Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
H

Honshū (suite)

La région occupe de fait une situation exceptionnelle, s’ouvrant à l’extérieur sur trois mers, à l’intérieur sur des plaines disposées en chapelet et reliées entre elles : du lac Biwa (le plus vaste lac du Japon : 674 km2), de Kyōto, de Nara et d’Ōsaka, cette dernière bordant elle-même la mer Intérieure. Deux massifs montagneux limitent ces plaines au nord et au sud : les monts de Tamba, hauteurs moyennes très boisées, au nord, et la presqu’île de Kii, plus massive, au sud. Alors que les monts de Tamba appartiennent à la zone interne du Japon et n’offrent ainsi que des granites et des sédiments primaires plusieurs fois aplanis et très disséqués, la région de Kii, qui relève de la zone externe, montre de nets alignements structuraux de matériaux divers, culminant à 1 915 m. De grandes vallées séparent ces échines suivant les lignes de fracture ou recoupent les directions structurales par des captures (Totsugawa).

Le climat offre les mêmes moyennes thermiques et pluviométriques que celui du Kantō (Kyōto n’est, en latitude, que de 50 km plus méridionale que Tōkyō) ; seule la côte orientale de Kii est très arrosée (3 000 mm localement) et visitée par les typhons. Le climat de Kyōto est l’un des plus continentaux du Japon, car la ville est la seule métropole qui ne soit pas sur le rivage, tandis qu’à 50 km de là Ōsaka s’enveloppe continûment dans un voile de brume, dû largement aux fumées de ses usines. Sur la mer du Japon, la neige tombe en abondance, alors que le littoral de Kii est exceptionnellement doux. Le milieu naturel offre ainsi un vif contraste entre les deux massifs montagneux, d’une part, de climat plus humide, aux pentes abruptes et très boisées, très fermés sur eux-mêmes, et la plaine axiale, d’autre part, très tôt défrichée, aux calmes paysages dégagés. Ce contraste se poursuit dans la répartition du peuplement, et la densité de la région (proche de 500 en moyenne, la plus élevée du pays après le Kantō et près du double de la moyenne nationale) varie grandement entre les massifs, faiblement peuplés, et la plaine centrale, où se trouve la seconde conurbation du pays, formée de Kyōto, d’Ōsaka et de Kōbe. De même s’opposent les genres de vie de ces hauteurs, restés fidèles à maint archaïsme, où l’exploitation forestière s’associe à une polyculture largement autoconsommatrice et où se perpétue un artisanat ancien (travail du bois, papier, tissage) et rustique, aux modes d’activité modernes et variés de la plaine.

Celle-ci se ramifie pour former le bassin du Yamato, que les monts Ikoma (642 m) séparent de la plaine d’Ōsaka. En dépit de la poussée rapide de l’urbanisation, qui sème d’usines et d’immeubles résidentiels tous ces terroirs, la vie rurale se maintient, encouragée par la proximité d’un marché de 10 millions de citadins. Occupées très anciennement, quadrillées encore des canaux et des digues du vieux système de partage du sol « jori » (viie s.), ces campagnes sont couvertes de rizières alternant en hiver avec des cultures sèches. D’innombrables étangs ont été creusés depuis des siècles, dont l’eau est lâchée au moment du repiquage. De belles maisons rurales se groupent en villages massifs et reflètent leurs hauts pignons de chaume dans les douves qui les cernent encore parfois. Aux environs de Kyōto, mandariniers et surtout théiers (Uji) couvrent de notables superficies. Aux approches des villes, c’est-à-dire en tous lieux, les cultures maraîchères et florales occupent une place considérable, sous abri de matière plastique généralement, tandis que l’élevage apparaît sur les plateaux voisins, moins développé, toutefois, que dans la région du Chūgoku.

Les côtes, rocheuses et découpées, de la région de Kii entretiennent de nombreuses communautés de pêcheurs traditionnels et, localement (baie d’Ago), se prêtent à l’élevage des huîtres perlières. Dans la baie de Wakasa (mer du Japon), même alternance des activités traditionnelles et du tourisme. Sur la baie d’Ōsaka, au contraire, l’industrie lourde a conquis presque tout le rivage. Une des fonctions essentielles de la région a toujours été la circulation. Par le couloir Kyōto-Ōsaka passent toutes les voies ferrées et routières unissant les rivages nord-ouest (Niigata-Kanazawa) et sud-est (Tōkyō-Nagoya) à l’ouest du pays ; ce grand axe de communication traverse ainsi de part en part la conurbation (v. Kyōto, Ōsaka, Kōbe).


Le Chūgoku

Il termine au sud-ouest Honshū. Allongé sur 450 km depuis Kōbe jusqu’au détroit de Shimonoseki (31 678 km2, 7 560 000 hab.), il est formé d’une longue échine montagneuse, suite de bombements intensément disséqués par des vallées fidèles aux lignes de faille. Le volcanisme est presque absent, et d’épaisses couches de calcaire y donnent localement (Yamaguchi) les plus beaux paysages karstiques de l’archipel. Les sommets ne dépassent nulle part 1 500 m. Les bassins sont très rares (Yamaguchi, Tsuyama).

Alors que le Kinki groupe au centre sa population et ses richesses, le Chūgoku les concentre au contraire sur sa périphérie. La double exposition au nord vers la mer du Japon et au sud sur la mer Intérieure divise en effet le Chūgoku en deux régions longitudinales adossées à la chaîne axiale et dont le contraste est aussi vif que celui qui oppose dans le Chūbu le Tōkai et le Hokuriku. Ce dernier se poursuit ici par le long rivage du Sanin, déroulant sur près de 500 km ses courtes plaines et ses falaises morcelées au large en îles nombreuses. Un isolement presque total, l’émiettement en petites communautés rurales ou de pêcheurs, très traditionnelles, en font une des régions les plus attardées du Japon. Seule la plaine d’Izumo, un des foyers de peuplement protohistoriques de l’archipel, porte de belles cultures, où s’égaillent des maisons rurales, chacune dans un bosquet qui la dissimule entièrement et l’abrite des rafales de la mousson hivernale. La neige visite en effet deux mois par an ce littoral et y empêche généralement la seconde récolte annuelle. Les villes sont des marchés ruraux et des centres administratifs (Tottori, Matsue), et ne dépassent pas 150 000 habitants. Yonago a toutefois une grande usine de pulpe.