Grande Encyclopédie Larousse 1971-1976Éd. 1971-1976
G

Gallegos (Rómulo)

Écrivain et homme politique vénézuélien (Caracas 1884 - id. 1969).


Presque toute sa vie, Rómulo Gallegos a vu se projeter sur sa patrie l’ombre des caudillos : il a quinze ans lorsque Cipriano Castro prend le pouvoir, vingt-quatre ans quand Juan Vicente Gómez lui succède et cinquante et un ans le jour où celui-ci meurt après vingt-sept années de dictature. À plusieurs reprises, même, il doit payer de l’exil son amour de la liberté. Très tôt en effet, Gallegos se pose en champion de la démocratie, et, s’il est mieux connu comme romancier que comme homme politique, hors du Venezuela du moins, ce n’est certes pas faute d’avoir œuvré pour réveiller la conscience nationale engourdie par de longues années de tyrannies barbares et pour montrer à ses compatriotes la route du progrès et de la justice sociale. Donnant souvent d’ailleurs la priorité à la politique sur la littérature, il semble avoir plutôt considéré celle-ci comme un moyen, purement didactique, d’exposer ses vues de réformiste et de moraliste, qui font de lui un maître dans la ligne des grands penseurs latino-américains, tels A. Bello* ou D. F. Sarmiento*.

Son œuvre proprement littéraire débute en 1913 par un recueil de nouvelles intitulé Los aventureros (les Aventuriers), où l’on trouve ébauchés les grands thèmes de ses romans futurs. Il a alors vingt-neuf ans et a déjà publié des essais qui traduisent sa foi dans l’éducation, seule arme véritable contre la barbarie, et révèlent un fin analyste du caractère national (« notre tempérament s’accorde mal avec tout ce qui exige un effort patient et prolongé »). C’est précisément ce manque de persévérance qui caractérise le héros de son premier roman, Reinaldo Solar (1920) : trop inconstant pour aller jusqu’au bout de son programme civilisateur, celui-ci finira par trahir ses principes en faisant cause commune avec un mouvement de révolution armée. Si ce roman est celui d’un échec, le suivant, La trepadora (1925), apporte une note optimiste : roman d’un métissage réussi, il est l’illustration d’une thèse chère à Gallegos, selon laquelle la solution des grands problèmes sociaux du Venezuela est dans le mélange du sang des Noirs et des Indiens à celui des Blancs. Avec Doña Bárbara (1929), son chef-d’œuvre, l’écrivain revient à ce thème clé du conflit qui oppose dans son pays civilisation et barbarie. Incarnation de la barbarie et symbole des forces maléfiques, l’héroïne, Doña Bárbara, est un type admirablement campé d’aventurière sans scrupule ; belle et cruelle à la fois et capable de réduire à sa merci les hommes les plus endurcis. En face d’elle, le jeune Santos Luzardo (luz signifie « lumière » en espagnol) représente le principe civilisateur, l’intelligence lucide. Outre la netteté avec laquelle sont dessinés les caractères des deux protagonistes, ce qui fait le prix de ce roman, c’est la beauté lyrique des descriptions des llanos, l’immense savane qui sert de cadre au récit. Homme de la ville, Gallegos est allé sur place étudier la vie du llanero : aussi sent-on l’observation directe dans les scènes de domptage, de sorcellerie, dans les grandes fresques peuplées de troupeaux innombrables. Le même souffle lyrique parcourt les pages du roman suivant, Cantaclaro (1934), celui d’un chanteur populaire dont la seule muse et la seule passion sont la savane infinie. Après l’immensité des llanos, Canaima (1935) nous introduit dans l’immensité végétale de la forêt vierge. Canaima est, en effet, le roman de la partie guyanaise du Venezuela, aux fleuves gigantesques, terre des Indiens énigmatiques et du mystérieux Eldorado, royaume des aventuriers de tous bords, chercheurs d’or ou de caoutchouc aux passions primitives. Ici, le héros, Marcos Vargas, a choisi de tourner le dos à la civilisation pour trouver la mesure de lui-même dans une lutte avec les forces telluriques. De cette lutte inégale, il sortira « nu d’histoire » comme au premier jour de la création, mais vaincu. C’est son fils, un métis, qui rétablira le contact avec la civilisation.

La mort de Gómez en 1935 marque le retour au Venezuela du romancier, alors exilé en Europe. S’il continue à écrire, ainsi Pobre negro (1937), roman de caractère historique où il aborde encore le problème de la fusion des races, Sobre la misma tierra (1943), auquel la région pétrolière de La Guajira sert de décor, c’est la politique qui prend la première place de ses préoccupations. Député (1937-1940), président du conseil municipal du district fédéral (1941), Gallegos est porté en 1948 à la présidence de la République. Mais, renversé après quelques mois par une junte militaire qui ne lui laisse pas le temps de réaliser son généreux programme d’« action démocratique », il doit s’exiler de nouveau, à Cuba d’abord, où il trouve l’inspiration de La brizna de paja en el viento (Un brin de paille dans le vent, 1952), puis au Mexique. Enfin, l’installation d’un régime civil en 1958 permet au romancier de regagner sa patrie, où il finira ses jours en patriarche des lettres vénézuéliennes, satisfait de voir reculer la barbarie devant le progrès et confiant dans son pays et dans son continent : « L’Amérique est à la fois notre mal et notre espérance, parce que l’Amérique est jeunesse. »

J.-P. V.

 J. Liscano, R. Gallegos y su tiempo (Caracas, 1961).

Galles (pays de)

En angl. Wales, en gallois Cymru, région de l’ouest de la Grande-Bretagne.


Le pays de Galles est, avec l’Angleterre et l’Écosse, l’une des parties constituantes de la Grande-Bretagne, la plus petite des trois (20 800 km2) et la moins peuplée (2 725 000 hab.). La situation péninsulaire à l’extrémité ouest de l’île, le climat océanique d’altitude, la massiveté du relief, le particularisme national, linguistique et religieux lui donnent une forte originalité dans l’ensemble britannique.


Le milieu

La presque totalité des Galles est un massif ancien. De longues phases d’érosion ont réduit à l’état de plateaux et de lourdes crêtes un matériel rocheux mis en place par deux plissements successifs, plissement calédonien (milieu de l’ère primaire) dans les deux tiers nord et plissement hercynien (fin du Primaire) dans le tiers sud. Le premier se marque encore par l’alignement nord-est - sud-ouest des lignes de relief : le Snowdon (1 085 m), le Cader Idris (890 m), le Plynlimon (752 m), le détroit de Menai, qui sépare l’île d’Anglesey du reste du pays, les hautes vallées de la Dee et de la Severn. Le second donne des directions ouest-est bien marquées dans le bassin houiller méridional et le Pembrokeshire. Des plateaux étages, aux altitudes de 600 m, 400 m, 250 m, occupent le centre du pays ; des vallées étroites s’y encaissent profondément. La glaciation quaternaire a donné au Snowdon de belles formes « alpines » : lacs, vallées en auge, moraines. Seul, le Val de Glamorgan, au sud, n’appartient pas au massif ancien ; l’érosion a taillé dans ses couches sédimentaires un relief de petites cuestas.

Le climat frais et très pluvieux, du fait de l’exposition aux vents humides de secteur ouest, et l’acidité de la plupart des roches du massif (schistes, ardoises, grès) valent au pays des sols de qualité médiocre et, de surcroît, mal drainés. La lande occupe de vastes étendues sur les plateaux, et la décomposition de ses végétaux donne d’épaisses couches de tourbe.