Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
H

Hollande

Région occidentale des Pays-Bas*, partagée en deux provinces : Hollande-Septentrionale et Hollande-Méridionale. (V. Randstad Holland.)


Depuis le soulèvement du xvie s., la Hollande tend à être confondue avec l’ensemble de la nation néerlandaise, dont elle constitue la partie la plus importante.

Comté médiéval tardivement issu de la désintégration de l’Empire carolingien et des invasions normandes, la Hollande faisait partie de la Lotharingie, royaume annexé définitivement à l’Empire germanique en 925. Passant à la fin du Moyen Âge sous la domination des ducs de Bourgogne, puis sous celle des Habsbourg, le comté devint durant les xviie et xviiie s. l’une des provinces de la République néerlandaise. Sous la République batave (1795-1806), la province de Hollande, d’abord démembrée, forma finalement un département. Subdivisé, l’ancien département prêta son nom au royaume érigé en faveur de Louis Bonaparte (1806-1810). L’existence aux Pays-Bas de deux provinces hollandaises, l’une méridionale, l’autre septentrionale, prolonge la subdivision départementale inaugurée sous la domination française.


Le comté de Hollande


L’expansion territoriale (xe-xiiie s.)

À la fin du ixe s., le comte Gerulf († v. 889), ancêtre des comtes de Hollande, substitue en bordure de la mer du Nord son autorité à celle du dernier chef normand. Ses successeurs s’efforceront d’agrandir ce territoire : vers le nord aux dépens des Frisons, vers l’est au détriment de la principauté ecclésiastique d’Utrecht, vers le sud au préjudice de la Flandre.

Dans la lutte menée contre la prédominance des princes-évêques, le tournant se situe sous Thierry (Dirk) V (1061-1091), qui, le premier, aurait revendiqué formellement le titre de comte de Hollande. Le déclin d’Utrecht est lié à l’affaiblissement de l’influence impériale au cours du xiie s., symbolisé par le dépérissement de la fonction ducale en basse Lorraine. Lorsqu’en 1299 le comte de Hainaut Jean II d’Avesnes († 1304) recueille la succession hollandaise ; celle-ci s’étend de la Zélande à la Frise occidentale.

Le comté de Hollande participe largement au développement économique de l’Europe des xiie-xiiie s. La croissance démographique s’accompagne d’un remarquable essor de l’agriculture, marqué par la transition du régime domanial au régime seigneurial : l’affermage de la réserve permet la suppression du servage et l’atténuation des charges, tandis que la monnaie se substitue aux redevances en nature. L’émancipation rurale est conditionnée par la mise en exploitation de terres nouvelles — polders endigués et asséchés ou défrichements — et par un mouvement d’émigration massif vers l’est européen.


Les tendances centralisatrices (xive-xvie s.)

La dépression des xive-xve s., impitoyable dans les campagnes, épargne l’économie commerciale et artisanale hollandaise. L’industrie drapière, déclinante en Flandre et au Brabant, connaît un nouvel essor en Hollande. L’expansion maritime est spectaculaire ; l’importation de sel français et portugais stimule la pêcherie ; le blé balte assure le développement de la brasserie. Évinçant les Hanséates, les Hollandais s’approprient à partir du xve s. le commerce de fret entre la Baltique et l’Atlantique : ce commerce se révèle très fructueux.

À travers les conflits politiques et sociaux qu’entraîne le développement économique s’opère un accroissement du pouvoir comtal. Celui-ci s’appuie sur les nobles et annoblis ralliés au service du prince et sur la bourgeoisie artisanale, tandis que les états (réunis une première fois en 1305) sont dominés par la noblesse féodale et par le patriciat urbain. À mesure qu’augmente la dépendance financière du prince vis-à-vis des états, le conflit entre les privilégiés et le pouvoir central s’accentue. Chaque succession dynastique difficile provoque une crise ouverte. Les états de Hollande en 1362, les états généraux en 1477 tentent vainement de renverser le rapport des forces. Par contre, le soulèvement des états généraux en 1576 est décisif. Mais de la révolte naîtra l’indépendance, non l’équilibre des pouvoirs.


La province de Hollande


La souveraineté à l’encan

Passant dès 1572 à la résistance armée, les états de Hollande répugnent pourtant à se déclarer ouvertement en état de rébellion. En reconnaissant unilatéralement Guillaume* le Taciturne, prince d’Orange, comme stathouder de Philippe II d’Espagne, ils entretiennent la fiction loyaliste. Il faudra la proscription du Taciturne pour qu’à leur tour ils proclament en 1581 la déchéance de Philippe II.

Cette réticence trahit la nature véritable du soulèvement : loin d’être dirigé contre le régime monarchique, ce soulèvement ne met en cause que la politique centralisatrice et intolérante de Philippe II. Il est d’ailleurs justifié par un recours à la tradition, même si cette référence à un passé idéalisé couvre en fait des ambitions politiques révolutionnaires.

À partir de 1581, les états proposent au plus offrant une souveraineté d’ailleurs strictement définie et très limitée. À la suite de deux expériences malheureuses, l’une avec le duc d’Anjou, l’autre avec le comte de Leicester, après le double refus de la France et de l’Angleterre, et suite à la mort prématurée du Taciturne, ils se résignent finalement à une vacance illimitée de la souveraineté. Sans que le régime républicain n’ait jamais été officiellement proclamé, ce sont eux qui, après 1587, assument la souveraineté.


Les rouages institutionnels

La composition des états de Hollande reflète, en l’accentuant, le déséquilibre économique et démographique entre villes et campagne. Bien que la préséance de la noblesse soit maintenue, celle-ci ne dispose que d’une voix unique, tandis que les dix-huit villes représentées disposent toutes du droit de vote.

Dans les villes, le pouvoir est monopolisé par quelques dizaines de régents, conseillers municipaux nommés à vie par cooptation. Issus d’un nombre toujours plus restreint de familles patriciennes retirées des affaires, ceux-ci tendent à former une caste oligarchique. Les bourgmestres et échevins, qui forment la magistrature urbaine, régulièrement renouvelés, sont choisis parmi les régents.