Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
I

Iran (suite)

L’industrialisation reste modeste. La première impulsion remonte au règne de Rezā Chāh dans les années 1925-1930, et la part de l’État a été prépondérante à l’origine dans de nombreux secteurs. La part des capitaux privés est cependant nettement prédominante dans l’industrie textile, concentrée notamment à Ispahan et Yezd, et qui fournit l’essentiel de la consommation nationale de cotonnades. Les côtes de la Caspienne constituent une autre région industrielle avec d’assez nombreuses industries alimentaires (conserves) et textiles (coton, soie, jute). Plusieurs grandes raffineries sucrières se sont déjà implantées dans le Khorāsān et le Khuzestān. Le tableau industriel reste cependant essentiellement limité aux industries de consommation. Une usine sidérurgique a été ouverte près d’Ispahan. Les industries extractives restent insignifiantes, à l’exception du sel du golfe Persique, exporté vers le Japon, et de quelques minerais de chrome et de cuivre exportés vers l’Union soviétique. Quelques petits bassins charbonniers dispersés surtout dans l’Elbourz donnent environ 300 000 t par an.

C’est en fait et de plus en plus le pétrole qui constitue la base de l’économie. Depuis 1909, le pétrole est exploité dans les champs du piémont mésopotamien du Zagros par l’Anglo-Iranian Oil Company, qui, après la nationalisation sous le gouvernement Mossadegh (1951-1953) et la crise qui s’ensuivit, a été remplacée par un consortium (British Petroleum : 40 p. 100 ; un groupe de sociétés américaines : 40 p. 100 ; Royal Dutch Shell : 14 p. 100 ; Compagnie française des pétroles : 6 p. 100) qui a assuré jusqu’en 1973 la majeure partie de la production (254 Mt en 1972). Un nouvel accord pétrolier (en 1973) a mis en évidence la souveraineté absolue de l’Iran sur les installations pétrolières, et le consortium international est devenu un simple acheteur. Les gisements du Khuzestān fournissent toujours la quasi-totalité de la production, mais le centre de gravité de l’exploitation s’est peu à peu déplacé vers l’intérieur du golfe Persique au fur et à mesure des découvertes. Le problème portuaire a reçu une solution originale. Traditionnellement, l’exportation était concentrée à Abadan pour les produits de la raffinerie construite dans la ville (21 Mt) et à Bandar Machur, port artificiel creusé dans les alluvions du fond du Golfe et vers lequel convergeaient les oléoducs, pour le brut. Devant l’impossibilité de faire accéder à Bandar Machur les pétroliers de plus de 40 000 t, un port en eau profonde a été créé dans l’îlot de Kharg, à 40 km au large de la côte, qu’alimentent des oléoducs sous-marins en provenance du continent et où a été reportée depuis 1966 toute l’exportation de brut du consortium, alors que l’exportation des produits de la raffinerie d’Abadan reste assurée actuellement par Bandar Machur.

Des éléments nouveaux sont apparus récemment à côté de cette exploitation étrangère. Une production nationale iranienne est assurée aujourd’hui par la S. N. I. P. (Société nationale iranienne des pétroles), à partir de divers gisements situés sur le plateau iranien près de Qom, à Naft-e Chāh, près de la frontière irakienne, à l’extrême nord du Khuzestān et dans des gisements sous-marins situés dans le golfe Persique. Pour l’ensemble, la S. N. I. P. produit déjà environ 10 p. 100 du total.

La consommation intérieure par ailleurs s’est accrue considérablement. Le pétrole a remplacé le charbon de bois comme combustible usuel dans toutes les villes iraniennes, sauvant de justesse les dernières forêts du pays. Un réseau d’oléoducs et de gazoducs alimente les centres principaux, à partir d’une artère principale qui est l’oléoduc tous produits Abadan-Téhéran. Le réseau de transport de gaz atteint déjà la frontière caucasienne de l’Union soviétique, vers laquelle s’est amorcée une exportation de gaz qui doit augmenter fortement dans les prochaines années. D’autre part s’amorce une industrie nationale à l’aval de la production pétrolière. La pétrochimie a fait son apparition dans le fond du Golfe et à Chirāz : une grosse usine d’engrais chimiques est alimentée en énergie par un gazoduc provenant des champs pétrolifères mésopotamiens. Une nouvelle raffinerie s’est ouverte à Téhéran.

Le commerce extérieur reste, de toute façon, dominé par le pétrole, qui constitue plus de 90 p. 100 des exportations. Suivent les tapis, les fruits secs, le coton, les peaux, le caviar de la Caspienne. La très grande croissance récente de la production pétrolière a pratiquement doublé le produit national brut au cours des huit dernières années, et le revenu moyen par tête doit atteindre 630 dollars en 1974 et avoisiner 1 200 dollars vers 1980. L’Iran, dans ces conditions, amorce de façon satisfaisante son développement, encadré maintenant dans des plans quinquennaux. Mais un lourd handicap reste constitué par l’immensité des distances. Aux îlots de modernisation rapide du Nord (région téhéranaise, côtes caspiennes), du Nord-Ouest ainsi que du Sud-Ouest (régions pétrolifères du golfe Persique) s’opposent d’immenses régions dans l’Est et le Sud-Est, beaucoup moins développées.

X. P.

➙ Chirāz / Ispahan / Tabriz / Téhéran.

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