Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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Grande-Bretagne (suite)

Il subsiste pourtant un blocage : la monarchie. Ce n’est pas tant qu’elle heurte de front les couches dirigeantes, même si l’attribution par Charles Ier de monopoles industriels et commerciaux provoque un profond mécontentement. C’est plutôt qu’elle leur refuse toute possibilité de faire entendre leur voix et leur marchande cette liberté qu’elles jugent nécessaire à leurs activités. C’est aussi qu’elle les inquiète par les demandes d’une fiscalité croissante et les indigne par une politique étrangère et religieuse contraire aux traditions anglaises. Les Stuarts* ont certainement eu des illusions sur la puissance de la monarchie par rapport au Parlement anglais, représentant les couches dirigeantes : ils n’ont pas compris que si Élisabeth avait évité les conflits graves, c’est qu’elle avait mené la politique à laquelle aspirait la gentry. Les Stuarts sont nourris de principes différents de ceux des Tudors : leur anglicanisme* est, au mieux, très high church, et n’est souvent que de façade, leurs sympathies réelles allant au catholicisme. Et cela les rapproche des puissances catholiques, l’Espagne d’abord, puis la France, qui se trouvent être les plus dangereuses rivales, aussi bien sur le plan économique que sur le plan politique, de la Grande-Bretagne. Tout le xviie s. n’est au fond que la recherche d’une solution à ce problème, solution qui était un préalable nécessaire au développement prodigieux du xviiie s. Ajoutons que le phénomène religieux a joué durant toute cette période un rôle primordial.


Les premiers Stuarts : Jacques Ier et Charles Ier


Le règne de Jacques Ier* (1603-1625)

• 1603-1612 : le roi maintient au pouvoir l’équipe dirigeante élisabéthaine menée par sir Robert Cecil (1563-1612), fait en 1605 comte de Salisbury.

• 1604 : à l’assemblée de Hampton Court, le roi, dont l’origine écossaise avait éveillé l’espoir du clergé presbytérien, prend nettement parti pour la Haute Église, s’alignant ainsi sur la politique d’Élisabeth. La même année, le traité de Londres met la Grande-Bretagne en paix avec l’Espagne tout en lui permettant d’aider les Provinces-Unies, son alliée.

• 1605 : découverte d’un complot catholique mené par Guy Fawkes et Robert Catesby, qui avaient fait le projet de faire sauter le roi et le Parlement le 5 novembre en entassant des barils de poudre sous la salle de réunion.

• 1609-10 : les Anglais s’installent aux Bermudes et à Terre-Neuve.

• 1610 : une alliance est conclue avec la France.

• 1611-12 : un changement de politique s’amorce. Tout d’abord, le roi n’est pas parvenu à s’entendre avec le Parlement, qu’il a dû dissoudre en 1611. Ensuite, le comte de Salisbury et le prince héritier Henri sont morts tous deux en 1612 ; ils laissent le champ libre aux factions de la Cour (en particulier la famille Howard, catholique) et aux favoris du roi.

• 1612-1624 : le gouvernement du roi et de ses favoris. Le favori en titre est alors Robert Carr (v. 1590-1645), nommé vicomte de Rochester en 1611 et comte de Somerset en 1613. Il renforce sa position en épousant la comtesse d’Essex, s’alliant ainsi à la famille Howard (et ce, malgré l’opposition de son ami Thomas Overbury, assassiné sur l’ordre de la comtesse).

• 1613 : le mariage de la fille du roi, Élisabeth, avec l’Électeur palatin, Frédéric V, chef des protestants d’Allemagne du Sud, est très bien vu en Angleterre.

• 1614 : convocation d’un Parlement, immédiatement dissous (comme le sera celui de 1621). Les difficultés financières du roi l’amènent à concéder des monopoles commerciaux dont certains se révèlent très nuisibles à l’économie.

• 1616 : le meurtre d’Overbury par la comtesse de Somerset est découvert. Somerset et son épouse sont condamnés à mort (ils seront graciés par le roi). Le scandale fait beaucoup de tort au roi lui-même. George Villiers (1592-1628), bientôt duc de Buckingham, devient alors le personnage le plus puissant, assisté de sir Francis Bacon* (garde des Sceaux en 1617 et lord chancelier en 1618) et de Lionel Cranfield (1575-1645), lord trésorier en 1621 et bientôt comte de Middlesex.

• 1616-1623 : les Anglais, à partir de l’Inde, où Thomas Roe a obtenu la permission de s’établir, sont très actifs dans l’océan Pacifique. Mais leurs commerçants ayant été massacrés par les Hollandais, ils concentrent leurs efforts sur l’Inde.

• 1618-1624 : c’est le début de la guerre de Trente Ans. Au grand mécontentement de l’opinion publique, Jacques Ier ne rompt pas avec l’Espagne : il lui sacrifie même sir Walter Raleigh*, qui, au cours d’un voyage d’exploration en Guyane, a laissé brûler une colonie espagnole qui lui barrait la remontée de l’Orénoque (il est exécuté en 1618). De même, il se refuse à prendre le parti de son gendre Frédéric V, qui prétendait au trône de Bohême, et se contente d’autoriser le départ de volontaires (1620). Un projet d’union entre le prince de Galles, Charles, et l’infante Marie est même mené assez loin, jusqu’à ce que Charles et Buckingham, étant partis secrètement à Madrid (1623), se voient refuser la main de l’infante à moins d’une conversion au catholicisme. Furieux, Charles et Buckingham rentrent à Londres, imposant alors une optique antiespagnole à la diplomatie anglaise. C’est à eux que revient à partir de 1624 la réalité du pouvoir, Jacques Ier ne mourant que le 27 mars 1625.


Le règne de Charles Ier* (1625-1649)

Le gouvernement avec le parlement (1625-1629)
Au départ, leur revirement à l’égard de l’Espagne, leur alliance avec la France, qui soutiennes protestants d’Allemagne, gagnent à Charles et à Buckingham, qui est son favori comme il a été celui de son père, toutes les sympathies. Ils ne savent pas en profiter : il est vrai que, dès le début, le Parlement a marqué sa méfiance envers Buckingham. Le roi doit le dissoudre et se trouve dès lors dans une difficile situation financière, étant même obligé de recourir à un emprunt forcé d’une légalité douteuse en 1626.

• 1625 : expédition de Cadix, lamentable échec de la flotte anglaise.

• 1626 : le chef des protestants d’Allemagne, le roi de Danemark Christian IV, est obligé d’abandonner la lutte faute d’avoir reçu les subsides promis par Charles.

• 1626-27 : c’est la rupture avec la France. Charles a renvoyé l’entourage de son épouse, Henriette-Marie, fille de Henri IV, parce que catholique. Les Français ayant manifesté leur mécontentement, le roi décide alors de voler au secours des protestants français, retranchés à La Rochelle. L’expédition de l’île de Ré, menée par Buckingham, est un fiasco.

• 1628 : assassinat de Buckingham par le fanatique John Felton.