Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
I

intestin (suite)

Affections médicales de l’intestin grêle

• Un certain nombre ont une origine infectieuse. Ce sont les diverses entérites ; particulièrement fréquentes et sévères chez le nourrisson et le jeune enfant, elles entraînent une diarrhée* aiguë. Certaines ont leur point de départ dans l’intestin grêle, colonisé par un germe microbien virulent, exclusif ou prédominant. D’autres associent une infection colique, réalisant des entérocolites infectieuses aiguës. Le germe responsable est parfois identifié par des coprocultures (cultures des selles). La plupart régressent par absorption d’antiseptiques intestinaux. Une place à part doit être faite à deux affections citées par ailleurs : le choléra*, qui s’accompagne de signes majeurs de déshydratation, et la fièvre typhoïde*, dont les aspects actuels sont volontiers trompeurs et qui peut encore donner lieu à des complications sévères.

• Certains parasites ont pour siège électif l’intestin grêle : beaucoup sont des vers* (ascaris, anguillules, ankylostomes...), d’autres sont des flagellés, notamment des lamblias (Giardia intestinalis), souvent bien tolérés, mais qui semblent pouvoir, lorsqu’ils sont en très grand nombre, être responsables de malabsorptions.

• Les malabsorptions atteignent des degrés divers. C’est pourquoi leur fréquence exacte est difficile à définir. Elles déterminent une diarrhée, mais rarement des émissions très fréquentes et très liquides : elles se manifestent plutôt par une augmentation progressive du volume des selles, qui atteignent le nombre de 3 ou 4 par 24 heures, qui deviennent pâteuses plus que liquides, mais dont le poids quotidien dépasse 300 g. Quand on analyse ces selles, on y trouve des nutriments abondants, notamment des protides et des graisses, ce qui explique que l’amaigrissement progressif soit un symptôme significatif de ces affections. Il faut distinguer d’ailleurs, dans ces diarrhées dites « métaboliques », celles qui sont dues à une maldigestion, c’est-à-dire à une mauvaise dégradation des aliments par les divers sucs digestifs, empêchant une muqueuse de grêle normale de remplir ses fonctions d’absorption, car les constituants du chyme intestinal n’ont pas acquis la qualité nécessaire à leur captation par la paroi du tube, et les malabsorptions proprement dites, qui sont dues à l’impossibilité pour le grêle de faire passer dans la circulation générale des nutriments pourtant correctement dégradés et théoriquement aisément assimilables. C’est seulement dans cette seconde hypothèse que le grêle est réellement malade, et nous n’envisagerons donc ici que les malabsorptions.
1. Certaines sont dues à des anomalies de la muqueuse de l’intestin grêle. Presque toutes paraissent liées à un ou plusieurs déficits enzymatiques. Une partie apparaît congénitale, l’autre acquise. La grande majorité est définitive et a pour conséquence un régime diététique à vie. La plus typique de ces malabsorptions est la « sprue nostras », ou maladie cœliaque, due à une intolérance à la gliadine contenue dans le gluten. Elle entraîne une diarrhée et un amaigrissement important, des troubles de croissance chez l’enfant.
Quand on effectue, à l’aide d’une sonde, une biopsie d’un fragment de muqueuse jéjunale, on se rend compte qu’il existe une atrophie villositaire. La muqueuse est diminuée de hauteur ; les villosités sont raréfiées, de base élargie, courtes et trapues. Il faut instituer un régime sans gluten, c’est-à-dire excluant tous les dérivés des céréales, à l’exception du maïs. Cela suppose d’exclure de l’alimentation tous les mets préparés et la plupart des conserves, dans lesquelles sont ajoutées de petites quantités de farine. Or, il suffit souvent de la moindre quantité de gluten pour entraîner une rechute de la maladie. Sinon, sous régime strict, la diarrhée s’efface, le poids augmente, et, fait remarquable, la muqueuse reprend un aspect normal. On assiste à une véritable « repousse » des villosités. À côté de cette intolérance au gluten, il existe de nombreux déficits enzymatiques qui ont pour effet de déclencher une diarrhée lorsque l’aliment cible est ingéré. La plus courante de ces intolérances est celle au lactose par un déficit en lactase. L’ingestion de lait, de dérivés du lait ou de lactose entraîne une diarrhée qui apparaît dans les deux heures qui suivent l’ingestion du produit. La seule attitude thérapeutique consiste à exclure de l’alimentation le lait et les produits à base de lactose.
2. Dans certains cas, la malabsorption s’accompagne d’une muqueuse normale ou presque normale ; c’est par contre la sous-muqueuse qui est pathologique. Cela s’observe dans la maladie de Whipple, dont le tableau clinique rappelle celui de la sprue. La biopsie de l’intestin grêle permet le diagnostic en montrant un important infiltrat inflammatoire du chorion contenant des germes dénommés coryné-bactéries. La responsabilité de ces germes à l’origine de l’affection a été discutée. Toujours est-il que le traitement antibiotique a une action constante et remarquable sur la malabsorption. Les villosités sont souvent anormales et courtes avant le traitement. Là encore, elles reprennent un aspect normal après cure antibiotique. Les anomalies sous-muqueuses se voient aussi dans les affections lymphatiques. Il existe dans le chorion des lacs lymphatiques distendus, ou encore une infiltration lymphoïde diffuse comme dans les lymphomes et d’autres affections hématologiques. Là, la muqueuse est souvent normale, mais le transfert des nutriments vers la circulation se heurte à un barrage sous-muqueux. Bien plus, c’est parfois la muqueuse qui rejette des substances nobles, et notamment des protides, dans la lumière intestinale, réalisant alors une « entéropathie exsudative ».
3. Enfin, signalons que certaines malabsorptions ne mettent pas en cause l’intestin grêle par lui-même, mais son drainage vasculaire, comme dans quelques cas de grande insuffisance cardiaque ou dans les blocages lymphatiques.