Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
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géochimie (suite)

La composition globale en éléments majeurs est maintenant bien connue : oxygène, silicium, aluminium, fer, magnésium, calcium, potassium et sodium constituent plus de 98 p. 100 des roches profondes et une partie importante mais plus variable des roches sédimentaires. La teneur en éléments en traces est moins connue : les mesures sont moins précises, l’inhomogénéité de la répartition beaucoup plus grande. Il est surprenant par ailleurs de noter que des éléments peu connus comme le néodyme ou le rubidium sont beaucoup plus abondants que le cuivre et le plomb.

La formation des minéraux principaux, phases constitutives des roches, est envisagée de plus en plus sous l’angle thermodynamique. On a pu définir des domaines, en fonction des variables pression, température, composition chimique, de stabilité des minéraux et des associations minérales. Par exemple, quand on étudie la cristallisation d’un matériau dont la composition est celle d’un granite, on met en évidence que la présence d’eau à l’état supercritique a pour effet d’abaisser la température de fusion de 900 °C à 650 °C environ. Or, on connaît des granites qui se sont formés à moins de 750 °C ; en outre, on n’a pu faire la synthèse du granite qu’en présence d’eau.

Le même type d’étude peut être fait aux températures de la surface du Globe (0 à 30 °C). Par exemple, les eaux superficielles des océans des zones chaudes et tempérées sont saturées en carbonate de calcium. Ce composé, constituant essentiel des roches calcaires, qui peut se former dans ces conditions, se redissout aux grandes profondeurs où l’eau est froide et soumise à des pressions hydrostatiques importantes : dans les océans actuels, on ne trouve de carbonate de calcium que sur les fonds dont la profondeur est inférieure à 4 000 mètres.

L’influence du milieu vivant porte principalement sur les réactions d’oxydoréduction : en particulier, la décomposition de la matière organique crée sous l’interface eau-sédiment un milieu réducteur. Le passage entre le milieu océanique aéré et cette zone réductrice se fait sur quelques millimètres ou quelques centimètres, dans lesquels on observe une accumulation de composés particuliers comme les nodules de manganèse, qui recouvrent une fraction importante des grands fonds océaniques actuels.

Nous avons déjà dit que l’étude des éléments en traces posait des problèmes d’analyse chimique. L’interprétation des résultats obtenus a fait de grands progrès après l’utilisation des données de la cristallochimie ; Goldschmidt explique les substitutions des ions d’éléments en traces aux ions majeurs par des analogies structurales (même valence, rayons ioniques voisins) ; des notions de théorie du champ cristallin permettent d’expliquer les énormes variations relatives des teneurs des éléments de transition dans les roches profondes : par exemple, chrome et manganèse ont des teneurs voisines dans les roches peu différenciées (roches ultrabasiques), alors que le manganèse est 200 à 700 fois plus abondant que le chrome dans des roches très différenciées comme les granites. L’étude de séries d’éléments dont les propriétés chimiques sont comparables est particulièrement fructueuse : ainsi, la répartition des terres rares dans les roches suit quelques « schémas types » qui sont en relation avec un processus défini de différenciation.

La géochimie des isotopes stables étudie des atomes dont les propriétés physico-chimiques sont presque identiques. Les fractionnements des isotopes sont très faibles, et il faut des appareils très précis (spectromètre de masse à double collection, par exemple) pour les mesurer. Les fractionnements isotopiques dépendent de la température et non de la pression, les isotopes sont souvent utilisés comme indicateurs thermométriques : on peut à l’aide d’un couple de minéraux mesurer la température de formation en se servant des isotopes de l’oxygène.

La radiochronologie utilise la désintégration radio-active pour tenter de déterminer l’époque de formation des roches. Les « couples chronométriques » les plus utilisés sont238U/206Pb,235U/207Pb,232Th/208Pb,87Rn/87Sr,40K/40A pour les roches anciennes. La roche la plus vieille trouvée sur Terre s’est formée il y a environ 3,5 milliards d’années. Sur la Lune, on a trouvé des roches beaucoup plus « vieilles » : plus de 4 milliards d’années. On estime l’âge de la Terre à 4,6 milliards d’années.

Pour les roches plus récentes, par exemple pour les sédiments actuels, on utilise des éléments de courte période qui sont renouvelés soit par formation continue (par exemple le14C formé en haute atmosphère), soit parce qu’ils descendent d’un élément radio-actif de longue période dont ils sont séparés au moment de la formation de la roche (par exemple :230Th, qui est séparé de238U dans les processus de sédimentation).

Les différentes disciplines sont évidemment complémentaires, et les grands problèmes qui se posent exigent la conjugaison des efforts des différents spécialistes de géochimie, de géologie et de géophysique. Un exemple en est la genèse des basaltes : on commence à savoir maintenant que le magma qui leur donne naissance résulte de la fusion partielle du matériau constituant le manteau supérieur. Pour préciser la composition de ce matériau — son évolution et le degré de fusion partielle — et toutes les autres questions restant en suspens, on utilise tout à la fois les équilibres minéraux de haute température, les éléments traces (éléments de transition, terres rares), les isotopes de l’oxygène et du strontium ainsi que les données géophysiques.

G. M.

 J.-L. Jaeger, la Géochimie (P. U. F., coll. « Que sais-je ? », 1957). / P. H. Abelson, Researches in Geochemistry (New York, 1959-1967 ; 2 vol.). / B. Mason, Principles of Geochemistry (New York, 1960 ; 3e éd., 1966). / C. J. Allègre et G. Michard, les Fractionnements géochimiques (P. U. F., 1973).

géodésie

Science qui a pour but de définir géométriquement la forme extérieure de la Terre, en donnant les positions de points remarquables matérialisés (points géodésiques).


Elle se propose simultanément de donner la valeur du champ de pesanteur, en direction et en intensité. D’un point de vue pratique immédiat, elle permet d’obtenir un canevas très précis permettant aux moindres frais l’établissement de documents homogènes détaillés, notamment les cartes topographiques.

D’autre part, elle a des buts scientifiques à échéance plus lointaine tels que l’élaboration d’hypothèses géophysiques concernant l’intérieur du Globe, l’étude des modifications de la croûte terrestre, les développements de mesures précises dans le domaine spatial.