Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
G

générateur isotopique (suite)

L’intérêt de ce nouveau type de stimulateur est, outre sa fiabilité, sa longue durée de vie ; il est prévu pour fonctionner une dizaine d’années, alors que les stimulateurs classiques alimentés par des piles chimiques doivent être changés environ tous les vingt mois. Il en résulte pour le malade une diminution des risques, des chocs opératoires et des journées d’hospitalisation ainsi qu’une économie malgré un investissement initial plus important.

Ph. R.

➙ Activité / Décroissance radio-active / Isotopie / Plutonium / Radio-élément / Radium / Rayonnement / Transmutation.

générative (grammaire)

Théorie linguistique élaborée par Noam Chomsky* et les linguistes du Massachusetts Institute of Technology entre 1960 et 1965.



Les présupposés épistémologiques de la grammaire générative

Pour saisir la perspective nouvelle où se situe la grammaire générative, il faut distinguer deux conceptions de la science : une conception « taxinomique » et une conception « théorique ».

Dans un premier stade, la science est essentiellement classificatoire : elle s’efforce de dresser un inventaire aussi complet que possible ; elle vise à observer objectivement le plus grand nombre de faits, à les grouper et à les classer afin d’en dégager un ordre. La conception dite « théorique » correspond aux sciences arrivées à maturité : il ne s’agit plus d’observer afin de classer, mais de construire des hypothèses et des modèles théoriques, formulés de façon aussi explicite que possible et permettant tout à la fois d’expliquer les faits anciens et d’en prévoir de nouveaux.

Sans doute, chaque science se doit de passer par le stade de la classification des données ; cela lui permet de délimiter son objet et d’opérer une première mise en ordre du réel, sans laquelle il serait impossible de proposer la moindre généralisation valable. Mais l’observation et l’expérimentation sont incapables par elles-mêmes de former les hypothèses qui permettent d’aller au-delà des données pour les expliquer. Il n’y a pas continuité de l’observation à la formulation d’hypothèses générales, mais bien un saut qualitatif.

Le principe d’induction de type baconien (repris par les positivistes logiques, disciples modernes de Bacon) suppose une prudence expérimentale qui empêche toute généralisation. Dans une généralisation « inductive », on se contente de faire la somme d’un certain nombre de données, en s’interdisant toute extension au-delà des énoncés particuliers.

En revanche, toute formulation d’une théorie représente toujours plus ou moins un pari. À l’extrême, on pourrait même, avec Karl R. Popper (théoricien de la connaissance auquel Chomsky se réfère), affirmer que les meilleures hypothèses sont celles qui sont le moins probables.

Dans l’autre conception de la science, le statut et la fonction des données d’observation changent radicalement : il ne s’agit plus d’accumuler le plus possible d’observations ; celles-ci ne sont intéressantes que dans la mesure où elles ont une incidence sur le choix entre deux théories rivales. Selon K. R. Popper, une théorie scientifique ne saurait être vérifiée ; on peut, tout au plus, démontrer qu’elle est fausse. On jugera donc de la valeur d’une théorie selon : 1o sa valeur explicative, sa fécondité ; 2o sa cohérence interne ; 3o sa compatibilité avec les hypothèses admises dans les disciplines voisines (ce critère d’interdisciplinarité est essentiel chez Chomsky) ; 4o sa simplicité et son élégance.

Si l’on applique ce schéma d’une double conception épistémologique à l’histoire de la linguistique, on constate que cette opposition ne recouvre pas celle de la linguistique traditionnelle et de la linguistique structurale. Malgré l’hétérogénéité des réalités que recouvrent ces deux étiquettes, la linguistique traditionnelle et la linguistique structurale sont également prisonnières de la conception taxinomique. C’est en effet dans une des écoles structuralistes les plus avancées — l’école néo-bloomfieldienne — que se manifeste la conception taxinomique la plus radicale. D’après L. Bloomfield* lui-même, chaque langue doit être décrite selon sa structure propre et non par rapport à un système préconçu dans lequel le linguiste s’efforcerait de la faire entrer après coup. La logique d’une telle attitude aboutit à des affirmations extrêmes, selon lesquelles les langues diffèrent entre elles radicalement et de manière imprévisible.

Cependant, on trouve dans la linguistique présaussurienne — la grammaire de Port-Royal, W. von Humboldt* — des modèles du langage préfigurant souvent les conceptions de N. Chomsky, et chez plusieurs structuralistes des préoccupations dépassant le niveau de la simple observation. Par exemple, E. Sapir*, après avoir affirmé que la pensée émerge du langage et surgit de ce dernier en en conservant la forme (structures et principes de classification), distingue un système phonétique objectif ou externe, qui ne constitue pas l’essentiel de la forme du langage, et un système phonétique idéal ou intérieur, qui résiste aux transformations individuelles ou physiques et peut être identique pour plusieurs langues. Ce système se définit en effet par les relations qui existent entre les éléments et non par les éléments eux-mêmes.

On pourrait également se référer à certaines préoccupations d’E. Benveniste ou encore de L. Hjelmslev*, qui a insisté sur la nécessité d’une théorie générale du langage. Mais, dans toutes ces conceptions, pré- ou postsaussuriennes, la formulation d’hypothèses générales ne dépasse pas un niveau intuitif. Ce qui domine, c’est la conception classificatrice, assortie souvent de tentatives d’explication trop obscures, partielles ou trop dépendantes du sens commun.