Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
H

Hongrie (suite)

Les indices de progression du niveau de vie, par rapport à ceux des autres pays socialistes, témoignent de la volonté d’accroître le volume des biens de consommation et de passer du stade de la quantité à celui de la qualité. Le rythme de construction de logements est passé de 35 000 dans les années 1950 à plus de 60 000 annuellement depuis 1966, dont plus de 40 000 d’origine privée. Le taux moyen de motorisation, une voiture privée de tourisme pour moins de 100 habitants, est le plus élevé des pays socialistes après la République démocratique allemande et la Yougoslavie.

On estime que le revenu national par habitant est passé de 600 dollars au début des années 1960 à près de 1 000 en 1970 ; il se situe donc entre celui de l’Autriche et celui des États balkaniques.

La vocation internationale de la Hongrie

Longtemps considérée comme un petit pays, la Hongrie se distingue par l’exploitation des possibilités offertes par ses ressources et son ouverture vers l’extérieur, bien marquées dans cinq directions.

Le dynamisme des Hongrois à l’étranger

Il reste des minorités hongroises nombreuses dans les États voisins : un million et demi en Roumanie, notamment en Transylvanie du Nord, plus d’un demi-million en Yougoslavie (Banat, Vojvodine, qui constitue une « région autonome », Croatie), presque autant en Slovaquie, plusieurs dizaines de milliers en Autriche. Il faut y ajouter les 200 000 émigrés de 1956 (certains sont revenus au pays natal, mais la plupart se disséminent en Europe occidentale). L’Amérique du Nord compte plusieurs millions de descendants de Hongrois, émigrés au cours du xixe s. et de la première moitié du xxe s. Il y aurait, par la naissance, plus de 13 millions de Hongrois à l’étranger (c’est-à-dire plus qu’en Hongrie). Toutes ces communautés ont en général gardé l’usage de leur langue et de leurs coutumes et entretiennent des rapports familiaux avec les Hongrois de la mère patrie.

La Hongrie est le pays socialiste qui, après la Yougoslavie, autorise le plus largement ses ressortissants à voyager à l’extérieur : de 300 000 en 1960, le chiffre passe à un million en 1970, la majeure partie se rendant dans les pays voisins.

Le tourisme

Il se développe rapidement malgré des conditions locales moins favorables qu’en Roumanie ou en Yougoslavie. Le nombre de touristes étrangers passe de 240 000 en 1960 à plus de 3 millions en 1970, la majeure partie venant d’Allemagne orientale, de Pologne et de Tchécoslovaquie, mais plusieurs centaines de milliers de visiteurs apportent des devises fortes d’Europe occidentale. Les uns visitent Budapest, ville d’art et d’histoire, centre de grandes manifestations culturelles et artistiques ; les autres séjournent au bord du Balaton, la « mer hongroise », reliée à Budapest par une autoroute. D’autres passent plusieurs jours en transit vers les pays du Midi.

Le commerce extérieur

Il s’oriente dans des directions de plus en plus variées. Sans doute l’U. R. S. S. garde-t-elle une part importante, environ 35 p. 100, les autres pays du Comecon, 28 p. 100 (au premier rang l’Allemagne orientale). Mais 23 p. 100 sont réalisés avec le Marché commun (d’abord l’Allemagne occidentale, suivie de près par l’Italie), et 13 p. 100 avec le reste de l’Europe, notamment la Grande-Bretagne, l’Autriche, la Suisse, la Suède, et même l’Espagne et la Grèce. Enfin, les échanges s’accroissent avec les pays du tiers monde. La valeur totale du commerce extérieur est passée de 25 p. 100 à plus de 40 p. 100 du revenu national. Le solde est légèrement négatif ou positif selon les années. Plus du tiers des ventes se compose des machines et d’équipements ; près du quart, de denrées agricoles.

Les transports, intérieurs et internationaux

Ils sont les instruments d’un commerce extérieur diversifié. Le Danube et la Tisza (plus de 1 400 km navigables) assurent un trafic annuel de l’ordre de 3 Mt. La flotte hongroise occupe la quatrième place des flottes danubiennes. Budapest est l’un des cinq grands ports fluviaux et le siège de la Commission internationale du Danube, et on envisage d’y créer un port franc pour les marchandises qui transitent d’amont vers l’aval et vice versa. La Hongrie possède une petite flotte maritime exploitée par la compagnie MAHART, quelques navires de haute mer remontant jusqu’à Budapest depuis le delta du Danube. Elle utilise Trieste et surtout Rijeka (liée à Budapest par une voie ferrée rapide, et où le trafic hongrois de transit représente plus de 1 Mt). Le trafic ferroviaire entre pays du Nord, U. R. S. S. et États balkaniques est intense. C’est par la frontière commune avec l’U. R. S. S. que passent les grandes voies ferrées, les lignes à haute tension d’interconnexion électrique, l’oléoduc « Amitié » et le gazoduc « Fraternité ».

L’ouverture vers l’Occident

Elle se marque non seulement dans l’orientation géographique du commerce extérieur, mais aussi par l’ampleur de l’aide technique et financière offerte par de grandes firmes allemandes, italiennes ou françaises (Krupp, Fiat, Renault).

Ainsi, ce sont des sociétés françaises qui ont contribué à équiper des usines d’aluminium, l’entreprise de moteurs Diesel de Győr, le métro de Budapest.

En revanche, la Hongrie commence d’exercer un certain rayonnement dans les pays du tiers monde, par la vente de brevets, des prêts, la coopération technique. Elle se spécialise en direction du Moyen-Orient et de l’Asie méridionale dans le montage d’usines d’alumine, l’équipement minier, le bâtiment, les ouvrages d’hydraulique agricole.

Ainsi, l’action de la Hongrie dans le monde prend un nouveau visage. Pays d’économie « ouverte », elle rappelle, par l’importance accrue des ressources invisibles, notamment le tourisme, la Grèce et la Yougoslavie. Par sa position de transit entre nord et sud de l’Europe, par sa dépendance en énergie et matières premières, son absence de mer, mais aussi par la spécialisation de sa production légère et de valeur, elle évoque la Suisse. Cette position originale au sein du Comecon peut s’affirmer et se renforcer.

A. B.

➙ Budapest / Comecon / Danube / Europe.