’étranger. Dès le milieu du xixe s., l’influence de Lyon s’est étendue sur le bas Dauphiné jusqu’à Voiron et La Côte-Saint-André par l’organisation du tissage des soieries. Plus tard, la diffusion d’autres activités (étirage des métaux, constructions mécaniques, industrie chimique) ou bien le ramassage de la main-d’œuvre par autocars pour les grandes usines lyonnaises d’automobiles et de construction électrique ont renforcé cette influence. Enfin, le long de la vallée, au sud de Lyon, apparaît déjà un autre ensemble humain et économique, avant même que ne soient achevés les travaux d’aménagement de la Compagnie nationale du Rhône.

M. L.

➙ Grenoble / Lyon / Rhône-Alpes.