Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
I

Inde (suite)

Caractères généraux de l’art indien

Sous toutes ses formes, l’art tient une place considérable dans les préoccupations religieuses de l’Inde. Il n’a jamais été maintenu à l’écart de tous contacts extérieurs, et l’on a pu dire que, si l’art indien devait beaucoup à l’Occident, il avait presque transmis autant à l’Orient. En effet, les influences occidentales dont témoignent déjà ses premières manifestations connues se renouvelleront sans cesse au cours des siècles : mésopotamiennes, iraniennes, hellénistiques, romaines, islamiques... Il n’est pas jusqu’à la période coloniale qui n’ait marqué l’art indien de son empreinte. Mais toujours et très naturellement, les influences ont été vite assimilées, et si totalement qu’elles ont abouti à la naissance des thèmes les plus authentiquement indiens. À son tour, par la route de la soie aussi bien que par la voie maritime, l’art indien a rayonné, d’une manière plus ou moins sensible et durable, sur les contrées orientales : Chine et Japon d’une part, grâce à la propagation du bouddhisme* ; Asie du Sud-Est et Insulinde d’autre part, dans le cadre d’une expansion culturelle qui, concrétisée dès les premiers siècles de l’ère chrétienne, a favorisé l’épanouissement d’écoles (spécialement au Cambodge* et en Indonésie*), témoignant surtout, et de la façon la plus éclatante, du génie local. L’originalité la plus profonde de l’art indien réside peut-être dans ce fait, exceptionnel, que les cadres rigides imposés par une constante soumission à des règles très strictes et le refus de toute personnalisation des œuvres n’ont pas plus interdit l’épanouissement d’écoles fortement individualisées que la manifestation d’une authentique liberté d’interprétation.

Pour l’Inde, en dépit de la valeur esthétique de tant d’œuvres et de leur caractère narratif si souvent affirmé, la création artistique n’est pas plus la manifestation d’une originalité individuelle que l’expression d’une volonté d’interpréter ou d’imiter la nature. Quelle qu’elle soit, objet de parure, décor architectural, statue, édifice, l’œuvre d’art n’a pas de fin en soi. Devant, avant tout, répondre à un objet soigneusement défini et participer à l’ordre universel, sa réalisation impose toujours le respect de tout un ensemble de prescriptions soigneusement édictées qui n’ont d’autre but que de garantir la conformité de l’œuvre avec son objet. Dans un monde ordonné, qui ne saurait se concevoir que dans l’harmonie et l’équilibre, l’œuvre d’art ne peut être tenue en marge du système cosmologique. Cette notion d’art, expression d’une réalité divine, d’œuvres indispensables à l’accomplissement des rites, trouve son origine dans le védisme. Elle justifie l’importance des śāstra (sciences, instructions), consacrés aux divers arts et considérés comme d’inspiration divine ou mythique. Ces traités plus ou moins étendus, comme les chapitres dédiés à l’art dans nombre de textes religieux, donnent, sous une forme généralement versifiée, des règles pratiques concernant tel ou tel art et précisent les rites que les divers exécutants sont tenus d’observer.

Glossaire des arts de l’Inde ancienne

āsana, fait ou manière de s’asseoir ; siège, place.

asura, classe de démons ennemis des dieux.

avatāra, descente, incarnation divine, spécialem. de Viṣṇu.

bodhisattva, être sur la voie du complet Eveil (Bodhi).

caitya (ou chaitya), objet, lieu vénéré, édifice abritant un objet vénéré et, par extens., sorte de monument funéraire.

cakra, roue, disque ; dharmacakra, roue de la loi (spécialem. bouddhique).

cakravartin, monarque universel.

deva, être céleste, dieu.

devī, déesse, spécialem. Durgā.

dvāra, porte.

dvārapāla ou dvārapālaka, personnage figuré comme gardien de porte.

gavakṣa, ou kuḍu, motif d’architecture, ouverture en forme de fer à cheval ou circulaire.

gopura, porte de ville ou de temple, monumentale.

hasta, main, coudée, geste de la main (iconographie).

Jina, vainqueur, le ou l’un des Bouddha ; aussi un des saints du jinisme (jaïnisme).

Kailāsa, nom d’une montagne, résidence de Śiva.

kīrti, gloire.

kīrtimukha, masque de monstre (art décoratif).

lakṣaṇa, marque, signe distinctif favorable.

liṅga, marque, emblème, phallus, spécialem. de Śiva (divinisé).

maṇḍala, cercle, groupe, disposition ésotérique.

maṇḍapa, pavillon, salle en avant d’un sanctuaire.

Meru, montagne fabuleuse au centre de la surface terrestre, séjour d’Indra.

mudrā, sceau, marque, geste des mains et des doigts de signification mystique (bouddhisme mahāyānique).

mūrti, matière, forme personnifiée (d’une divinité).

nāga, serpent, être semi-divin plus ou moins ophiomorphe.

nagara, ville, cité (on dit aussi pura, purī).

naṭa, danseur.

naṭarāja, roi des danseurs, aspect de Śiva.

padma, lotus, spécialem. rose (utpala = lotus bleu).

paṭa, étoffe, spécialem. peinte ou couverte d’inscriptions.

pīṭha, siège, trône, piédestal.

prāsāda, palais, temple, tour et, par extens., sanctuaire.

pūjā, adoration, rite journalier devant une idole.

pūrṇa, plein, comblé.

pūrṇaghaṭa, pūrṇakumbha, vase d’abondance.

rākṣasa, démon, généralement malveillant (fém. : rākṣasī).

ratha, char, spécialem. de guerre, édifice.

śakti, énergie d’un dieu sous son aspect féminin et, par extens., épouse d’un dieu.

śāstra, loi, enseignement, théorie.

śilpaśāstra, traité d’art, d’architecture (on dit aussi vāstuvidya, architecture).

śikhara, pointe, tour, sanctuaire d’un type particulier.

siṃha, lion ; narasiṃha : homme lion, spécialem. avatāra de Viṣṇu.

stūpa, monument en forme de dôme abritant des reliques du Bouddha ou de religieux éminents, aussi commémoratif.

tāṇḍava, danse, notamment de Śiva (108 modes définis).

tantra, doctrine, spécialem. magique et mystique (tantrisme).

Tīrthaṅkara, « Celui qui assure la traversée, le salut », titre particulier des Jina (jinisme).

toraṇa, arc, porche, portail.

tribhaṅga, « triple flexion », attitude caractéristique.

uṣṇīṣạ, turban, protubérance crânienne du Bouddha.

vāhana, véhicule, monture, spécialem. d’une divinité.

vihāra, monastère bouddhique ou jaina.

vimāna, char, palais, sanctuaire d’un type particulier.

yakṣa, êtres surnaturels, plutôt favorables (fém. : yakṣī, yakṣīṇī).

yantra, instrument, amulette, figure magique.

yoga, système philosophique et pratique religieuse.

yogin, adepte du yoga, ascète pratiquant le yoga.