Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Grande-Bretagne (suite)

Les services tertiaires (santé, éducation, soins personnels, spectacles, emplois de bureau, professions libérales et scientifiques, commerce, etc.) emploient 51 p. 100 des travailleurs, proportion qui n’est dépassée dans le monde que par les États-Unis, la Suède, la Nouvelle-Zélande ; c’est l’indice d’une économie à haut niveau de développement et où les activités commerciales tiennent une grande place. Les transports et communications emploient en outre 6 p. 100 des travailleurs. L’industrie, de son côté, en retient 40 p. 100 (moins de 2 p. 100 dans les mines et carrières, le reste dans les activités de transformation). L’agriculture, les travaux forestiers et la pêche enfin n’absorbent ensemble que 3 p. 100 des travailleurs, proportion la plus faible du monde. Pays urbanisé, la Grande-Bretagne est, de façon massive, un pays de « cols blancs », les clerks, ou employés des services, et de « cols bleus », les travailleurs de l’industrie de transformation.

C’est aussi le pays du monde qui compte parmi ses travailleurs la plus forte proportion de salariés : 92 p. 100 en 1954, 93 p. 100 en 1960, 94 p. 100 en 1970. La concentration des entreprises, le rôle croissant que joue l’État dans la gestion quotidienne des industries et des services, l’accroissement des effectifs de la fonction publique ont eu pour conséquence une régression relative des secteurs où l’initiative individuelle reste la norme (agriculture, artisanat, petit commerce indépendant). Le commerce de distribution des denrées alimentaires, par exemple, est aux mains de puissantes sociétés propriétaires de boutiques de quartier et de magasins à grande surface ; les débits de boisson appartiennent souvent à de grandes brasseries ; 80 p. 100 de la production du pain sont assurés par quatre sociétés de boulangerie industrielle, etc. Certaines sociétés emploient une très nombreuse main-d’œuvre : Imperial Chemical Industries a 165 000 employés, Courtaulds 110 000, British Aircraft Corporation 130 000, Dunlop 110 000...

Urbanisme et aménagement du territoire

Le rapport Barlow sur l’aménagement du territoire, publié en 1940, fut suivi cinq ans plus tard du plan d’aménagement du grand Londres, élaboré par sir Patrick Abercrombie. Ces études constituaient les premiers fondements d’une politique cohérente d’organisation de l’espace. Décrivant les inconvénients sociaux et économiques de la concentration urbaine, elles préconisaient une décentralisation des activités industrielles et un aménagement des zones urbaines, et furent à l’origine de la création de deux ministères chargés du contrôle des plans d’aménagement des comtés et de la création des villes nouvelles. La loi sur les villes nouvelles (New Towns Act), votée en 1946, devait permettre la mise en œuvre de cette politique d’aménagement.

Au cours de la décennie suivante, trois types de développement furent envisagés : la construction de grands ensembles de logements (housing estates), l’extension des petites villes (Town Development Act, 1952) et la création des villes nouvelles. On distingue généralement plusieurs générations de villes nouvelles : les premières devaient permettre avant tout de décongestionner l’agglomération londonienne et d’arrêter la croissance des emplois. Les secondes, fondées à partir de 1950, furent conçues comme des pôles dynamiques destinés à favoriser le développement de régions économiquement faibles. L’hypothèse d’une stabilité démographique de l’agglomération londonienne ne s’étant pas vérifiée, une remise en cause de la politique d’aménagement aboutit à la création d’une Commission de planification. L’idée essentielle est que le problème d’aménagement est un problème global qui ne saurait se dissocier ni de l’espace ni entre divers secteurs de l’urbanisme (town planning). La recherche d’une politique globale s’est traduite par l’élaboration de trois programmes régionaux de grande envergure intéressant l’Écosse, le nord-est et le sud-est de l’Angleterre.

Le bilan des vingt dernières années est important : création de vingt et une villes nouvelles, protection de la nature couvrant 21 p. 100 du territoire (parcs nationaux, réserves naturelles, ceintures vertes, sites classés, etc.). Les quatorze villes nouvelles de la « première génération », presque totalement achevées aujourd’hui, et les sept autres créées après 1950 s’inspirent des deux villes construites au début du siècle par sir Ebenezer Howard (1850-1928), le créateur des « cités-jardins », qui écrivait : « Il y a en réalité non pas deux possibilités — la vie à la ville et la vie à la campagne —, mais une troisième solution dans laquelle tous les avantages de la vie de ville la plus active et toute la beauté et les délices de la campagne peuvent être combinés d’une manière parfaite. » La cité-jardin est conçue pour une population de 20 000 à 60 000 habitants. De faible densité, l’habitat est essentiellement fait de maisons individuelles (80 p. 100 environ). Une commission nommée par le ministère, et propre à chaque ville, est chargée d’acquérir les terrains et de diriger les travaux. Le financement est assuré par des prêts du Trésor de longue durée. L’achat des terrains se fait sur la base de leur valeur agricole, ce qui a permis de construire des logements très bon marché. Un système d’indemnités permet de verser une compensation aux propriétaires de terrains condamnés à rester zones agricoles, ce qui modère très nettement la spéculation foncière.

Chaque unité d’habitation est constituée d’ensembles homogènes par l’adoption d’un même procédé de construction ou d’une même caractéristique architecturale. Afin d’obtenir une certaine unité architecturale des centres, la conception et la construction des rues ont été très souvent confiées à un même architecte. La séparation de la circulation des voitures et des piétons a été adoptée dans la majorité des villes.

Si les villes nouvelles se révèlent un réel succès sur le plan de leur aménagement interne, elles n’ont cependant absorbé qu’une partie de la croissance démographique. Le phénomène de la conurbation londonnienne, dont l’extension est très difficile à maîtriser, et l’absence d’une politique de véritable régionalisation sont les points faibles de l’aménagement de la Grande-Bretagne, qui reste cependant très en avance, notamment sur le plan de l’équilibre écologique.

M. M. F.