Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
G

Guerre mondiale (Seconde) ou Guerre de 1939-1945 (suite)

Guerre éclair aux Pays-Bas, en Belgique et en France

Le remplacement de Daladier par Reynaud à la tête du gouvernement français le 22 mars 1940 accentuait l’engagement de la France dans la guerre : le 28, elle signait avec l’Angleterre une déclaration où les deux nations s’interdisaient de conclure toute paix séparée.

Le 10 mai, la Wehrmacht déclenchait son offensive générale entre les Pays-Bas et le Luxembourg. Cinq semaines plus tard, après les dramatiques batailles de Sedan et de Dunkerque, les capitulations hollandaise et belge (v. France [campagne de]), l’avance des troupes allemandes posait au gouvernement français de redoutables problèmes politiques, au moment où, le 10 juin, l’Italie lui déclarait la guerre. Le 11, au Conseil suprême allié de Briare, le général Weygand*, soutenu par Pétain*, que Paul Reynaud a appelé le 18 mai dans son gouvernement, prend position en faveur d’un armistice, tandis que l’amiral Darlan* s’engage, vis-à-vis de Churchill, à ce que la flotte française ne tombe jamais au pouvoir de l’Allemagne. L’avance de la Wehrmacht se poursuit, et Reynaud, qui préconisait la continuation de la lutte en Afrique du Nord, démissionne le 16 juin. Appelé par le président Lebrun, Pétain lui succède comme chef du gouvernement et demande aussitôt l’armistice, signé le 22 juin à Rethondes avec l’Allemagne et le 24 à Rome avec l’Italie.

Les clauses de l’armistice, qui, jusqu’à sa libération en 1944, vont peser sur la France, sont particulièrement sévères. Son gouvernement perd en effet le contrôle des trois cinquièmes du territoire national, soit toute la région nord-est du pays, Paris, la Bretagne et une bande côtière allant jusqu’à la frontière espagnole, qui seront occupés par l’Allemagne. Il est convenu que les deux millions de prisonniers le resteront jusqu’à la paix, et que la France paiera l’entretien des troupes d’occupation allemandes. Elle conserve toutefois son empire colonial, sa marine (à peu près intacte), une armée de 100 000 hommes et une zone non occupée où, le 2 juillet, Pétain installe à Vichy son gouvernement.

Le jour même où le vieux maréchal demandait l’armistice, le 17 juin, le général de Gaulle, membre depuis le 5 juin du gouvernement de Paul Reynaud, ralliait Londres et proclamait le 18 juin son refus de l’armistice et son appel à continuer la lutte aux côtés de l’Angleterre. Tandis qu’ainsi naissait la France libre, Pétain recevait le 10 juillet de l’Assemblée nationale le pouvoir constituant et se proclamait chef de l’État (v. Vichy [gouvernement de]). Son autorité s’étendait sur l’ensemble de l’empire sauf l’Afrique-Equatoriale française, les établissements de l’Inde, Tahiti et la Nouvelle-Calédonie, qui, au cours de l’été, se ralliaient au général de Gaulle.


L’Angleterre seule

La soudaineté inattendue de l’effondrement français ne pouvait manquer de bouleverser les rapports franco-anglais. Malgré les assurances réitérées de Darlan, Churchill, dans sa crainte de voir les bâtiments français utilisés par l’Allemagne, n’hésite pas à attaquer, le 3 juillet, ceux de Mers el-Kébir (où 1 300 marins trouvent la mort) et, le 8 juillet, le cuirassé Richelieu à Dakar, provoquant ainsi la rupture des relations diplomatiques entre Vichy et Londres. Ce manque de sang-froid s’explique par l’isolement subit de la Grande-Bretagne, désormais seule en guerre contre une Allemagne qui apparaît invincible. Hitler, pourtant, espérait encore amener son adversaire à composition, et, le 19 juillet, il lui fait au Reichstag une ostentatoire offre de paix. C’était compter sans la résolution de Churchill, Premier ministre depuis le 10 mai, et du peuple britannique, qui ont accueilli à Londres, ainsi promue capitale de la résistance au nazisme, les gouvernements tchèque, norvégien, néerlandais, belge et polonais. De Gaulle, qui a échoué dans sa tentative de ralliement de Dakar à la France libre (23 sept.), constitue également à Londres, le 27 octobre, un Conseil de défense de l’empire français.

C’est alors que commence la fameuse bataille d’Angleterre, dont le succès eût sans doute consacré pour de longues années la victoire allemande. Occupant toutes les côtes de Narvik à Hendaye, Hitler était dans une position exceptionnelle pour conquérir l’Angleterre. L’offensive aérienne déclenchée le 10 août par la Luftwaffe sur la Grande-Bretagne se heurta toutefois à une telle réaction de la Royal Air Force (v. aviation) qu’à la mi-octobre Hitler renonçait à l’opération et par là même au débarquement qui devait la suivre.

Pour les Anglais, la menace la plus immédiate se trouvait ainsi écartée. Au cours de l’automne, sans renier de Gaulle ni le mouvement de la France libre. Churchill reprit secrètement contact avec Vichy. Les accords Chevalier-Halifax établirent un modus vivendi entre les deux pays : Pétain renonçait à reconquérir les territoires français ralliés à de Gaulle et renouvelait ses assurances sur la flotte, mais Churchill s’engageait à ne plus rien tenter contre les autres possessions françaises et à ne pas s’opposer aux relations maritimes entre celles-ci et la métropole.

L’effort de guerre britannique. En cette période dramatique, la chance de l’Angleterre est d’avoir eu à sa tête Winston Churchill, qui incarnera, durant ces six années, la résistance au nazisme. Excentrique, autoritaire, d’un courage indomptable, il est le chef incontesté de la stratégie comme de l’effort de guerre britannique, auquel le Commonwealth est directement associé (les Premiers ministres des dominions font partie du cabinet de guerre). Dans l’immédiat, c’est de soldats que la Grande-Bretagne a le plus besoin. En dehors de ceux qu’elle a rembarqués à Dunkerque, Churchill ne dispose que de 30 000 à 40 000 hommes en Afrique. Aussi l’apport des dominions, dont les armées sont en 1940 quasi inexistantes, sera-t-il essentiel. Malgré la tiédeur des Canadiens français, Mackenzie King parviendra à mobiliser au Canada tous les hommes de 21 à 24 ans. L’Australie et la Nouvelle-Zélande fourniront 5 divisions, qui arriveront juste à temps en Égypte à la fin de 1940. L’Afrique du Sud est, elle aussi, en guerre sous la conduite de Smuts, mais il est entendu que ses troupes ne serviront pas hors d’Afrique. En Inde, les partis nationalistes (Congrès et Ligue musulmane) cherchent à monnayer leur appui contre un statut de dominion. Le refus de Churchill freinera l’emploi de cet immense réservoir d’hommes. Huit divisions indiennes seront envoyées en Égypte à partir de février 1941, mais l’Angleterre devra laisser des troupes en Inde pour y maintenir l’ordre.