Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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graine (suite)

Le mode de dissémination varie d’une espèce à l’autre. Dans de nombreux cas, c’est la pesanteur qui fait tomber les semences au pied de la plante mère. Parfois, on trouve des dispositifs spéciaux : les gousses des Légumineuses se tordent lorsqu’elles sont soumises à la sécheresse ; chez la Balsamine, la capsule, fermée par cinq valves, éclate au moindre choc et projette les graines à plusieurs mètres ; chez Ecballium, le fruit se détache brusquement en avant et rejette à l’arrière un liquide qui propulse les graines. Une Euphorbiacée tropicale (Hura crepitans) a une ouverture brutale de ses capsules, accompagnée de crépitements. L’Arachide enterre ses graines, le pédoncule allongé du fruit se recourbant vers la terre ; on retrouve un processus analogue chez la Linaire cymbalaire, les Cyclamens et certains Trèfles (T. Subterraneum). D’autres graines sont poussées par le vent et même parfois emportées fort loin ; les espèces dont le fruit ou la graine portent un appareil ailé ou plumeux s’y prêtent particulièrement bien (samare d’Erable, fruits plumeux de Composées). Parfois, leur petitesse et leur légèreté seules leur permettent d’être emportées par le vent sans appareillage spécial (Orchidées). Certaines sont transportées par l’eau : cela semble normal chez les plantes aquatiques (Nymphéacées), mais d’autres graines bénéficient de ce même mode de transport ; la noix de Coco peut ainsi faire des centaines de kilomètres dans les courants marins, puis germer le long des rivages où elle aborde ; on peut également retrouver des plantes de montagne en plaine, leurs graines ayant été entraînées par les torrents.

Enfin, les animaux sont aussi un moyen de dispersion pour les graines. Ce sont surtout les Insectes qui jouent ce rôle, mais des Oiseaux et des Mammifères peuvent assurer cette fonction : les akènes de nombreuses Ombellifères, de l’Aigremoine, les semences de Composées possèdent des appendices crochus qui s’agrippent aux poils et aux plumes. Les baies (Gui, Genévrier) peuvent être ingérées par les Oiseaux, et les graines rejetées plus loin.

Naturellement, l’Homme joue un grand rôle actuellement en acclimatant de nombreuses espèces hors de leur zone d’origine. Presque tous les arbres fruitiers, la plupart des légumes et les fleurs de nos jardins ne sont pas originaires du pays où ils sont employés. L’Homme a, par exemple, introduit dans le midi de la Fiance certaines plantes d’Australie importées avec des laines.


Importance systématique de la graine et phylogénie

L’existence de la graine dans le cycle de reproduction est une caractéristique des Phanérogames (appelés aussi pour cette raison spermaphytes), par opposition aux Cryptogames, qui n’en possèdent pas.

À l’intérieur des Angiospermes, la structure de la graine est utilisée pour séparer les Dicotylédones, considérées comme primitives, des Monocotylédones, dont un des cotylédons aurait perdu son rôle et ne se développerait plus. Dans certains groupes, les caractéristiques de l’embryon sont également utilisées comme critère de classification (Crucifères).

Les études paléontologiques montrent que les végétaux sans graines sont apparus les premiers, puis les Gymnospermes et plus tard les Angiospermes. Au Dévonien, on trouve déjà 3 000 espèces de Gymnospermes, 20 000 au Jurassique et actuellement environ un millier. Mais en réalité les plantes porteuses de graines sont apparues bien avant. Dans les dépôts carbonifères, on recueille de très nombreuses Fougères, souvent arborescentes, porteuses de sporanges, et, à côté d’elles, on reconnaît des feuilles apparemment de même type mais dépourvues de sporanges et accompagnées de graines rappelant celles des Cycadées. En 1903, on a trouvé des échantillons permettant de lier ces graines aux feuilles correspondantes. Ces Fougères à graines (v. gymnospermes fossiles) semblent assurer la transition entre les Cryptogames et les Phanérogames. Cependant, ces graines ne possèdent pas d’embryon bien formé comme on le trouve dans les graines actuelles, car le développement embryonnaire est reporté à la période de germination et n’a pas encore commencé au moment de la dissémination. Dans ce groupe fossile, l’ovule est surmonté d’une chambre pollinique complexe où se fait la germination du pollen avant la pénétration dans l’un des archégones. Certaines espèces portent des expansions plus ou moins plumeuses qui semblent annoncer les stigmates des Angiospermes.


Utilisation des graines par l’Homme

La graine constitue une phase importante du cycle de reproduction des Phanérogames : phase de vie ralentie qui permet au nouvel individu d’attendre des conditions favorables de germination. Elle assure les réserves nutritives nécessaires au développement de la jeune plante pendant les premiers jours de son existence, jusqu’à ce que sa nutrition indépendante soit établie.

L’Homme utilise la graine pour son rôle véritable : il recueille, trie, sélectionne et conserve les graines pour semer et obtenir une nouvelle génération. Ce travail a été découvert par les premiers agriculteurs et considérablement perfectionné au cours des millénaires. Actuellement, des industries spécialisées cultivent uniquement pour recueillir des semences, dont la qualité est constamment améliorée. C’est souvent sous forme de graines que des espèces exotiques nous ont été envoyées afin d’être acclimatées en pleine terre ou en serre.

D’autre part, l’Homme utilise les graines en grande quantité comme produit alimentaire ; il est avide de diverses réserves accumulées. Il utilise ainsi les Graminacées, qui lui procurent un mélange de protides et de glucides. Il les consomme telles quelles (Riz), mais plus souvent écrasées pour en faire diverses préparations : pain, pâtes, galettes, pâtisserie, bouillie, semoule (couscous)... De même, les Légumineuses fournissent des aliments appréciés : Haricots secs, Pois, Pois chiches, Lentilles, qui permettent de confectionner des plats très nourrissants.

Les graines oléagineuses sont une source précieuse pour une partie des graisses et huiles consommées : Arachide, Noix, Tournesol, Œillette, Colza, Palmier à huile. Pavot dans certaines régions d’Orient.

D’autres nous procurent des alcaloïdes fort appréciés, dans le Café par exemple, dont la saveur est développée par torréfaction. On en connaît qui servent de condiment (Poivre, Muscade) ou qui ont un rôle médicamenteux (Ricin, Pavot).

Les végétaux dont les graines sont avantageuses pour l’Homme ont vu leur culture se développer beaucoup, et leurs races améliorées et sélectionnées. Ils sont protégés par l’Homme, qui lutte contre leurs ennemis, et ils se trouvent de ce fait soustraits à la concurrence habituelle entre espèces.

J.-M. T. et F. T.

➙ Albumen / Fécondation / Fleur / Fruit / Germination.