Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
A

Andes (suite)

De la civilisation traditionnelle au sous-développement actuel


Les groupes humains dans les Andes

Lorsque, au xviie s., les conquérants espagnols gravirent les Andes à la recherche de l’or, ils rencontrèrent une véritable civilisation indienne, née dans ces hautes terres. Le groupe humain actuel est le résultat de ce choc et de cette interaction entre les civilisations précolombiennes, fondées sur une économie agricole, et la colonisation espagnole, fondée sur l’économie minière. Il faut ajouter qu’après l’indépendance, au début du xixe s., les Andes furent partagées entre divers États, dont, en général, elles ne constituèrent qu’une partie du territoire, souvent la plus peuplée.


La mise en place du peuplement

C’est dans les hauts plateaux des Andes centrales que s’est développé l’Empire inca, qui, au xvie s., regroupait des groupes humains issus du peuplement indien formé, sans doute, par une migration venue d’Asie dix mille ou quinze mille ans auparavant. La société était hiérarchisée, avec une sujétion étroite de la masse des travailleurs agricoles à une minorité urbaine. En dehors de ces Andes centrales, d’autres groupes humains indiens existaient, épars et moins civilisés, en particulier dans le Sud.

La colonisation espagnole s’est traduite d’abord par la mise en place d’une administration, ensuite par la formation d’un nouveau groupe humain, dû aux Espagnols immigrés et dont le haut niveau de vie était assuré par l’exploitation des mines et l’élevage extensif pratiqué dans les grandes propriétés. La main-d’œuvre était fournie par les Indiens astreints au travail forcé ou réduits en esclavage.

La population actuelle reflète cette double origine. Au sein des États indépendants, la densité est toujours plus forte dans la partie andine que dans les autres zones naturelles. En Colombie, les trois quarts des habitants vivent dans la montagne. En Équateur, 56 p. 100 de la population se trouvent dans les hauts bassins, malgré la rareté des terres. Au Pérou, la majorité des habitants vit encore dans les hauts plateaux, mais on constate que la croissance démographique y est beaucoup moins rapide que dans la partie littorale.

Le groupe humain andin est caractérisé par une grande prédominance de la population indienne ; on compte environ 10 millions d’Indiens « purs » (dont 4 700 000 au Pérou, 2 500 000 en Colombie et 2 millions en Équateur). Les Blancs sont très peu nombreux, car ils habitent surtout les grandes villes du littoral. Le reste de la population est formé par les métis, qui jouent un rôle important dans l’encadrement de la vie économique.

Comme dans le reste de l’Amérique latine, la population est en accroissement rapide. Il est possible d’estimer le taux d’accroissement naturel annuel de cette zone à 30 ou 35 p. 1 000, rythme très rapide, résultant du taux de natalité supérieur à 40 p. 1 000, tandis que le taux de mortalité se situe généralement entre 10 et 13 p. 1 000. Aussi, la population andine est-elle d’une extrême jeunesse, la tranche d’âge des moins de quinze ans constituant environ 45 p. 100 de la population totale.

Face à cette croissance démographique et aux archaïsmes économiques de la montagne andine, il se manifeste chez cette population une certaine mobilité : elle se déplace soit des hautes terres vers la région littorale du Pacifique, en migrations tantôt temporaires, tantôt définitives, intéressant aussi bien les ruraux que les urbains, soit à l’intérieur même de la montagne, de la campagne vers les villes ou de la campagne vers les activités minières ; enfin il existe des migrations pionnières de la montagne vers les terres tropicales de l’intérieur.

Malgré ces mouvements, la population des Andes demeure importante et reste marquée par une faiblesse générale du niveau de vie et par un taux d’analphabétisme considérable. La plupart du temps, l’Indien, qui forme cependant l’essentiel de cette population andine, reste pratiquement en marge du système monétaire aussi bien que de la vie culturelle et vit en économie presque fermée, de productions alimentaires d’autosubsistance entraînant des carences dans son régime alimentaire. Il n’utilise les petites rentrées d’argent, obtenues par quelques rares ventes, que pour l’achat d’un peu de sel, d’un peu d’eau-de-vie et de quelques outils. Sur le plan culturel, l’indigène est presque toujours illettré et analphabète ; il ignore la plupart du temps l’espagnol et ne parle qu’une langue indienne.


L’agriculture et l’élevage


L’agriculture de subsistance

Sur les hautes terres andines, Indiens et métis vivent généralement d’une petite agriculture de subsistance. Celle-ci se pratique dans de minuscules exploitations, qui sont souvent de petites propriétés privées de 3 à 5 ha, assurant à peine la subsistance d’une famille. Ainsi, en Équateur, près de 100 000 propriétaires possèdent moins d’un hectare et sont, la plupart du temps, obligés de travailler comme salariés dans les grandes propriétés pour accroître leurs ressources. Ces minipropriétés sont en général le résultat de la division des terres des communautés paysannes indiennes ; parfois même, les communautés indigènes ont conservé cette forme communautaire de propriété du sol, comme en certaines régions de la Bolivie, de l’Équateur et du Pérou.

Toutes ces petites exploitations familiales ne pratiquent guère l’irrigation et font surtout des cultures sèches, au gré des précipitations, dans la mesure où celles-ci assurent l’eau nécessaire à la croissance des plantes. Afin de multiplier les chances d’obtenir une certaine production, chaque exploitation comporte en général des parcelles séparées, réparties sur l’ensemble du terroir cultivé par le village. Pratiquement, tous les travaux sont exécutés à la main ; toutefois, certains paysans utilisent une charrue tirée par des bœufs. Quand l’exploitation est trop petite pour permettre un temps de jachère suffisant au repos des terres, le parcage des animaux sur les parcelles apporte au sol un peu d’engrais animal destiné à le fertiliser.

Que la terre soit restée propriété communautaire ou qu’elle soit devenue propriété privée, il existe dans cette agriculture andine des traditions de travail en commun, réunissant les familles paysannes à certaines phases du calendrier agricole.