Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
I

immunologie (suite)

L’induction d’une réaction d’hypersensibilité retardée, plutôt que d’une réaction humorale, dépend de plusieurs facteurs.
1. La plupart des antigènes provoquent simultanément les deux types de réponse, mais certains stimulent surtout l’immunité cellulaire : le cas du Bacille de Koch est bien connu puisqu’il est à la base de la réaction cutanée à la tuberculine.
2. La présentation de l’antigène est également importante, et l’on utilise chez l’animal des adjuvants. La voie de pénétration a un rôle prépondérant : l’injection intradermique favorise l’apparition d’une hypersensibilité retardée. L’antigène arrive ainsi facilement au niveau du ganglion lymphatique drainant le point d’injection.
3. Il vient ainsi, après avoir été éventuellement phagocyté, au contact d’un lymphocyte thymo-dépendant (les réactions d’hypersensibilité retardée disparaissent après thymectomie néonatale). Le rôle du lymphocyte est attesté par le fait que la transmission de l’hypersensibilité retardée à un animal neuf ne peut se faire que par les cellules sensibilisées et non par le sérum ; d’ailleurs, ces réactions persistent chez les sujets agammaglobulinémiques (n’ayant pas de gammaglobulines), qui ne fabriquent pas d’anticorps.

Le lymphocyte reconnaîtrait l’antigène à l’endroit de sites de reconnaissance situés au niveau de sa membrane et analogues au fragment Fab des immunoglobulines. Le fait important est que le lymphocyte sensibilisé, au contact de l’antigène spécifique, se modifie en augmentant de volume, son noyau devient volumineux, nucléole, et les synthèses protéiques sont accrues. Cette transformation lymphoblastique a donné lieu à un test important utilisé en médecine : si les lymphocytes d’un sujet ont été effectivement sensibilisés à un antigène que l’on suspecte d’être en cause, ils vont se transformer lorsqu’on les met en présence de cet antigène.

Un deuxième fait important est la sécrétion par le lymphocyte d’un facteur de transfert individualisé en 1959 et qui est capable à lui seul de transmettre l’hypersensibilité retardée d’un sujet sensibilisé à un sujet qui ne l’est pas.

Enfin, le lymphocyte sensibilisé à un antigène élabore plusieurs substances diffusibles, dont le MIF (Migration Inhibiting Factor), qui est à la base d’un test d’hypersensibilité retardée in vitro : le test d’inhibition de la migration des macrophages.

De plus, les lymphocytes peuvent devenir cytotoxiques : cela signifie que les lymphocytes d’un animal immunisé, par exemple par des cellules tumorales, sont capables de les détruire in vitro et in vivo en dehors de la présence de tout anticorps.

L’importance des phénomènes d’hypersensibilité retardée est considérable, puisque celle-ci intervient non seulement dans les infections tuberculeuses, streptococciques, brucelliennes, lépreuses, etc., mais aussi au cours de certaines infections virales (variole), parasitaires et surtout au cours des maladies « auto-immunes » et du rejet des homogreffes.


L’hypersensibilité immédiate

Il s’agit d’un état particulier induit chez un animal ou chez l’Homme par la réintroduction d’une substance étrangère, le plus souvent une protéine. Cette substance est absolument inoffensive lors de la première injection ; elle entraîne cependant la production d’anticorps spécifiques qui se fixent sur les tissus au niveau de cellules, notamment les mastocytes, et sur les plaquettes. Lors de la réintroduction de l’antigène, toujours à de très faibles doses qui auraient dû être inoffensives, il se produit une réaction générale ou locale due à la libération par ces cellules de substances toxiques ainsi que d’aminés actives.

Le type de la réaction générale est le choc anaphylactique (v. allergie), qui est souvent mortel en quelques minutes dans les cas les plus graves. Le tableau observé est dû à une vasodilatation intense, avec hypotension et hypothermie, et à des troubles respiratoires. L’anaphylaxie peut être transmise à un autre animal par l’injection du sérum provenant d’un animal sensibilisé. Les réactions d’anaphylaxie permettent de détecter de très faibles doses d’antigène.

L’hypersensibilité rapide de type Arthus est réalisée chez l’animal par des injections répétées d’antigène par voie sous-cutanée ; elle aboutit à une nécrose locale. Le phénomène d’Arthus est dû à la production de complexes antigène-anticorps circulants, non fixés sur les tissus, et qui se développent sur les parois des petits vaisseaux. Ces complexes fixent le complément, dont les divers composants sont activés et entraînent des lésions tissulaires. Ces phénomènes sont très étudiés aujourd’hui, car ils sont observés chez l’Homme non seulement lors de la maladie sérique (due à l’injection répétée d’anatoxines lors d’une sérothérapie), mais probablement aussi dans de nombreuses maladies telles que certaines glomérulopathies (v. rein) ou collagénoses (v. conjonctif [tissu]) ; ainsi est né un nouveau chapitre, celui de la pathologie des complexes immuns.

L’allergie humorale enfin semble être due à des anticorps réaginiques non précipitants, de la classe des IgE, fixés sur certains tissus. Le contact avec l’antigène entraîne les manifestations aiguës : bronchospasme, vasodilatation, œdème de certaines muqueuses, par libération de substances telles que l’histamine.


La tolérance immunologique ou immunitaire

Cet état est caractérisé par l’absence de réaction immunologique après l’introduction de l’antigène. La tolérance existe à l’état physiologique durant la vie fœtale et disparaît plus ou moins rapidement à la période néo-natale selon les espèces. Tous les antigènes qui n’auront pas été en contact avec les cellules immunologiquement compétentes à cette période seront considérés comme étrangers à l’organisme, et leur réintroduction ultérieure entraîne une réaction immunologique.

Le point de départ de cette découverte a été le fait que les veaux jumeaux hétérozygotes mais ayant le même placenta gardent toute leur vie deux populations différentes de globules rouges : les leurs et ceux de l’autre jumeau (il s’agit de faux jumeaux). En effet, à la période fœtale, les deux circulations communiquent, et le fœtus devient tolérant aux antigènes des globules rouges de l’autre.

La tolérance immunitaire est un phénomène général ; elle peut être obtenue par l’injection d’antigènes solubles aussi bien que d’antigènes figurés tels que des microbes ou des cellules, normales ou cancéreuses.