Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
H

Hei-long-kiang

En pinyin Heilongjiang, province de la Chine septentrionale ; 463 600 km2 ; 21 000 000 d’hab. Capit. Harbin.


La province occupe plus de 50 p. 100 du territoire de la Chine du Nord-Est (l’ancienne Mandchourie) et constitue le domaine le plus septentrional de l’espace chinois. Son peuplement relativement récent est essentiellement « Han » (Chinois proprement dits), mais l’existence d’une dizaine de « familles minoritaires » atteste le caractère longtemps marginal de cette Mandchourie septentrionale. Les principales minorités officiellement recensées sont les suivantes : Mandchous (630 000) dans les districts méridionaux ; Coréens (220 000) riziculteurs des vallées du Sud-Est ; Hui (Houei) [45 000] artisans et commerçants dans les villes ; Mongols (38 000) éleveurs des marges occidentales ; Dahours (23 000) éleveurs-agriculteurs dans le bassin du Nonni. Il existe encore quelques minorités de la famille Toungouse : Olunchun (éleveurs dans les Khingan) ; Owenk (chasseurs et pêcheurs du haut Heilongjiang [nom chinois du fleuve Amour]) ; Hochih (chasseurs et pêcheurs de l’Ossouri).

Cet immense territoire est constitué de moyennes montagnes et de vastes plaines se répartissant en quatre ensembles principaux. Au nord-ouest, le Petit Khingan, massif de roches cristallines d’une altitude moyenne de 600 à 800 m, s’étire sur plus de 500 km, prolongé à l’extrémité nord-ouest de la province par l’Ilkhouri-Aline (Yilehulishan), ensemble de collines et de plateaux basaltiques surmontés de nombreux petits cônes volcaniques. Les massifs de Mandchourie orientale se prolongent au sud-est de la province par deux ensembles principaux, dont les altitudes s’abaissent de 1 200 m à 600 m du sud vers le nord : Zhangguangcai (Tchang-Kouang-ts’ai) au sud, Wandashan (Wan-ta-chan) au nord-est. Les plaines de « Songnun » (Song-nouen) [Soungari-Nonni], le plus vaste ensemble de plaines de la Chine du Nord-Est, occupent le centre de la province à une altitude moyenne de 100 à 150 m. La plaine de Sanjiang (San-kiang) [confluence des trois cours d’eau, Heilongjiang, Soungari, et Ossouri] forme une vaste dépression mal drainée à moins de 50 m d’altitude qui s’ouvre à l’extrémité nord-est de la province, entre la retombée du Petit Khingan et les Wandashan.

Province limitrophe de la Sibérie, le Heilongjiang connaît un climat extrêmement contrasté. Les hivers sont très longs (6 à 8 mois) et particulièrement rigoureux. La moyenne de janvier est de – 20 °C dans le massif du Khingan ; l’embâcle paralyse les fleuves pendant 6 mois et au nord le sol reste constamment gelé en profondeur. L’été est toutefois très chaud (moyenne de juill., 20 à 24 °C), mais aussi pluvieux (60 à 70 p. 100 des précipitations annuelles, qui sont de 600 mm à l’est, de 400 mm à l’ouest, tombent de juillet à septembre) et assure ainsi une période végétative très favorable à l’agriculture, quoique très courte.

L’exploitation des forêts des Wandashan, et surtout du Petit Khingan, et la mise en culture des terres vierges des plaines, activement développées depuis 1949, font de la province un immense front pionnier.

Toute une série de « villes nouvelles », dont la principale est Yichun (Yi-tch’ouen) [300 000 hab.], sont nées au cœur des massifs forestiers. En 1957, le Heilongjiang produisait près de 30 p. 100 du bois d’œuvre (mélèzes, sapins, bouleaux) de l’ensemble de la Chine. On estime à près de 10 millions d’hectares les terres vierges (riches terres noires de prairie) cultivables des plaines de la province, désignées en Chine par « Beidahuang » (Pei-ta-houang) [le Grand Désert du Nord]. Plusieurs centaines de grandes fermes d’État en ont déjà défriché plus de 2 millions d’hectares.

Toute cette mise en valeur s’effectue par d’importants mouvements d’immigration en provenance de diverses régions de la Chine, en particulier de la Chine du Nord. Aussi le Heilongjiang connaît-il le taux d’accroissement démographique le plus élevé de l’ensemble des provinces chinoises : 11,9 millions d’habitants en 1953, 21 en 1967. Le soja (20 p. 100 des terres cultivées) et le maïs (21 p. 100) sont les principales cultures traditionnelles de la province, tandis que le blé de printemps et la betterave à sucre (70 p. 100 de la production chinoise) sont les deux grandes cultures pratiquées sur les terres nouvelles.

La province disposerait des plus importantes réserves de charbon à coke de l’ensemble de la Chine du Nord-Est. Trois bassins principaux, ouverts par les Japonais, puis activement exploités après 1950, fournissent l’essentiel de la production : de part et d’autre de la vallée du bas Soungari, Hegang (Ho-kang) [5 Mt en 1957] et Shuangyashan (Chouang-ya-chan) [2,3 Mt en 1957] ; Jixi (Ki-si) [5,8 Mt en 1957] dans les massifs orientaux. L’or, qui existe en placers dans les alluvions des vallées affluentes du Heilongjiang, est une ressource célèbre, la plus anciennement exploitée de la province. Aïgoun est le principal centre de production. En 1958, du pétrole était découvert dans la région qui s’étend au sud de Tsitsihar, et, en 1967, un millier de puits étaient en production, faisant de Daqing (Ta-k’ing) un des premiers bassins producteurs de la Chine.

L’urbanisation est ici un phénomène récent, né de la mise en place du réseau ferré par les Russes au début du xxe s., et elle a été considérablement développée depuis 1949 (doublement de la population urbaine totale entre 1949 et 1957) par suite de l’industrialisation de la province menée parallèlement à la mise en valeur agricole. À l’est, Jiamusi (Kia-mou-sseu) [110 000 hab. en 1941 et 250 000 en 1957] est devenue la métropole des plaines de Sanjiang, dont elle traite la production agricole. Reliée par voie ferrée aux bassins houillers de Hegang et Shuangyashan, elle en est le centre d’approvisionnement en produits alimentaires et en matériel mécanique. Mudanjiang (Moutan-kiang) [simple bourgade au début du siècle, 252 000 hab. en 1957] est le centre urbain des hautes terres orientales. La proximité de la centrale hydro-électrique du Jingpohu (King-p’o-hou) a facilité un remarquable développement industriel : à l’importante industrie du bois se sont ajoutés la carbochimie (charbon de Jixi), une usine de pneumatiques (fournissant l’usine automobile de Changchun [Tch’ang-tch’ouen]) et tout un ensemble d’industries métallurgiques (matériel agricole notamment). Tsitsihar (en pinyin Qiqihaer), métropole des plaines occidentales, a connu une évolution remarquable. Place forte au contact de la Mongolie créée en 1691, elle devint un actif centre de transports et de commercialisation des produits agricoles avec la construction du chemin de fer au début du xxe s. et constitue actuellement avec ses satellites une vaste municipalité urbaine de 600 000 habitants où plus de 200 usines nouvelles ont été implantées, et notamment une raffinerie de pétrole et une unité sidérurgique (dans la ville satellite de Fula’erji [Fou-la-eul-ts’i]).

Harbin (en pinyin Ha’erbin), capitale de la province (1 800 000 hab. en 1961) au cœur des plaines du Soungari, est une création russe du début du siècle. Elle est devenue une des grandes villes industrielles de la Chine.

P. T.

➙ Harbin.