Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
G

gisement (suite)

C’est pourquoi des théories radicalement opposées sont soutenues par divers chercheurs, qui croient à la possibilité d’une origine non organique du pétrole : la matière ignée en fusion émise par des volcans aurait pu, dans certaines conditions, à des températures supérieures à 1 000 °C et en présence de catalyseurs, décomposer des roches carbonatées, en expulser le gaz carbonique et le faire réagir avec l’hydrogène qu’elle contenait pour donner du méthane. Les gaz volcaniques eux-mêmes contiendraient d’ailleurs des hydrocarbures.

Quoi qu’il en soit de son origine, le protopétrole prend naissance dans une roche mère que l’on suppose être un schiste ou un calcaire bitumineux. Puis, sous l’effet de la pression, le pétrole est chassé de la roche mère, et ses globules, entraînés par les eaux souterraines, vagabondent à travers les pores des diverses couches souterraines avant d’être captés et retenus prisonniers par une anomalie géologique (dôme, faille ou autre piège) dans une roche-réservoir, ou roche-magasin, de la nature la plus diverse, puisqu’elle peut aller du début de l’ère primaire au milieu de l’ère tertiaire. Plus léger que l’eau, le pétrole, poussé par les nappes aquifères, surnage et tend à remonter vers la surface jusqu’à ce qu’il rencontre une roche-couverture, ou chapeau, marne ou argile imperméable, ou couche aux pores trop fins pour qu’il puisse continuer à y cheminer. Seule, alors, l’intervention de l’homme peut libérer les hydrocarbures emprisonnés sous pression dans les pores de roches plus ou moins perméables à des profondeurs très variables, pouvant atteindre 10 000 m, et en des emplacements difficiles à découvrir, le pétrole ne se trouvant jamais, comme certains le croient encore, sous forme de grandes nappes souterraines ou de lacs dans des grottes d’où il est facile de l’extraire. Néanmoins, certains gisements peuvent affleurer au niveau du sol par des fissures débouchant à l’air libre et même former, très exceptionnellement, un lac d’asphalte (Trinité).


Types de gisements

On distingue quatre types de gisements suivant la nature du piège géologique où s’est rassemblé le pétrole.

• Le piège structural est généralement un anticlinal, c’est-à-dire la partie bombée vers le haut d’un plissement de terrain.

• La faille est causée par une rupture et un glissement de terrain, soit vers le bas, soit vers le haut, le long d’un plan incliné, de manière qu’une couche imperméable vienne coïncider exactement en face d’une roche poreuse.

• Le piège en coin se produit lorsque des plissements géologiques anciens, jadis superficiels, ont été érodés et recouverts ultérieurement par des sédiments de telle façon qu’une roche poreuse se trouve ensuite surmontée d’une roche imperméable.

Le piège stratigraphique, le plus difficile à déceler, correspond à un changement de nature de la roche attribué, par exemple, à l’existence antérieure d’un récif de corail ou de la barre de sable d’un estuaire.

De nombreux pièges sont causés par un diapir, colonne de sel ou d’une autre roche légère et plastique surgie au milieu de couches plus lourdes sous l’effet de la pression environnante.

Les pièges sont recherchés et découverts par les diverses techniques de prospection pétrolière, mais la mise en œuvre des moyens d’investigation du sous-sol même les plus modernes ne peut, malheureusement, donner la certitude qu’une anomalie recèle du pétrole ou du gaz : seul le forage permet de vérifier s’il existe un gisement et s’il est suffisamment riche pour rendre son exploitation rentable.


Description d’un gisement

Un gisement simple du type monoclinal est constitué par les éléments suivants, décrits dans l’ordre où ils sont rencontrés par le forage :
1o la roche-couverture, ou cap rock (chapeau), constituée, par exemple, par une argile imperméable ;
2o la zone de gaz, ou gas cap (chapeau de gaz), partie supérieure de la roche-magasin (par exemple calcaire ou grès) dans les pores de laquelle s’accumulent les hydrocarbures les plus légers, gazeux aux conditions de température et de pression du gisement ;
3o une zone de transition gaz-huile ;
4o la formation productrice ou pétrolifère, partie de la roche-magasin dont les pores contiennent le pétrole à l’état liquide ;
5o un interface huile-eau ;
6o l’aquifère, partie de la roche-magasin dont les pores sont occupés par de l’eau salée en équilibre hydrostatique avec les nappes du sous-sol, ce qui a pour effet de maintenir le gisement en pression ;
7o la roche sous-jacente, socle ou bed-rock constituant le lit du gisement.

Les grands gisements du Moyen-Orient sont en général des dômes anticlinaux ovales atteignant 50 km de long sur 5 km de large ; situés à une profondeur de 4 000 m, la température y est de l’ordre de 100 °C, et la pression de 175 bars.

Étude des gisements. Un puits ne débite du pétrole ou du gaz que dans la mesure où la pression propre du gisement est suffisante pour vaincre le frottement dans la roche-magasin et surmonter la pression statique régnant au fond du puits.

L’étude du comportement d’un champ de pétrole consiste à établir les lois d’écoulement des hydrocarbures tenant compte des facteurs suivants :
— la porosité, qui est la proportion du volume total de la roche occupée par les pores (vides situés entre les grains minéraux) ;
— la perméabilité, nombre qui mesure la facilité avec laquelle un liquide donné ou un gaz ou un mélange des deux peut s’écouler à travers la roche ;
— le gas-oil ratio (G. O. R.), volume de gaz dissous simultanément produit avec chaque volume d’huile ;
— la pression différentielle entre la roche-réservoir et le fond du puits ;
— la viscosité de l’huile ;
— l’espacement des puits ;
— le débit d’écoulement désiré, notamment pour les champs de gaz qui doivent suivre les fluctuations de la demande, faute de pouvoir stocker leur production.

Cette étude s’effectue en laboratoire sur des carottes, échantillons de la roche-magasin prélevés à l’aide de l’appareil de forage, en utilisant des modèles réduits ou analogiques. La complexité du problème incite à se servir de l’ordinateur pour l’établissement de simulateurs mathématiques, les modèles tri-tri (triphasiques-tridimensionnels).

Alors que, naguère, il n’était pas rentable d’extraire plus de 20 p. 100 de l’huile en place et que l’on abandonnait prématurément un champ de roche-magasin à cause du colmatage entraîné par un soutirage trop rapide du pétrole, des taux de récupération de l’ordre de 80 p. 100 sont considérés maintenant comme très normaux.

L’automatisation des gisements, surtout ceux du gaz naturel, a atteint un grand degré de perfectionnement : c’est désormais l’ordinateur qui commandera, en fonction du débit, de la température et de la pression de chaque puits, l’ouverture de la vanne ou même le cycle de traitement.

Enfin, un nouveau domaine pose dorénavant des problèmes encore plus ardus à l’industrie du pétrole, celui de l’exploitation des gisements off-shore situés sous le fond des mers.

J. A. et A.-H. S.