Havane (La) (suite)
Au xviiie s., la ville participa à la prospérité sucrière, s’agrandit et s’embellit. En 1762, elle fut assiégée pendant 67 jours par une flotte anglaise de 250 bâtiments transportant 14 000 soldats et, faute de secours, elle capitula. Cet événement eut de grandes conséquences puisque, à partir de là, les Bourbons d’Espagne lancèrent leur grand programme de réformes militaires, administratives, commerciales, pour fortifier l’empire. La Havane était une clef stratégique et commerciale, l’Anvers des Caraïbes.
Cuba resta espagnole jusqu’en 1898, lorsque la guerre hispano-américaine éclata : le croiseur américain le Maine, envoyé par Washington, explosa accidentellement en rade de La Havane. Ce fut le prétexte de l’intervention.
À la fin de la domination de Machado, vers 1933. La Havane vit renaître les sociétés secrètes qui, tout au long du xixe s., avaient œuvré contre la domination espagnole, et il y eut des manifestations d’étudiants contre le tyran.
Entre 1952 et 1958, sous la domination de Batista, La Havane devint la capitale de la prostitution en Amérique latine, avec une population de 20 000 prostituées. Batista et ses amis mirent en place des gangs italo-américains qui firent du jeu une véritable industrie nationale : loterie, machines à sous, casinos, etc. Le tourisme américain et international fournissait le reste des revenus de cette ville qui croissait de façon explosive.
C’est à La Havane, le 21 novembre 1947, que se réunit la première conférence internationale sur le commerce et l’emploi ; la charte qui fut alors signée servit de base à l’Organisation internationale du commerce.
La Havane fut considérée par les révolutionnaires avec une grande méfiance. Est-ce parce qu’elle n’avait pas participé au combat contre Batista ? Cependant, bien des opposants y étaient morts dans les tourments, et la capitale avait fait un accueil fantastique aux barbudos en janvier 1959. Est-ce parce que la grève insurrectionnelle d’avril 1958 y avait échoué ? Mais elle avait échoué partout, et les réseaux urbains avaient bien travaillé. Les raisons sont plutôt socio-professionnelles : à la méfiance des castristes descendus de la « sierra » vis-à-vis de toutes les villes s’ajoute le grand problème légué par Batista. Usine à plaisirs, vivant du tourisme, La Havane participe avec enthousiasme au combat pour la moralisation, contre le vice, le jeu et la mendicité, mais elle est frappée économiquement dans ses classes moyennes, plus développées ici que partout ailleurs. Elle fournit donc proportionnellement le plus de candidats à l’émigration vers Miami. En 1968, les derniers commerces privés ont été nationalisés à La Havane, qui ressent moins que les campagnes le bénéfice matériel de la révolution.
J. M.
➙ Cuba.
J. H. Valdés, Historia de la isla de Cuba y en especial de La Habana (La Havane, 1964).