Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
I

information

Le terme information peut désigner ou bien un élément particulier de connaissance ou de jugement, ou bien l’ensemble des institutions qui, dans une société donnée, président à la diffusion collective des nouvelles.


Généralités


Les différents usages du terme « information »

On emploie ce terme en des sens multiples. On parle d’une information de politique étrangère, de la politique française de l’information, du besoin d’information du citoyen. Il faut avouer que l’on désespère parfois de trouver l’unité de ces divers emplois. Pour éviter de choisir arbitrairement l’une ou l’autre des significations possibles du terme d’information, il convient, semble-t-il, de fixer l’attention sur deux équivoques.

La première équivoque tient au fait que le même mot désigne à la fois un contenu et la façon dont ce contenu peut être transmis. Dans une première acception, l’information désigne en effet un élément particulier de connaissance ou de jugement accessible à quiconque, sous quelque forme que ce soit. Le terme est pris ici au sens de « nouvelle ». Il est indifférent à son mode de transmission et de diffusion et ne se caractérise que secondairement par son degré d’intelligibilité. Mais l’information, dans une seconde acception, tout aussi courante que la première, c’est aussi l’ensemble des équipements qui, à un moment donné et dans une société donnée, permettent la diffusion, selon une technique industrielle, de ces divers éléments de connaissance et de jugement. L’information est un mode de traitement et de diffusion : la presse, la radio et la télévision. Ainsi compris, le mot désigne ce que les Anglo-Saxons ont coutume d’appeler les « mass media », et ce que nous baptiserons pour notre part les entreprises de diffusion, expression moins ambiguë que celle de communication* de masse. Les techniques modernes de diffusion, celles de l’imprimé et celles qui assurent la retransmission du son et de l’image, sont en effet mises en place par des entreprises dont l’expansion a parti lié avec le phénomène industriel. Grâce à elles, l’information est désormais diffusée au plus grand nombre, selon une technique proprement industrielle.

Bien qu’ils soient distincts, ces deux premiers sens du mot sont connexes. Les informations définies comme des éléments de connaissance ou des nouvelles sont modelées d’une certaine manière par les techniques qui leur permettent une diffusion plus ou moins large. Bien plus, elles subissent un certain traitement ou un certain laminage, et on se prend parfois à imaginer que, sans ces techniques, elles n’existeraient pas. L’information moderne est indissolublement fond et forme, contenu et mode d’expression et de transmission du contenu.

La seconde équivoque résulte du fait que le même mot désigne d’un côté une réalité sociale, celle que constituent ensemble la presse écrite, la radiodiffusion, la télévision et le cinéma, et de l’autre l’ensemble des attitudes et des convictions collectives que cette réalité entraîne. L’information, c’est à première vue cette réalité faite de ces institutions que nous avons choisi d’appeler les entreprises de diffusion. Mais c’est aussi l’expression d’un besoin collectif qui, à l’instar des autres besoins « de dépassement », devient irrépressible au fur et à mesure qu’il se trouve satisfait. Et c’est enfin une exigence collective, plus ou moins tenue pour légitime par les diverses doctrines et idéologies politiques. Facteur de transformation de la société par elle-même, l’information figure au nombre des finalités collectives qui s’offrent au débat politique et à la discussion philosophique. Au demeurant, l’évolution accélérée de ses techniques de diffusion rend plus urgente encore la réflexion sur sa fin ultime. Il s’agit de déterminer quels pourront être les objectifs assignés à l’information. En d’autres termes, il convient de préciser pour chaque époque et en chaque lieu l’usage que les politiques devront faire des techniques mises à leur disposition. Ainsi, la télévision, moyen de diffusion collective, ne sert pas l’information de la même façon selon les régimes politiques. En outre, on peut déjà être assuré que les diverses sociétés ne feront pas un usage identique des techniques nouvelles des vidéo-cassettes ou des satellites de télécommunication. L’information est donc un fait social complexe. Elle consiste en cette réalité faite à la fois de certains éléments de connaissance ou de culture et d’un certain état de la technologie de la diffusion collective. De surcroît, elle exprime la volonté des sociétés de se transformer elles-mêmes.

L’information est ainsi ancrée de trois manières dans une société.

En premier lieu, elle influence ce que l’on pourrait appeler le décor culturel de la société, c’est-à-dire l’ensemble de ses idées reçues, acceptées et vulgarisées cependant que celles-ci ne manquent pas de l’influencer à son tour.

Ensuite, l’information dépend à un moment donné du développement de la technologie de la diffusion : à cet égard, l’ère industrielle a débuté avec la grande presse des dernières années du xixe s. et se prolonge aujourd’hui avec l’expansion de la radiodiffusion et de la télévision.

Enfin, l’information exprime une volonté de nature proprement politique : elle consiste à déterminer, en fonction de certains objectifs considérés comme légitimes, d’une part la nature des messages à transmettre par les diverses techniques de diffusion et d’autre part l’organisation des rapports entre ceux qui réalisent ces messages, ceux auxquels ils sont destinés, c’est-à-dire les différents publics, et ceux qui ont, d’une manière ou d’une autre, la responsabilité des entreprises de diffusion.


L’information à l’épreuve des nouvelles techniques de diffusion

Le fait radicalement nouveau des sociétés modernes réside dans leur aptitude à diffuser l’information ou la culture à des publics très nombreux. Dès la fin du xixe s., les plus grands quotidiens anglais atteignaient déjà des tirages de plus d’un million d’exemplaires. Aujourd’hui, la radiodiffusion et la télévision rassemblent quotidiennement des dizaines de millions d’auditeurs ou de téléspectateurs. À en croire Jean Cazeneuve, l’expansion des nouveaux moyens de diffusion a présidé à l’expansion d’une véritable « société de l’ubiquité ». Le sociologue canadien Marshall McLuhan estime quant à lui que des sociétés autrefois étrangères les unes aux autres retrouvent aujourd’hui, grâce aux media électriques et électroniques, la chaleur des relations sociales caractéristiques des tribus primitives. À ce signe, l’humanité de ce siècle serait en passe de redevenir ce qu’il nomme un « village global ».